lundi 25 mai 2020

Van Gogh : Les Paveurs. Escaler à Auvers

                      Les Paveurs, Boulevard Victor Hugo à Saint Rémy

                 Décembre 1889, Saint Rémy Huile sur toile 74 x 93 cm






                  " Transposition  bouleversante de la scène de rue familière à 

l'Impressionnisme - Manet, déjà avait peint les paveurs au travail. Ici, au milieu 

de la rue éventrée par une excavation, la nature s'afirme derechef avec une 

énergie impétueuse et triomphante dans les troncs géants, les branches et les 

masses fougueuses de feuillage, transformant cette promenade intime en un 

monde apocalyptique, ni naturel ni urbain. Dans cet espace étroit où

 les branches de monstrueux platanes s'élèvent frénétiquement comme des 

racines renversées vers la zone supérieure de flammes, les autres éléments 

-maisons, routes, personnages  en marche ou au travail - gardent leur

 médiocrité quotidienne ; toutefois si on les isole en vues fragmentaires 

découpées entre les voûtes des arbres, ils prennent un aspect étrange et

 particulièrement irrégulier. ici comme dans d'autres oeuvres de cette époque, 

la perspective est source d'inspiration et se marie à la structure instable des 

objets. La diagonale aigue de la rue (qui est la diagonale même du regard du 

spectateur) , où contrastent  les lumières froides et les ombres chaudes ainsi

 que des tas de sable houleux et désordonnés et des pierres régulièrement 

taillées, est riche aussi de zigzags abrupts. Ce grand courant diagonal en

 prodondeur contrebalance et soutien la turbulence des branches au-dessus  et 

les arches pointues et tourmentées des arbres qui encadrent les aperçus 

obliques  sur les maisons de l'autre côté de la rue.

 Sans surfaces étendues de couleur simple, sans foyer visible ni points de 

repos l'équilibre de cette peinture semble un miracle. C'est au premier regard

un chaos, un orage, non seulement dans les lignes mais dans le mouchetage 

compliqué des couleurs que van Gogh recherche et multiplie sur l'arbre le plus

 proche,  dont l'énorme tronc est tissé de méandres de couleurs contrastées et

 marbrées. Et même lorsqu'on a discerné une harmonie grave dans la gradation

 serrée des couleurs locales propres aux objets - des tons chauds de la

chaussée,  de la rue des maisons avec les volets verts, et du vert feuillage, aux 

tons plus gris et plus rompus du reste- on est invinciblement ramené à la

 violence et à la véhémence de l'ensemble. l'opposition des jaunes ardents du

lointain avec les tons froids et neutralisés des arbres et du premier plan donne 

 à la toile entière une saveur originale ".


                      https://www.youtube.com/watch?v=2r40saZCRXI






      Mon cher Théo et Jo 

    Dans l'autre lettre j'ai d'abord oublié de te donner l'adresse d'ici, qui est provisoirement place de la Mairie chez Ravoux, puis lorsque je t'ai écrit je n'avais encore rien fait. A présent j'ai une étude de vieux toits de chaume avec sur l'avant-plan un champ de pois en fleurs et du blé, fond de colline, une étude que je crois tu aimeras.
Et je m'aperçois déjà que cela m'a fait du bien d'aller dans le Midi pour mieux voir le Nord . C'est comme je le supposais, je vois des violets davantage où ils sont. Auvers est décidément fort beau. Tellement que je crois que ce sera plus avantageux de travailler que de ne pas travailler, malgré toutes les mauvaises chances qui sont à prévoir dans les tableaux....



                                                                    Escalier à Auvers

                                Juin 1890 Huile sur toile 51 x  71 cm 

                   " Par sa large symétrie, ses répétitions, ses arabesques rythmées,

 sa structure ondoyante et enrubannée, c'est là un des tableaux de van Gogh  

les plus proches de l'ornementation et du goût décoratif populaire 1900, appelé 

art nouveau. Il annonce aussi cet art par son absence de relief, sa matière 

réduite et sa légéreté générale de couleur. Par rapport aux autres toiles de van 

Gogh, celle-ci a une qualité nuancée en raison de l'apport de blanc et de tons

 dilués de jaune, de vert et de bleu. Constituée de convergences et de 

rencontres multiples, axée autour d'un foyer central au pied des escaliers, cette

 scène n'a pas de dominante réelle : l'effet d'ensemble est commandé par le 

mouvement trépidant de diagonales instables imposé à des objets de caractère

 dissemblable. La répétition de ce thème incessant est si spontanée cependant

 et contient tant de variations intéressantes que la peinture perd bientôt cet 

aspect ornemental et devient une oeuvre de passion intense et de vision

 concentrée. On découvre dans les maisons des lignes droites en contraste, 

horizontales et verticales stabilisantes, les toits rouges importants et de

 nombreuses touches comme les chapeaux jaunes, l'encadrement jaune de la

 porte et les fenêtres sombres ( qui rappellent les jupes des femmes) - opposées

 délibérément à l'instabilité générale,  mais non complétement toutefois dans

 leur propre mouchetage. Les formes onduleuses ont aussi leur caractère 

individuel. Entre la maison et les escaliers, elles définissent une longue forme

 sinueuse, triangulaire, qui s'apparente au cyprès et à la route dans une oeuvre 

antérieure d'une qualité extatique, visionnaire (revoir "la route aux cyprès).

 Ici, comme en  certaines peintures plus anciennes, van Gogh pratique cet

 échange de tons entre des parties très éloignées de l'espace (et entre des 

objets voisins sur des plans différents ) qui est de ses plus puissants moyens 

d'unification. Les mêmes tons blancs avec des notes de bleu et de vert 

apparaissent dans la maison éloignée, les robes des deux fillettes au premier 

plan, sur la route et le mur qu'elles réunissent. Dans toute cette agitation de 

lignes et de taches il y a aussi une note de gaieté allègre et de ravisement".


                       https://www.youtube.com/watch?v=F3wjscNoMwQ
 

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