jeudi 30 avril 2020

autoportraits : suite et Verger

 Plongée plus avant dans l'étude de Schapiro ;

  " En Arles où l'objet a triomphé, il lui a donné cette merveilleuse intensité née

 de la profondeur de son désir de sécurité et d'amour. A Saint-Rémy, plus

 troublé et conscient de sa faiblesse, son contact avec l'objet était grevé 

d'anxiété et de désespoir. C'était comme si dans sa condition souffrante,

 extrême, il trouvait plus sain de libérer ses sentiments dans les formes 

controlées de la peinture que de les réprimeer, car ils se feraient jour alors en

 hallucinations et en phantasmes bien plus troublants et incontrolables. A 

Auvers il continue de se débattre dans cette alternative et les deux pôles de son

 art apparaissent quelque fois dans la même oeuvre, en une juxtaposition

 surprenante de formes fermement réalistes et d'arabesques agitées comme 

dans le" Portrait du docteur Gachet" et dans son portrait. (ci-dessous)

Tout au long de son oeuvre, le dessin en réseau a été associé avec un goût 

original pour les fortes diagonales en perspective, directions ou buts en 

opposition ; elles donnent une tension élevée à la relation spectateur-

profondeur. Dans plusieurs oeuvres de la période d'Arles, deux routes 

divergentes forment un V aigu dont les diagonales, en s'éloignant de l'avant-

plan, se joignent à un réseau d'autres lignes. L'effet est presque vertigineux 

dans sa complexité de directions concurrentes, entrelacs qui fascine et bloque

 le regard . Dans son emploi de la pespective van Gogh obéissait à une 

conception personnelle, bien que d'autres artistes, Munch en particulier, fussent 

parvenus à un résultat similaire".


   
            Septembre 1889 Saint-Rémy Huile sur toile 65 X 54 cm

    "Cet autoportrait le dernier en date et l'un des plus grands, a été exécuté peu

 de mois avant la mort de van Gogh. L'ornementation forcée, sans répit, qui 

couvre tout le fond, rappelant le travail des malades mentaux, est pour 

quelques médecins une preuve que ce tableau a été peint dans un état 

pathologique. Mais l'image que le peintre donne de lui-même révéle un controle

 et une puissance d'observation supérieurs, un esprit parfaitement capable

 d'intégrer les éléments de l'activité qu'il s'est choisie. Le fond évoque les 

rythmes de la "Nuit étoilée" à laquelle le portrait ressemble aussi par sa 

dominante bleuâtre.

Les formes flottantes et palpitantes de ce fond, diagramme d'une excitation 

continue, ne sont pas seulement des ornements, bien qu'en liaison avec les

 formes ondulantes de l'art décoratif 1900 ; nullement limitées à une cadence

 ou à une structure fixes, elles sont un moyen d'intensité, plutôt un 

débordement des sentiments de l'artiste sur ce qui l'environne. A côté du

modelé puissant de la tête et du buste, si compact et si grave, le dessin du mur

 apparaît comme un décor pâle et léger. Cependant les mêmes rythmes 

reviennent dans la silhouette et aussi dans la tête, peintes en lignes

 pareillement ramassées, volutées, ondoyantes. Si nous déplaçons notre 

attention de l'homme vers ce qui l'entoure, et inversement, les analogies se

 multiplient ; les points centraux, les noeuds qui enjolivent le fond commencent

 à s'apparenter davantage aux yeux, aux oreilles et aux boutons du personnage.

 Dans tout ce tumulte et cette accumulation tourbillonnante on sent 

l'extraordinaire fermeté de la main du peintre. les contrastes aigus de la barbe 

roussâtre avec les verts et les bleux voisins, la pénétration du dessin, la vie des 

traits tendus, le jeu parfaitement ordonné des ruptures, des variations et des 

continuités, la répartition extrêmement sûre des surfaces, tout cela révèle un 

esprit hors de pair, quels que soient le trouble et l'appréhension de l'artiste".


  Pour le premier mai, que mon brin de muguet vous apporte mes souhaits de 

bonheur, souvenons-nous que c'est encore le printemps bien que beaucoup ne 

le voient plus que de leur fenêtre.



Une photo aussi de mon pommier dans lequel je me suis plongée comme dans 
 
un verger, le verger que van Gogh va nous proposer :




        " Premier contact de bienvenue dans le Midi, où il était descendu pour

 chercher une nature apaisante et revitalisante, le verger en fleurs était pour 

van Gogh une vision enivrante ; c'est cette extase qui, imprégnant l'oeuvre, la 

distingue de la joie habituelle de l'Impressionisme devant la lumière et la 

couleur. Les arbres élèvent au ciel une masse volumineuse de blanc et de rose 

immatériels - plus qu'une masse, une émanation flottante - parsemée et 

suspendue dans un ciel aux tons également variés. Elle joue contre le semis de 

feuillage irréel et les fines ramures, qui prennent parfois un aspect visionnaire 

rappelant à la fois la peinture d'Extrême-Orient et la beauté et la tendresse 

discrète des lointains dans les paysages primitifs d'Occident.




              " Le Verger "  Mars 1888. Arles. Toile , 65x80 cm

" Toute cette partie supérieure du tableau - tissée de fleurs, de ciel, du réseau

 des branches et des pousses - concourt à une sollicitation et à une exaltation

 toutes puissantes des sens auxquelles doit s'abandonner le spectateur. Sans

 ordre apparent, une explosion de suavité rayonne et éclate, emplissant 

l'espace, comme les longs nuages horizontaux, dans des directions verticales et

 obliques vaguement suggérées. En contraste avec le flou enchanteur de la

zone supérieure, la moitié inférieure du tableau est plus solide et plus stable,

 avec de larges surfaces de couleur verte et rougeâtre et la vigueur des troncs 

d'arbres irréguliers, dont les verticales bleues rythmiques répètent par leur 

couleur et contrarient par leur direction les bandes bleues du ciel. Mais ici aussi 

palpite la sensation qui naît des franges de couleurs, les rouges et les jaunes - 

panachage qui, délibérément vertical, contraste avec le haut du tableau tout en

 gardant de celui-ci liberté et réverie par l'aspect indécis et sans accent de l'aire

 qu'il couvre. Echappant à toute technique d'école, la touche va de ces rayures 

de rouge nettement alignées aux épaisses taches de forme qui rendent d'une 

manière indéfinissable et magique la qualité des fleurs dans l'air".

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