Le premier ayant appartenu au comte de Nassau a disparu, le second a été
monté et relié pour Jean Stuart, troisième comte de Bute, ami personnel du roi
George III dont il fut le conseiller et le ministre. La reliure a été exécutée entre
1762, date à laquelle il fut fait chevalier de l'ordre de la Jarretière, et 1792 date de
sa mort. Plus vraisemblablement, le terminus a quo peut être avancé jusqu'à
1771, car, à cette date, sa première bibliothèque fut anéantie par le feu.
Passsionné de botanique, Bute acheta en 1783 un vaste domaine à Luton Boo,
dans le Bedforfshire. Il y fit construire une maison par les soins de l'architecte
écossais Robert Adam, et aménager un jardin botanique. C'est dans ce cadre
bucolique qu'il termina ses jours loin de la vie politique, occupé à ses doctes
travaux sur la flore britannique.
Le recueil conservé à la Bibliothèque nationale de Paris provient des collections du
comte Dimitri Petrovitch Boutourlin (1763-1829). Celui-ci aide de camp de
Potemkine puis passé aux affaires étrangères, fut nommé directeur du musée de
l'Ermitage. Bibliophile passionné et grand amateur de fleurs, sa bibliothèque et son
jardin botanique étaient célèbres à Moscou. Privé de sa bibliothèque par
l'incendie de 1812 (c'était nous dit la préface du catalogue de sa seconde
bibliothèque, une des plus belles collections de livres connues en Europe, le fruit
de trente années de peines et de recherches, il est impossible de savoir comment
il s'était procuré cet album. En effet les bibliophiles utilisent fréquemment des
"rabatteurs", des mandataires chargés de rechercher pour eux des pièces rares :
on ne peut donc affirmer qu'il l'ait acheté en Italie. Le catalogue de 1831, dressé
par Audin de Rians, ne fait pas mention des peintures : faisant la part belle aux
manuscrits, aux éditions des Aldes, des Giunti, des Boldoni, il n'énumère aucun
recueil d'estampes ou de dessins.
description de cette planche, plus loin.La vente de la bibliothèque du comte se fit en trois vacations C'est au cours de la
dernière, qui eut lieu à Paris le jeudi 14 octobre 1841, que l'album du florilège fut
vendu.Le catalogue le décrit (dans son supplément) sous le numéro 1709 : Vues
des jardins et maisons de plaisance des prince de Nassau. Ouvrage d'une belle
exécution. On y remarque le portrait du comte de Nassau, celui de son épouse et
celui du peintre Jean Walter. Les autres pièces représentent des parterres, des
fontaines, des grottes etc. Elles sont suivies de 31 dessins de fleurs, de fruits, de
la main du même peintre ; puis de 13 autres, exécutées par divers artistes
distingués, et, dont la premiére porte le nom de Marie-Isabelle Braeffin. Les
autres contiennent des fleurs, des oiseaux et des coquilles.
description plus loin
A la vente Bourtoulin, l'album fut vraisemblablement acquis par Lemière
marchand d'estampes. Quoiqu'il en soit, il tomba rapidement entre ses mains. Les
archives du département nous fournissent l'indication suivante : le 17 novembre
1841, Jean Duchesne Ainé, qui présidait aux destinées du Cabinet des Estampes,
demandait l'autorisation d'acquérir pour la somme de 350 francs un "recueil de
miniatures curieuses du temps de Louis XIV que proposait Lemière. L'autorisation
ministérielle fut accordée le 6 décembre 1841. Le relevé des acquisitions note que
l'achat fut enregistré en avril 1842 et que le volume in-folio contenait soixante-
huit peintures.Il est évidemment très regrettable de n'avoir pas conservé la reliure
de maroquin rouge dans lequel l'ensembre des miniatures est parvenu à la
bibliothèque nationale. Il s'agit là d'une perte irréparable pour l'histoire du
florilège.
L'hypothése a pu être avancée, et nous y souscrivons, que le recueil de Bute et
celui de Bourtoulin ne faisaient initialement qu'un et qu'il s'agissait sans aucun
doute du florillège du comte lui-même. Cette hypothése est invérifiable, mais
vraisemblable, car dans les archives d'Ilstein, il est toujours question de deux
florilèges et non de trois. D'autre part on sait que le florilège du comte se montait
à cent-quatre-vingt douze planches. Or, le florilège de Londres compte cent-
trente-sept feuilles en deux volumes, et celui de Paris cinquante-quatre, ce qui
nous amène à un total de cent-quatre-vingt onze. On peut supposer que Bute (ou
un possesseur antérieur actuellement inconnu) fit trier les planches, mettant de
côté celles qui avaient un intérêt botanique éminent (parce que pourvues de
légendes) de l'autre celles qui avaient un caractère artistique accompli, mais
n'apportaient rien pour la connaissance de la botanique. On sait d'ailleurs que les
doubles de la bibliothèque et de la collection d'estampes de Bude furent vendus
après sa mort.
à suivre
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