mardi 30 décembre 2014

L'éternel recommencement

 Je m'apprête à vous quitter pour quelques jours: je n'ai nulle intention de donner un coup de volant ni à droite ni à gauche me souhaitant seulement de rester sur la route !!!
Je vais vous souhaiter un heureux réveillon et mes voeux vous arriveront à mon retour. Une suggestion toutefois... partager avec moi l'écoute du concert de Noël à Vienne; celui de 2015 promet d'égaler les précédents et commencer l'année avec les valses de Vienne est toujours pour moi une recette de bonheur.

https://www.youtube.com/watch?v=G0lRlainLZ8

Restons encore un peu  dans nos chères montagnes:


                                       L'éternel recommencement

                           "Les utilisateurs d'une culture qui ne se transmet que par le dit, ont difficilement conscience d'une évolution: leur connaissance expérimentale du passé ne remonte pas au-delà de deux générations, et toute démarche comparative est pour eux nécessairement limitée.
Ainsi on entend encore fréquemment de nos jours les phrases rituelles qui disent le mythe de l'éternel recommencement: lorsque dans les premiers jour de janvier je souhaite une bonne année acompanhada de força autras (accompagnée de beaucoup d'autres) à mes vieux informateurs du Sour, du Val d'Aran ou de la vallée de l'Oueil, on m'embrasse et on me remercie en n'oubliant surtout jamais de répondre par le rituel, propritiatoire et fataliste: Oc que son totas parelhas !
 (Oc, elles sont toutes pareilles!...)
Ce qui n'est d'ailleurs pas l'avis de tout le monde: il y a des années qui sont pires....
E, 1988, plusieurs informateurs ont émis la même opinion que Jeanne Pène (née en 1908) qui, après m'avoir fort courtoisement retourné mes voeux a ajouté, l'air sombre et le sourcil froncé:
"C'est une année bissestile (sic). Et les années bissestiles n'ont jamais été bonnes..." (Générest)"


Les quêtes du Nouvel An

                                           Les quêtes des enfants

                " Les quêtes collectives du groupe des enfants, sont évoquées pour l'amont des vallées où elles ont cessé en 1870.
Par contre, les quêtes individuelles adressées par ces mêmes enfants à chaque maison du village semblent avoir perduré assez tard.
A l'orée du Val d'Aran, à Bézins-Garraux:

                                                         Val d'Aran
"On passait par les maisons aller souhaiter la bonne année. On disait:"
La vos vengui sohetar bona e urosa ( je viens vous la souhaiter bonne et heureuse). Alors l'on vous donnait deux sous, l'autre trois sous, à l'époque, eh, eh" (Jean Dat, qui est né en 1909, parle des années 1910-1930).

Le sou, le sucre d'orge, le bonbon, ou l'orange n'apparaissent dans les étrennes qu'au début du siècle "en dernier temps, de notre âge" dit Baptistine Fourquet, née en 1900.
 Jusque là, en Barousse comme partout ailleurs dans le domaine montagnard, l'étrenne est uniquement alimentaire et provient nécessairement

                                              Mauléon -Barousse
de la production locale:
" des noix, des prunes, on donnait et ouais! "(Marius Sost, né en 1900).
Ou bien comme dans l'Aspétois:
"Les enfants faisaient le tour du village. Et pour étrennes on donnait des châtaignes, on donnait des noix, des pommes, enfin, un geste " (Marie Labat née en 1900)
                                                       l'Aspétois
Un "geste"...... Tout le monde est unanime: l'étrenne était forcément modeste dans ce monde de pauvreté. A Girosp "Il fallait être filleule pour se faire donner cinquante centimes. On marquait le passage.
" à Chein-Dessus dans l'Arbas:" Per aquel, iuna ménina balhava... un sous"(pour celui-là une grand-mère donnait .... un sou. Mais pas plus eh!
Les témoignages montrent que c'est seulement les " petitous qui allaient galoper dans toutes les maisons"

                                                          l'Arbas
Mais dans les villages des premières hauteurs et a fortiori dans ceux de la bordure du Pièmont, pas de quête systématique de porte en porte. S'il y eut autrefois quête collective (semble-t-il avant la Convention, éclatement des communautés de vallées) puis, au XIX ème siècle, quêtes individuelles sans toutes les maisons des villages, les récits montrent que la quête s'est limitée à une communauté rétrécie, celle qui entoure la "maison-souche" au moins depuis le
Second Empire. Dès cette époque, nombreuses sont les "maisons" qui ne laissent pas sortir les enfants pour aller quêter dans le village où, au XIX ème siècle s'accentue l'inégalité économique, une quête était assimilée à la mendicité, et la pratiquer aurait pu signifier que la maison était dans le besoin............................

"A nos autis, nos han cap jamès dishar her aco! Nosatis nani.
(A nous autres on ne nous a jamais laissé faire ça! Nous autres non. On allait chez les parents, voilà."
                                            Isaure

 Je rajoute quelques repères historiques:
 la Convention, nom donné à l'Assemblée constituante de 1792 à 1795, à laquelle  succéda la Première République.

Le Second Empire: 1852-1870.

Je trouve assez extraordinaire qu'en allant choisir dans mon importante bibliothèque relative aux Pyrénées  ce Calendrier Pyrénéen, je trouve précisément des textes qui intéressent particulièrement Nistosien, en allant le quérir, je ne m'en doutais absolument pas! .............le fil ténu des choses !!!!!
Merci pour ces voeux ! auxquels je suis très sensible!

lundi 29 décembre 2014

Parenthèse

 Le soleil fait son apparition à l'heure de midi; il me suffit d'aller sur mon pas de porte pour le voir, d'un peu loin, réchauffer les sapins.

 Peu à peu la neige fond

Tourterelles et mésanges s'affairent sur les dernieres graines que je leur ai servi

mais l'eau n'a pas dégelé

A l'intérieur le soleil toujours très bas, pénètre dans la maison en éclairant mes "dreamcatchers"





Le petit verre et la" bonne année"

                                                Louis Le Nain ( 1630)

        "Où que l'on soit dans le domaine commingeois et couseranais, depuis le Nistos jusqu'au St Gironais en passant par les vallées de Barousse, Pique, Larboust, Garonne, Job, Ger, Biros, Bethmale, Sous, Salat et les massifs de l'Arbas, de l'Aspétois et de Ballaguères, les informateurs expriment une même banalisation du Premier de l'An.

Dans le Haut-Job, pour le Premier janvier, on ne va pas plus loin que :
"souhaiter la bonne année aux gens un point c'est tout, ma pauvre", dit Michel né en 1900.
"Et prendre un petit verre par-ci et par-là et voilà" ajoute Marie, née en 1900.

La réponse est partout platement stéréotypée . Et encore le "petit verre" n'est-il pas propre au Premier de l'an; d'une façon générale, la relation conviviale entre adultes est concrétisée par  "le petit verre"  que ce soit pour manifester l'amitié ou pour honorer.
Héritage de la fonction symbolique de la boisson dégustée en commun...

De nos jours, seules les personnes nées jusque vers 1920-1930 échangent leurs voeux en gascon. Toutefois, un autochtone jeune formulera souvent ses souhaits en "patois", s'il s'adresse à une personne agée. Même s'il n'est pas capable de mener une conversation en gascon, il connaît fréquemment la phrase rituelle.
Ce qui est d'autant plus facile que celle-ci est la simple occitanisation de la formule française dès le début du siècle et largement répandue depuis les années cinquante:
"Que vos sohéti una bona anada bona e urosa"(Je vous souhaite une bonne année, bonne et heureuse).
Dans cette créolisation devenue fréquente, il y a eu adjonction du qualificatif "urosa" que l'on entend pas chez les personnes âgées.
Les informateurs nés jusque vers 1920 utilisent une formulation plus ancienne faisant, elle, allusion à la longévité:
"Que vos sohéti ua bona anada acompanhada de força d'autas ou "força autras"
( je vous souhaite une bonne année accompagnée de beaucoup d'autres)
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Les éventuelles variantes dans la formulation des voeux ont été effacées par le stéréotype "Bonne et heureuse ".
J'en ai relevé une seule qui soit attribuable au groupe et non à une fantaisie créative individuelle.
Dans le Nistos, à Générest, Jeanne Pène (née en 1909) aussi sèche, ridée et savoureuse que les pruneaux qu'elle suçait en filant la quenouille (pour appeler sa salive et lui permettre d'humecter, d'un coup de langue rapide, les fibres du lin qu'elle torsadait vivement entre pouce, index et majeur réunis) raconte avec le petit rire gloussé qui ponctue toutes ses phrases:
" On souhaite une bona anada acompanhada de un terrer d'autas"
Ici, on a un petit peu arrangé l'affaire et ils mettent des oies:
"un terrer d'aucas" ( un tas d'oies)
                                                                 Isaure


                   Je trinque avec vous, les amis !!
 souvenez-vous  de cette coutume très ancienne destinée à mêler les boissons qui s'entrechoquent dans l'hypothèse d'un poison versé... .


                                                                                 Isarde

dimanche 28 décembre 2014

Une pièce rapportée

 Première neige qui tient à 700 mètres sur les reliefs calcaires et dont je n'ai vu que quelques résidus dans les pots du jardin, à mon réveil. Si le soleil daigne revenir, j'irai peut-être prendre quelques photos. Pour l'instant c'est de la neige fondue qui tombe.
 Je pense que les amateurs de glisse  auront leur Premier Janvier sur la neige.

Je l'ai beaucoup été, amatrice de glisse, mais à mes yeux rien ne remplace la neige que les branches de sapin laissent glisser à votre passage, les traces des lièvres ou des chevreuils ou des mulots, où le silence règne, où il n'est point besoin de changer de trajectoire sans surveiller l'arrivée de bolides qui, eux, vont tout droit quoique il arrive.

Pour ma part je deviendrai citadine pour quelques jours. Je ne sais si vous l'avez remarqué, je vais plutôt à la mer quand les autres vont à la montagne et inversement......




                                      Une Pièce rapportée

                                      Un greffon souffreteux

        "Parmi les fêtes et célébrations calendaires traditionnelles dans les Pyrénées centrales gasconnes, il semblerait que le Premier de l'An soit une de celles sur lesquelles il y a le moins à dire. Car c'est une de celles sur lesquelles les Pyrénéens ont le moins dit.
 Il est un fait que lors de nos entretiens de coin du feu ou de coin du bois, les papès (grand-pères) et les (menhas) grands-mères sont souvent intarissables sur la Chandeleur, Mardi gras, le Premier Mai et bien d'autres jalons calendaires qui sont matière à récits empressés............................................................................
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Pourquoi cette pauvreté du rituel attaché au Premier janvier dans les Pyrénées vasconnes?
Sans doute parceque le Premier de l'An est ici une pièce rapportée. Un greffon resté souffreteux sur un tronc culturel avec lequel les dissemblances étaient plus nombreuses que les raisons de prospérer................................................................
Ce n'est qu'au seizième siècle, en 1564, qu'un édit de Charles IX reprit la structure de l'année julienne et plaça le début de l'année au Premier Janvier.
Le calendrier grégorien ne fut adopté en france qu'en 1582. Auparavant, au VII ème siècle, sous les Mérovingiens, l'année commença le 1er mars, puis le 25, à l'équinoxe. Sous Charlemagne et jusqu'à la fin du X ème siècle ce fut le 25 décembre. Sous les Capétiens, le premier de l'an fut celui de Pâques.
Dans le grand ballet calendaire, les Pyrénées gasconnes ignorérent longtemps la valse du Premier de l'An. Par contre, leur éloignement du gouvernement central, et leur relative autonomie jusqu'en 1793, favorisèrent la permanence d'un système calendaire organisé autour du découpage solaire et lunaire. On était loin, dans ces montagnes obstinément gasconnes, des volontés ordonnatrices de Jules César qui, en - 45, avait établi le calendrier qui porte son nom et placé le début de l'année où il  avait été fixé en -153, à savoir le premier janvier ( jour de l'entrée en fonction des consuls).
Le travail avait été accompli par l'astronome grec Sosigène, qui malgré son indiscutable talent avait fait une petite erreur de calcul en plaçant le solstice au 25 décembre. L'erreur fut rectifiée en 325 par le Concile de Nicée qui, toutefois, adopta le calendrier julien et donc le Premier janvier comme premier jour de l'année.
Convention apparemment ignorée aussi bien par les indigènes vascons et gaulois dans leur ensemble que par leurs envahisseurs.".....................................................

         Très riches heures du Duc de Berry : enluminure, le mois de janvier

samedi 27 décembre 2014

suite

                    Quand le soleil n'a pas rendez-vous avec la lune...

    "Les jours de marché à Castillon, Aspet, Mauléon,ou Luchon, il dut y avoir, au moins durant le siècle passé, des conversations parfois assez vives concernant les prévisions météorologiques annuelles, entre habitants du lieu et montagnards descendus des  hauts villages. Car le premier jour des" calendros" n'est pas le même pour la montagne et pour le piémont: pour les uns, c'est la Noêl, pour les autre c'est le Premier Janvier.

                                                   Pic Isarde (Htes Pyrénées)

La répartition géographique des deux interprétations est nette: dans la bordure du piémont, l'aval des vallées et les zones de passage, Marignac, Saint Béat, Montréjeau, Saint Girons, Moulis, le compte des Douze jours commence le Premier Janvier.
Dans les petites unités les plus élevées du Biros, de la Haute-Bellongue, de l'Arbas, du Ger, du Job, de l'Aran et des villages de la Haute-Pique, Larboust et Oueil, les Douze Jours commencent à la Noël, et se terminent aux Rois.
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D'ailleurs c'est le compte de la Noël à l'Epiphanie qui s'identifie logiquement au "cycle des douze jours" tel qu'il est défini par Van Gennep (Manuel de folklore français contemporain), pour d'autres régions de France (dans lesquelles on rencontre les mêmes hésitations quant au premier des Douze jours).
La fonction prévisionnelle météorologique des calendros, n'est pas propre aux Pyrénées. On la rencontre dans toutes les cultures traditionnelles d'Europe. Elle existait déjà dans celles de l'Antiquité, depuis l'Inde védique jusqu'à Rome.
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Par contre on ne retrouve pas dans la Haute-Gascogne, pas plus, d'ailleurs, que dans l'ensemble rural français, les Fëtes des Fous de l'Europe urbaine médiévale, ces douze jours d'inversion des valeurs où les serviteurs commandaient aux maîtres, les enfants aux adultes, où l'on se couchait à l'aube pour se lever le soir et où la morale traditionnelle était systématiquement niée en des défoulements érotico-scatologiques.............................................................................................

L'inversion et les "rites de retournement" vont venir mais ce sera plus tard, à Carnaval.
Il y a pourtant une indiscutable identité originelle entre les Douze Jours des Pyrénées gasconnes et ceux de n'importe quel autre point de l'Europe: ils permettent de remonter le poids des douze mois écoulés et de raccorder l'année solaire et lunaire, écrivent Gaignebet et Lajoux dans Art profane et religions populaire au Moyen Age. P.U.F.
Les Douze Jours sont en effet le résultat de l'observation de la discordance entre la durée de l'année solaire et celle de l'année lunaire: une différence de douze nuits, soit onze jours un quart.

Le solstice est vécu comme un repère premier, un point clé qui ferme une porte pour en ouvrir une autre. Dès lors, la voie ouverte dans la sinusoïde de Chronos, et qui part du creux du solstice d'hiver, monte pendant six mois un peu plus chaque jour jusqu'à atteindre le maximum solaire du solstice d'été."

http://www.20minutes.fr/insolite/1506967-20141226-video-nasa-filme-plus-grosse-eruption-solaire-jamais-observee

vendredi 26 décembre 2014

Les calendrous




                                                 Les Douze Jours

                                          25 décembre au 5 janvier

"Un jour d'hiver clair et glacé, un de ces jours où la montagne du Nistos éblouit par ses blancs et ses bleus, nous sommes repliés dans la cuisine chaude, mais pas trop, de Jean Artigues (né en 1918).
Jean vient d'aller chercher un petit morceau de papier à lettres griffonné au crayon et qui était punaisé sur le calendrier des P. et T. accroché près de la fenêtre.
Il le dépose avec soin sur la table et s'assied sans se presser.
Puis, posément il explique. Et, à côté du papier,  son gros doigt craquelé joue les crayons sur la toile cirée:
"Le premier Janvier il faisait beau. On marquait:"beau"
 C'est à dire qu'il allait faire beau tout le mois de janvier.
Les douze premiers jours de l'année correspondaient aux douze mois de l'année.
les calendrous, quoi.
Eh bè, comme ça, on savait le temps qu'il ferait. ça c'est véridique.
Jean tapote son papier, sûr de lui et de la science des Vieux.
Mais pouquoi donc a-t-il parlé à l'imparfait? Car cette année commes les autres, il n'a pas manqué de noter soigneusement le temps qu'il a fait pendant les calendros (prononcé;"calendrous") du premier au douze janvier.
Comme tout le monde, Jean regarde la télévision. Et bien sûr le bulletin météorologique. Mais il reste, devant la météo méfiant, dubitatif et critique.
"Comment ils peuvent savoir que demain il va faire orage et tout ça" ?
...et son évaluation personnelle donne l'avantage aux Douze Jours dont la fiabilité est, à ses yeux, bien supérieure à celle de la Météorologie nationale.
Le papier annoté avec application qu'il vient  d'aller remettre à sa place le prouve......"

 Et si on essayait? de voir ce qui va se passer chez nous ? 
                     J'ai des doutes, mais pourquoi ne pas tester cette méthode ?


mercredi 24 décembre 2014

La porte ouverte




 Je ne vous le conseille pas par les temps qui courent....

                " Les portes qu'il ne faut pas fermer le soir de Noël sont-elles un souvenir de celles que l'on ouvrait pour les "hadas" (fées) le soir du 31?
Une superposition géographique parfaite entre les deux thèmes peut le laisser penser: c'est en effet, sur les chaînons calcaires que j'ai recueilli la mention de la non-fermeture des portes la nuit de Noël, c'est-à-dire sur la seule aire où l'on rencontre le mythe très répandu des hadas, ces figures légendaires bénéfiques, petites, vêtues de blanc, dont les faits et gestes constituent l'essentiel du corpus mythologique de l'ensemble haut-gascon.
Le mythe des hadas, êtres toujours chtoniens et ayant les grottes pour demeures, est nécessairement localisé sur le calcaire.
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(Isaure veut parler des massifs montagneux de calcaire).  Suivi de 

L'offrande à ceux qui viennent la nuit.

           "Ajoutons à celà que le thème de la porte ouverte aux êtres d'un ailleurs indéfini n'est pas le seul à permettre un rapprochement avec l'antique thème des hadas mythiques. Il y a aussi, pour ce même soir de Noël, celui de l'offrande alimentaire, qui rappelle le repas préparé à l'intention des hadas le 31 décembre.
Les informations orales que j'ai recueillies sur le terrain, faisant référence aux dépots alimentaires du 24 au soir, sont limitées au Haut-Comminges du Tou (Arguenos, Juzet d'Isaut),  du Haut Ger (l'Aubagne, Coué de Cassé) et au Couserans de la vallée du Sour (tous les hameaux de la vallée).
 Ainsi à Juzet:
"Et alors on faisait eth tortau de Nadau ( le gâteau de Noêl, en forme de rouelle solaire) qu'on appelait; on le faisait au four, eh. Et on le laissait sur la table pendant la messe de minuit.
Oui, pour qu'on puisse en prendre. Les vieux voulaient laisser le pain, tout ça, qu'il fallait le laisser sur la table. Marie Montané née en 1908, a un petit rire puis continue:"Je ne sais pas qui venait! Ils ne le disaient pas les vieux!"

Ici, dans les grottes calcaires ce sont les "encantadas" qui battent leur linge avec des battoirs d'or..

          N'en rêvez pas trop et que sur la terre entière ce soit pour vous tous
                                              un Joyeux Noël



mardi 23 décembre 2014

Une belle histoire de Noël

 Je descendais ce soir d'une montagne où la neige a oublié de tomber, avec l'espoir de trouver un peu de houx, las !  buis et églantier ne pouvaient le remplacer.
 De-ci de-là, les  quelques pommiers dépouillés de leurs feuilles attiraient mon regard,
  
              les rouges,

               les jaunes

             les jaunes et rouges


Je croise alors un petit monsieur sur son tracteur qui se dirigeait vers le village je remarque qu'à ses côtés dans une petite caissette débordaient des branches de houx, ce qui me conforte dans l'idée que je peux aussi  en trouver par là.
 Et je m'embarque sur une route improbable qui m'offre de beaux points de vue sous un soleil finissant, aucun houx à l'horizon mais cette route ne débouchant que sur un chemin bien mauvais,  je fais demi-tour et me trouve nez à nez avec le tracteur que j'avais rencontré dans la vallée, n'y résistant pas,  nos deux véhicules côte à côte:

 S'il vous plait, Monsieur, où avez-vous trouvé votre houx ?

Il se tourne alors vers sa caissette  à sa droite, celle de gauche laissant apercevoir quelques paquets joliments emballés, il choisit quelques branches de houx, des plus belles et me les tend en me disant "Je vous les offre de bon coeur"

" Joyeux Noël à vous! c'est trop gentil !Grand Merci!

"Joyeux Noël à vous aussi !

J'ai placé ce cadeau au plus bel endroit de la maison.

              Ne croquez pas les pommes que je vous ai offert!



Le pain bénit de Noël



       
                 "Rien ne valait, pour préserver les bêtes, le capital premier en ces pays d'élevage, le pain bénit de Noël. A la fois préventif et curatif du Mauvais comme du Méchant, le pain bénit pendant la messe de Minuit a des vertus supérieures au pain bénit ordinaire.

"Avant l'Avent, il fallait faire "la moulue", qu'on appelle, faire moudre tout le blé.
On en prenait deux sacs, trois, craignant, parce qu'il  y a des années qu'il a beaucoup neigé, craignant que le meunier ne puisse pas monter.
Et après il fallait faire la fournée. C'était la fournée de Noël, celle-là.
On donnait un peu de pain pour le pain bénit de l'église.
 La moitié, c'était pour le prêtre" (Bertrande Cazes  née en 1885, Arbon

Germaine Saurat (née en 1901) précise comment, dans le Haut-Ger:

    "C'était maison par maison (chaque maison offrait le pain à tour de rôle). Y avait des sacristains à l'église.
Ils avaient une corbeille avec du linge, propre, quand même. Ils le coupaient, le pain, rond comme une marque.
Et y en avait un morceau coupé assez gros pour que la maison qui avait donné le pain l'offrait à l'autre (celle qui avait offert le pain l'année précédente)"

L'échange du morceau de pain est mentionné également dans l'Arbas, le Haut-Job, et l'Aspétois et la Bellelongue.
     "Le curé bénissait le pain coupé en morceaux et y avait deux hommes pour passer avec ua gran apistera atau  (une grande corbeille comme ça) et avec un torchon, avià aquiu pan senhath, ( il y avait là le pain bénit )."

in live, premiers jours de gel, la frange des feuilles se glace et la païchère fume, l'eau est plus chaude que l'air.

http://www.mairie-palaja.fr/fichiers/mairie-palaja.fr/images/sites_a_visiter/paicheres_bulletinSESA_2012.pdf
( à Belesta il y en a dix )
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reprenons notre récit 

 "Les vertus du pain bénit sont unanimement mentionnées. Celle de l'aïl, issues du monde parallèle, car non-christianisé, de la recette de type magique, sont moins connues. De même que la rosée de la Saint Jean renforce les forces curatives des plantes, la nuit de Noel est le catalyseur des qualités apotropaïques de l'aïl, incomparablement efficace, d'après les utilisateurs, pour écarter infailliblement les forces mauvaises:

"Y avait le vieux Tèbé, il disait:"Si tu veux pas que les podoeras (sorcières) viennent, tu attrapes un aïl, mais alors un aïl entier, là, et le soir de la messe de  minuit tu le mets sous le traversin" (Marie Fontas, née en 1895, Couillas)



lundi 22 décembre 2014

Le Réveillon des"bêtes"

Un nouveau chapitre qui va vous surprendre suivi de l'étable interdite, coutumes que j'ignorais.
Au premier congrès international d'ethnologie, en 1971, l'ethnologue Mihaï Popp
montre que deux types de cultures coexistent en Europe.
La culture "grammaticalisée"dite "contemporaine" par laquelle les utilisateurs ont une conscience théorique précise des codes, lois et règles.
Et des cultures plus anciennes, dites" traditionnelles" que leurs utilisateurs vivent telles qu'elles sont et parce que elles sont, sans la moindre démarche analytique: ce sont les cultures"non grammaticalisées".



            "En ces pays d'élevage, le bétail est le bien le plus précieux.
il était donc, et est encore fréquemment associé au repas rituélique du soir de la Noël. En Bethmale:
"En principe, on leur donne un peu plus. On force la dose! On leur fait le réveillon." (Marcel Dupuy, né en 1914)
Dans le Haut-Sour, Jean Francoite ( né en 1906) étend le repas festif à toute la population animale de la ferme:"Le soir de Noël, il fallait faire bien souper les chiens, les poules, les cochons, les vaches. Surtout les vaches, eh!... et on leur mettait une bonne "palhada" (litière).....................................................................
Ce  comportement rituélique qui fut, et reste, actif, est la synthèse, dans le même geste, de signifiances diverses.
Le thème pré-chrétien de l'offrande et celui, plus tardif, des bibliques boeufs de la crèche, s'entremêlent en une synthèse qui est aussi une re-création.
Le processus est fréquent dans toutes les stratifications culturelles."Il fallait soigner les bêtes, ça, je l'ai entendu encore l'autre jour".

" On disait que le Bon Dieu venait les visiter pour voir si elles étaient maltraitées ou quoi" (Jean Boué, né en 1920, Arbon).
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Sous-jacent, mais présent partout, le thème de l'anthropomorphisation des animaux de l'étable est encore vivace.
Le thème central du récit légendaire liè à l'étable pendant la nuit de Noël est partout le même. On peut le diviser en trois sous-thèmes:
  - les bêtes parlent la nuit de Noël dans l'étable
  - il ne faut pas aller les écouter;
  - celui qui transgresse l'interdit est puni.
Ce récit, typique de ceux-nombreux qui énoncent le seul interdit, est complété dans les autres cas par une séquence où est décrit le chatiment:

"Il y avait un monsieur, chez qui c'était ?... d'Isaut, qui se vantait d'être rentré à l'étable la nuit de Noël. Et trois semaines après, il était mort!
Il s'était fait tuer par des vaches, avec la charrette."



Le Comminges aspétois, l'axe Garonnais, la Barousse, le Nistos et les premières hauteurs qui dominent la plaine de piémont commingeoise donnent fréquemment une version plus étoffée dans laquelle une séquence supplémentaire s'intercale entre celle de l'interdit et celle du châtiment pour celui qui est entré dans l'étable la nuit de Noël.

: "Soi-disant que cette nuit-là les bêtes parlent. Dans l'étable y avait une paire de boeufs. Un homme de chez Gaudesin a voulu y aller quand même. Il a entendu une bête qui disait:
"Deman que vam her?
  "Deman, que vam enterrar eth mestre"

(Demain qu"allons-nous faire ? Demain nous allons enterrer le maitre)

 et le lendemain  l'homme est mort."



     C'est pas drôle tout ça!!!
Un petit clin d'oeil à TV izard que j'ai rencontré récemment au festival du Film de Montagne à St Pierre de Rivière, encore un amoureux des Pyrénées!!
https://www.youtube.com/watch?v=PHMWj0DQuZ8

dimanche 21 décembre 2014

autre coutume

Je fête aujourd'hui le quatrième Dimanche de l'Avent

 de la cuisine




 au salon

 et en musique

Jeux d'orgue

https://www.youtube.com/watch?v=47eg1G7Ai3I


Sur la couronne, on place quatre bougies.
Chaque dimanche de l'Avent, on en allume une de plus. Plus la fête approche, plus il y a de lumière.

Les quatre bougies allumées sont le symbole de la lumière de Noël qui approche et qui apporte l'espoir et la paix.

samedi 20 décembre 2014

La Bûche de Noël


La "Bûche" de Noël: le Relais luni-solaire

          " Dans la tradition orale, les souvenirs mal reliés entre eux d'une culture sur son déclin, induisent des variations d'une vallée à l'autre quant à la durée de combustion du soqueth.
Le soqueth est improprement traduit de nos jours par le mot: "bûche" ce qui se comprend si l'on considère que, en effet, depuis les années cinquante, il est remplacé dans les cheminées par une bûche.
En fait, la soca, ou le soqueth, son diminutif, est la souche de l'arbre, la partie inférieure du tronc et ses racines, à savoir l'ensemble qui demeure en terre après que l'arbre ait été abattu.

Après l'avoir arrachée, on mettait cette masse à sécher pendant plusieurs mois, afin qu'elle soit prête pour le soir de la Noël.
Le fait que le soqueth ait une forme massive et non celle allongée, d'une bûche, ralentissait la combustion et permettait à celle-ci de durer pendant plusieurs jours................................................................................................................

Dans le Nistos, sur les franges du Comminges et de la Bigorre, le geste coutumier montre qu'on ne sait plus très bien lequel, du solstice ou du premier janvier, est le Premier de l'an.
Eth hoqueth (prononcé "et tchouquet"  par addition abusive de l'article) établit le raccord entre les deux:
"Eth hoqueth, il fallait pas qu'il s'éteigne, il fallait qu'il dure jusqu'au Premier janvier.
Alors qu'est ce qu'on faisait? On le reculait, le matin de la Noël. Puis on le mettait un petit peu tous les jours, et il fallait qu'il dure jusqu'au Premier de l'an." (Jeanne Pène, née en 1909, Générest)
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Dans la belle ferme de Ruau, agrippée en son splendide isolement au-dessus du Clot det Tou, là où l'horizon, de crête en sommet, n'en a jamis fini d'être lointain, et la terre, de gouffre en gorge, n'en finit pas d'être profonde, le récit de la préparation du soqueth est l'occasion d'une petite mise au point entre époux.

http://www.youtube.com/watch?v=-8yggDnbJdo

La christianisation de la bûche par une croix gravée sur l'écorce, bien que donnée souvent au passé, est encore fréquente:
"Avec le couteau, comme ça une grande croix, voilà.
Et tout le monde était content!"
Laurent Saint-Martin, né en 1915
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La bûche de Noêl a encore une grande actualité, renforcée, d'ailleurs, par la mode "occidentale" mais est conditionnée par l'existence d'une cheminée.
Pouvoir y mettre la bûche de Noël, quand on n'a que le feu de bois pour se chauffer, est ressenti comme une revanche, voire une supériorité sur ceux qui bénéficient du chauffage central et ont fermé la cheminée:
"On le fait encore, nous, eh! les jeunes vont à Tournay, chez la mère de ma belle-fille, eh, dans les Hautes Pyrénées. Bé, eux, ils peuvent pas, ils ont tout de moderne! Mais moi et mon mari, on met la grosse bûche, eh!
(Arguenos, 1983)"

                     http://www.youtube.com/watch?v=bAF866z_D_Q
                                         


La Daube

Lorsque Isaure fait mention du début du siècle il s'agit bien sûr du 20 ème  l'édition de ce livre datant de 1995.
 On est loin de la traditionnelle dinde anglo-saxonne!!
  
        "Les récits s'étendent tous avec complaisance sur le réveillon de Noël qui a laissé le souvenir d'un moment agréable, car, en tant que repas de fête, il s'élevait quelque peu au-dessus de la modestie alimentaire quotidienne.
D'abord, quelle que soit sa composition, il était un repas de plus. Cette seule caractéristique suffit à le faire regretter. Ensuite, il comprenait de la viande, denrée peu présente dans le menu quotidien de ces vallées où, jusque dans les années trente, on s'est nourri de céréales et de laitages.

La composition du réveillon évolue avec le temps, à partir du siècle la nourriture se diversifie, et varie avec l'économie des vallées et, dans celles-ci, des maisons .
En Comminges, on évoque souvent la daube que l'on mettait à mijoter devant le feu où rougeoyait le "souquet" et dont on se régalerait en rentrant de la messe de minuit
:"Le soir de Noël, quand on avait mangé, on allumait le "lutornau" (bûche de Noël, dans le Nistos) avec la daube qui cuisait devant.

(Je reviendrai plus tard sur cette bûche qui évoque pour nous les bûches patissières à la crème au beurre !!!
Si on l'appelle lutornau à Nistos  c'est ailleurs le soqueth ou la soca et c'est une souche d'arbre dont la combustion peut durer tout le temps de Noël)

       Cette daube rituelle, qui est l'exception, le luxe alimentaire, est pourtant faite avec la viande du pauvre: les bas morceaux du boeuf...................................
Voici, pour les franges du Nistos et de la Haute-Garonne, celle de Rose Bertin (nèe en 1923):
"La veille, il faut mettre à macérer les carottes, l'oignon, l'aïl, et puis les herbes, le laurier,le thym et tout ça pour donner du goût, quoi, dans du vin.
Le vin bon, quand même, eh. Et puis le lendemain il faut vider l'oule, vous le jetez pas, le vin, eh!
et puis vous passez à la poêle, à roussir, les carottes, l'oignon, mais dans la graisse d'oie, eh ! et puis vous l'enlevez, vous vous le mettez de côté et le vin, eh !
vous lui faites perdre l'alcool.
A bouillir. Et puis tout, vous le mettez dans l'oule.

Et la viande vous la coupez en petits morceaux; et la passer à la poêle, mais pas trop, quoi. Et du lard, aussi.
Et y en a, ils y mettent le pied de cochon, aussi.
Et puis tout à cuire, mais doucement, eh ! Devant le feu. Oooh! trois ou quatre heures, même, que c'est bon quand c'est cuit en y mettant le temps...
Et puis un quart d'heure avant de manger, prendre un peu de sauce pour épaissir avec la farine.
On la fait plus depuis quelque temps.
Oh, j'y avais la main, oui!"
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La daube, c'est l'opulence, relative de la polyculture : c'était au-dessous de Labroquère dit Pierre Barrère ( né en 1912, Cier de Luchon), parfaitement renseigné, pour le Haut Comminges, sur la géographie de ce plat dont il dit avoir rêvé quand il était jeune.

A Luret, :"Nous autres, la pauvre maman, pour Noêl, en rentrant, elle faisait des pescajous (crèpes). Et on buvait du cidre... Y avait un poirier, en face, qui avait beaucoup de poires et on faisait du cidre (Joséphine Barrère née en 1903)

Je ne sais s'il y a encore sur le web ce livre que j'avais écrit il y a quelques années qui montre bien la pauvreté de ces montagnes.

Eh ! bien si! il y est encore
                                               http://www.annemariedambies.com/

Mon Dieu! j'étais bien jeune dans le maniement de l'ordinateur j'avais même oublié de justifier !!! soyez indulgents  !!!

vendredi 19 décembre 2014

Marcher, manger et veiller ensemble

                                       https://www.youtube.com/watch?v=-wu9q-bR3Mw

Je poursuis  la lecture des
  Rites, coutumes et croyances dans la tradition orale du Comminges et du Couserans, d'Isaure Gratacos.

"La relation de voisinage et la convivialité villageoise sont tout de même présentes dans la fête solsticiale de l'hiver par le biais de la christianisation:
la messe de minuit était, avec le réveillon, un des deux grands axes de la soirée de Noël.
Activité de groupe, elle avait un caractère festif qui émane de tous les récits.
Jusque dans les années1930:
"Le soir de la Noël, ceux de la Traverse, on allait à Moulis, (16 kilomètres aller et retour) qu'il y ait de la neige ou qu'il n'y en ait pas, on partait l'un devant l'autre, on allait à la messe à Moulis. Et on était contents!"
On attendait ce soir là pour y aller.(Lucie Antras née en 1912)

"Oh, nous autres, on était à 6 kilomètres d'Aspet, au-dessus, Razecueillé, là. Quand on pouvait, quand y avait pas trop de neige, on descendait à la messe de minuit" (Marguerite Soum, née en 1923, Arbon).

Les informateurs agés insistent tous sur le fort enneigement au début du siècle:

"Pour Noël y avait de la neige, oh, pauvre, à ne pas pouvoir passer!

(Petite parenthèse dans ce récit, nous avons sur le Plateau de Sault (11) au-dessus de Belcaire, la Croix des sept frères, tous partis les uns après les autres dans la tourmente, au secours de leur frère disparu, et tous engloutis dans la neige).

Lorsque le trajet jusqu'à l'église était court et ne suffisait pas à remplir la soirée, l'attente de la messe se faisait entre voisins, en une veillée amicale où l'on racontait des histoires:
"Quand j'étais petit, le soir de Noël, par exemple, on racontait, avant d'aller à la messe, les"hadouns", les "hados", les fées.(Montserrier, né en 1905, Saint-Pé d'Ardet)
Et dans le Biros:
"Oc, on chantait, eh, mais comme ça, entre voisins, en famille, eh. Y en a, ils racontaient des histoires"(Hélène Estrémé, née en 1925, Estéou d'en haut)

Dans la Barousse, à Ferrère, "Y en a, ils étaient bons pour ça".
Y en avait une, Fifina, ço de Pève, bon diu! Les gosses, on aimait ça, et même tous, elle racontait, là, la tuta deras hadas (grotte des "hados), là, et la peira deth Hiter (la pierre du dressé= le menhir).

On veillait jusqu'à onze heures-minuit et on allait à la messe de minuit, entre voisins.
Et puis, après, en revenant, eh, on faisait un réveillon.

                        https://www.youtube.com/watch?v=DPJ1s0I42Ak

jeudi 18 décembre 2014

Les enfumés de Noel

                                     Les ahumats de Nadau

"Dans les zones d'habitat groupé, après la messe, la Jeunesse (dénomination habituelle, dans toute la montagne gasconne, du groupe des célibataires des deux sexes à partir de 15-16 ans et jusqu'aux alentours de 25 ans) se réunissait et courait dans la nuit d'un réveillon à l'autre...........................

Le rire de la jeunesse d'Argut-Dessus, dans la Pique luchonnaise, a laissé un souvenir assez vif dans les villages environnants.
A Cier, à Luret, à Gouaux, on raconte sur un ton mi-amusé, mi-réprobateur comment:

          " A Argut-Dessus, quand les gens veillaient, les jeunes, ils se mettaient à plusieurs et ils allaient boucher les cheminées avec des plaques, des morceaux de terre. Alors ils s'enfumaient là-dedans et ils étaient obligés de sortir! Cà, c'était terrible, le soir de Noeël, tout le monde se méfiait.
Ils l'ont fait jusqu'à la guerre de quarante. Parce que la guerre a tout coupé."

La "persécution " rituelle des ahumats de Nadau, exorcisme? purification? n'est pas l'exclusivité d'Argut-Dessus; mais sa localisation est limitée, en Comminges, à une aire que les enquêtes de terrain m'ont permis de cerner: il n'est fait mention d'eths ahumats que dans les vallées de la Pique, d'Oo, du Larboust, d'Oueil, et dans le Val d'Aran.
Jean-Paul Laurent m'a permis, le premier, de saisir la raison de cette localisation rigoureuse: elle est due à l'architecture particulière des maisons de la haute montagne centrale, depuis la Bigorre jusqu'au Haut -Couserans:

"C'était facile de monter parce qu'il y avait les "pénalous" et la cheminée au bout."

Les penalos, ces dalles de schiste qui encadrent, comme les marches d'un double escalier, le pignon des maisons et se rejoignent de part et d'autre de la cheminée, rendaient l'escalade facile.
D'autant plus que les maisons sont trapues et souvent appuyées à la pente.
Les épaules de l'un des comparses pour accéder au premier gradin des "pénalous n'étaient mëme pas toujours nécessaires...."
                                                                                                  Isaure


                                   photo prise cet automne chez nous

 Je vous asure que ces Pyrénéens étaient des colosses pour monter de telles pierres; j'ai  connu trois frères qui ont remonté "ma petite maison dans la prairie"
 les reins sanglés dans une ceinture qui faisait plusieurs fois leur tour et des "papè" qui avaient fait le tour des Amériques avec leur ours.

J'ai toujours une grande nostalgie lorsque je chemine sur leur pas.

Que je ne me laisse pas attendrir sur le passé !!! c'est la joie de Noël!!!
Je n'ai malheureusement pas trouvé en You tube "Feu de joie hivernal "
de Prokofiev, que je voulais vous faire entendre.


 http://www.francemusique.fr/emission/avanti/2014-2015/contes-d-hiver-3-5-12-17-2014-06-00















mardi 16 décembre 2014

Le renouveau plutôt que le nouveau

l'Hiver, Antonio Vivaldi
             https://www.youtube.com/watch?v=SNFUHQ6o_Ho
"Sous Charlemagne, et jusqu'à la fin du X ème siècle, le 25 décembre est le premier jour de l'année.
Dans les traditions calendaires de la montagne gasconne, la Noël solsticiale a-t-elle ces fonctions de commencement?
La naissance symbolique de l'enfant Jésus au jour _ théorique _  du solstice, est-elle vécue, dans le système cosmogonique haut-gascon, comme l'émergence d'un monde nouveau?
Il semble que, plutôt qu'une naissance, elle soit vécue comme une re-naissance et qu'elle soit le re-nouveau plutôt que le nouveau.
Elle prend place dans une mythologie de la régénération que l'on retrouve en tous les points majeurs du cycle annuel solaire de Haute-Gascogne.

La Noël solsticiale est l'annonce de la renaissance de la Nature qui est encore en gestation pour 40 jours: c'est à la Chandeleur, les dictons l'affirment, que la Nature s'éveillera à la résurrection printanière ou prolongera son sommeil hivernal.
A partir du solstice d'hiver, le soleil va accroitre un peu plus chaque jour la durée de sa course au dessus des montagnes, jusqu'au maximum glorieux du 23 juin.
Reprenons l'heureuse expression de Gaignebet (Gaignebet et Lajoux, Art profane et religion populaire au Moyen Age)

pour dire que la Noël est  " le demi-tour du temps"
                                         plutôt qu'une naissance du temps"




Le feu de l'aire fermée

"Le feu du solstice d'hiver est feu de l'aire fermée et du groupe domestique et non celui de l'aire ouverte et du groupe social.
Il est feu d'intérieur et non, comme celui du solstice d'été, feu d'extérieur.
Il est feu de braise qui couve sous la cendre et non feu à flamme haute dégageant lumière et chaleur; il est la vie en mineur pendant le sommeil hivernal et non l'explosion des forces vitales qui expriment leur énergie dans la flamme colorée et ascendante du feu de l'été.
Le soin mis à faire brûler lentement la bûche en une combustion retenue s'inscrit dans le mouvement ralenti de la vie hivernale.
La braise de la bûche de Noël ne s'oppose pas à la flamme haute du feu de la St Jean: elle permet, au contraire, son existence et sa continuité. En une polarité complémentaire de la flamme estivale, elle est le même feu en ses deux états extrèmes.....................................



..Toutefois, il arrive qu'on rencontre un rappel des feux de l'été, mais c'est dans les seules mains des enfants; dans les hautes vallées (Larboust, Oueil) et dans le Nistos, les enfants couraient d'une maison à l'autre en faisant tourner au-dessus de leur tête des lattes de bois dont l'extrémité était enflammée, les halhas.
.................................................................................................


A Générest , en dessinant ainsi le cercle solaire, ils psalmodiaient en cheur, au rythme de la giration de leur petit" brandon mobile" personnel:

Nadàu, Nadàu                                              Noêl, Noël
Pets bousquets e pets casàus                     Dans les bosquets et les jardins
Eras càuteros en houec                              Les chaudières sous le feu
Pléos de carn e de càulets,                          Pleines de viande et de choux,
Et pout en pàu                                              Le coq à la broche,
Era gario en metàu,                                      La poule dans la marmite,
Erà lèbé en soum det casàu                           Le lièvre au bout du jardin,
E courri, courri, Nadàu                                  Et cours, cours Noël.


 C'est avec un autre chant en patois gascon que mon père nous accueillait lorsque nous arrivions pour Noël.

lundi 15 décembre 2014

Cavalcades célestes

 Frisco !! je fais un copié collé de ton commentaire sur la Présentation de ce blog

"L'année 2013 a fini par brûler et d'une bien belle manière !
Tu sais Isarde que d'un incendie renaît toujours la vie ...
Je sais déjà que 2014 sera une belle année en immersion dans la nature et nous partagerons ces émotions !"


et que cela a été bien vrai !! l'année 2014  aussi se termine par d'autres incandescences,  non pas au lever du soleil mais à son coucher.



 et je poursuis la lecture d'Isaure

La Sinusoïde du temps.

Du soleil de juin au soleil de décembre, le balancier de Chronos oscille inexorablement en périodes mesurées par le mouvement astral.
Où placer un début dans la sinusoïde infinie du temps, telle qu'elle est conçue par la pensée vasconne?
Le concept de commencement, d'origine du temps et des Hommes, est absent de la pensée cosmogonique de la montagne, comme c'est d'ailleurs le cas pour tout le tronc euskarien.
Hartxuaga l'a fort bien montré dans sa thèse de doctorat: Etudes de mythologie basque et indoeuropéenne.
Ainsi on chercherait vainement dans tout l'édifice mythologique Pyrénéen gascon une séquence évoquant la naissance ou le début, la création de l'Etre à partir du Néant: il n'y a pas un seul mythe des origines dans l'ensemble de la culture orale vasconne (du moins en l'état actuel des collectes de terrain).
Pas un seul récit du commencement des temps et des hommes dans le capital légendaire vascon.
Le monde est parce qu'il est, et on ne se demande pas d'où il vient.
Dans l'ensemble basque et euskaroïde, celui qui va de l'Océan jusqu'à l'Ariège languedocienne non comprise, nulle Menha (grand-mère) et nul Papè (grand-père) ne conte le mythe des origines parce qu'on ne lui en a jamais conté.
Dans la pensée traditionnelle, le solstice d'hiver, plus qu'un commencement, est donc un re-commencement, une régénérescence, un renouvellement.



vendredi 12 décembre 2014

13 décembre

En ce temps de l'Avent où je transforme ma maison, vous vous doutez qu'amatrice d'art, musique, parfums à l'orange et la cannelle, guirlandes et couronnes sont à l'honneur.

J'ai plus envie de vous donner à lire et à entendre qu'à voir..

à entendre, une de mes Cantates préférées de Bach:

https://www.youtube.com/watch?v=xMSi3OuM1BQ

 à lire, après beucoup d'hésitations entre les contes de Noêl Russes ou

Scandinaves, j'ai choisi dans ma bibliothèque le Calendrier Pyrénéen, recueil

 d'Isaure Gratacos dont je vais vous transmette quelques extraits relatifs à cette

période."Sainte Luce et le solstice voyageur".

"Le décalage de 4 jours entre le solstice réel (21 décembre) et le jour de Noël
(25 décembre) est dû à un accident mathématique; l'erreur de calcul de l'astronome grec Sosigène lui fit placer le solstice au 25.
Le Concile de Nicée, en 325, rectifia l'erreur en remettant le solstice à sa place.
Cependant, ce n'est pas le 21 décembre qui fut retenu pour célébrer la naissance du Christ, mais le 25.
Ce jour-là, en effet, depuis les premières années de notre ére, était consacré au culte oriental du dieu solaire Mithra, et la célébration et la naissance du Christ le 25 s'inclut dans une démarche de "récupération" du culte mithraïque par l'Eglise.
Celle-ci eut d'ailleurs quelque peine à lui substituer le culte chrétien, on voit au V ème siècle saint Léon déplorer que, lors de la célébration de Noël dans la basilique St Pierre, des fidèles saluent encore le soleil levant comme cela se faisait dans le culte paîen.
L'incohérence surprenante du proverbe qui met sainte Luce en scéne est, elle aussi, une des conséquences des caprices historico-numériques du calendrier:

Entà Senta Lucia               à Sainte-Luce
Eths dias qu'alongan d'un saut de puça        Les jours allongent d'un saut de puce
Entà Nadau                        à la Noël
D'un saut de brau              d'un saut de veau

On ne peut que noter la contradiction entre le proverbe et la réalité calendaire: Sainte Luce est le 13 décembre, et le jour ne peut croïtre puisque nous sommes en période prè-solsticiale.
En fait "l'avance" de Sainte Luce est due à la réforme de Grégoire XIII qui supprima d'un seul coup 10 jours dans le calendrier: le lendemain du 4 octobre 1582 fut le 15, et Sainte Luce, qui était le 23 décembre, donc 2 jours après le solstice, d'où le dicton, se retrouva plaçée au 13 dans le nouveau calendrier.
Mais la culture populaire n'avait cure de ces changements concoctés par les élites.
Quatre cents ans après la réforme de Grégoire XIII, le proverbe est toujours là, identique à lui-même, comme si Sainte Luce, la lumière, était pour toujours et inébranlablement au 23 décembre."