Je ne pensais pas traverser les océans aussi vite, mais nous reviendrons en
Europe, en effet en citant les csikos de la Puszta cela m'a fait penser aux gauchos
argentins.
Pas d'envahisseurs lointains dans ces vastes espaces, ce sont eux les envahisseurs
chez les peuples premiers. Pedro de Mendoza avait traversé l'Atlantique et parvenu
sur ces rives en 1536, son prédécesseur Diaz de Solis pensait atteindre le
Pacifique mais ce sont les amérindiens qui l'ont accueilli sur leur rivage aves leurs
flèches. Le sort en était jeté 76 chevaux et autant de juments furent débarqués et
ne subirent pas celui de ces premiers arrivants qui n'ont pas survécu, ce sont
désormais des hordes de chevaux sauvages qui peuplent la pampa.
En 1580 les européens ne vont pas abandonner si vite" l'eldorado " et il faut
encore autant de montures mais aussi de troupeux de bovins le Portugais Goez y
avait abandonné sept vaches et un taureau, Goray en introduit 500 et 1.000
chevaux et en 1587 Torres de Vera Aragon rajoute 500 chevaux 4.000 brebis et
5.00 chèvres.
C'en était fait !! ce n'était pas d'arbres que la pampa était peuplée !! mais de
chevaux et de bestiaux à tel point qu'au XVII ème il était possible de s'emparer
du nombre de chevaux que l'on pouvait attraper et dresser et de se les attribuer
sans permis. Si l'Argentine est devenue célèbre pour sa viande, à l'époque sans
moyens de conservation, c'est le commerce des cuirs qui était florissant et très
florissant... vu le nombre faramineux de bêtes abattues à cet effet.
Il fallait pour cela des hommes employés à les rabattre, le gaucho était né,
solitaire ou à deux, de provenances diverses, métissé de sang indien ou
espagnols tout juste débarqués . Ce n'est pas Attila qui leur a appris à mettre
leur biftech entre la selle et le dos du cheval, il n'y a pas dans la pampa d'arbres
pour faire du feu. Ils sont à ce moment-là maîtres d'eux-mémes avec pour seul
danger les bêtes sauvages et les Indiens Pehuelches, Araucans ou Guaranis qui
n'ont pas dit leur dernier mot. La Pampa et leur cheval sont leur propriété et ils
ont du mal à "rentrer dans le rang" si je puis dire. Au XVII ème une série de
décrets tend à légiférer sur ce qu'il est possible de faire ou de ne pas faire et au
XIX ème c'en sera fini d'une liberté sans contraintes, il faudra produire une
attestation de travail dans une estancia. Tout contrevenant se verra expédié dans
un fortin reculé exposé aux attaques des Indiens. Il est libre et ne souhaite
travailler que lorsque cela est nésessaire ; le regroupement de bêtes n'est pas une
mince affaire car elles se comptent par miliers. Leur adresse et celle de leur
monture, ou une fois de plus nous constatons qu'il ne font qu'un, était très
prisées.
Il peut aussi être empoyé à chasser les jaguar et les puma qu'ils capturaient à
l'aide des "boleadoras" (trois pierres rondes reliées par des cordes) qu'ils
lancaient dans les pattes arrières du fauve puis sautaient à bas de leur cheval pour
leur porter le coup de grâce, avec le "facon" qui ne quitte jamais sa ceinture
Le poète José Hernadez a chanté sa fierté d'être libre dans
"Martin Fierro"
"Ma gloire est de rester libre
Comme un oiseau dans les airs" ..
https://www.youtube.com/watch?v=i964wwYfmvo
Une épopée que celle de ces premiers gauchos ! qui trouvera son aboutissement
au moment de la guerre d'Indépendance où ils deviendront les héros dont les
chroniqueurs militaires ennemis citeront les exploits.
Les choses ont bien changé, s'il existe encore des gauchos ce ne sont plus des
indépendants, des hors la loi, des vagabonds mais de fiers cavaliers dont l'art
équestre sera un mix entre l'école espagnole et les nécessités d'un terrain
particulier où souplesse et équilibre naturel sont essentiels.
Malgré les déplacements par train, ils guident encore les troupeaux lors de
longues et épuisantes tranhumances où tous les 10 à 20 kilomètres ils changent
de monture. Il est toujours possible de se lancer à la poursuite des hordes de
chevaux sauvages les "cimarrones", il faudra alors les dompter.
Leur plaisir ? le maté, les cartes, et le jeu du pato un mix de boskachi et de
basket- ball, il faudra tenir à bout de bras la dépouille d'un canard (remplacée par
un ballon avec poignées) et le jeter dans un panier, par équipes de quatre où là
aussi tous les coups ne sont plus permis.
Ils sont toujours les cavaliers de jadis appliquant sur leurs mollets les bottes de
cuir de poulain encore chaudes, la ceinture porte-monnaie à la taille et le rêve
d'espaces infinis et libres !! à parcourir .