Peintre en herbe, lorsqu'il réside sur les lieux de sa naissance, Saint-Thomas, aux
Iles Vierges et par cela même danois mais aussi juif espagnol par son grand- père
bordelais, français parisien par sa grand-mère tous deux ayant fui la révolution
française en 1799 et par conséquent, polyglotte, l'espagnol, le danois, le français,
cette dernière langue confortée par son éducation à Paris où déjà son directeur
encourage ses prédispositions au dessin et lui conseille de poursuivre dans cette
voie en dessinant les cocotiers !! ce qu'il ne manquera pas de faire, mais aussi
les voiles du port de Saint Thomas lorsqu'il sy rendait pour les affaires de son
père. Mais l'appel du large résonne ! il plaque tout et s'implante à Caracas avec
son ami Melbye, qui l'initie à l'usage de la couleur, toiles et aquarelles signées"
Pizarro"
Dessins au crayon en 1853
https://www.gazette-drouot.com/article/camille-pissarro-sous-le-soleil-des-tropiques/8159
En accord avec sa famille, mise sur le fait, il reprend le chemin de Paris, où il
arrive en 1856 au moment de l'Exposition Universelle, il y trouve l'occasion
parmi les nombreuses toiles exposées, de se diriger vers les peintres (dans le
langage actuel, on vous dirait , "qui lui parlent") qui s'étaient déjà affranchis des
règles académiques en vigueur, Corot, qui le guidera dans ses premiers pas, lui
faisant oublier les paysages exotiques, mais aussi Courbet, Millet, Daubigny.
Ses inscriptions dans les cours d'enseignement classique manquent à son sens
d'inspiration, il ne se soumettra pas aux conventions et va suivre avec Corot,
Courbet, celle de la nature et s'installer à la campagne .
Destins inverse, Lautrec est né à la campagne et s'installe en ville, Pissarro
passé par la ville retrouve avec joie une nature qui n'est cependant pas
comparable à celle des îles : Gauguin aussi choisira de s'exiler aux Marquises..
Sa première présentation au Salon de 1859 où il se présente comme l'élève
d'Anton Melbye, le frère de Fritz, est un paysage de Pontoise ; puis après les refus
des salons de 1861 et de 1863, c'est au Salon des Refusés qu'il exposera ses
nouvelles conceptions du paysage.
Pour les salons de 1864 et de1865 il se permet de se faire inscrire comme élève
de Melbye et de Corot. En effet ce dernier l'aurorisa à se présenter comme son
élève. Il avait toutefois pressenti qu'il n'avait pas besoin de conseils sauf celui-ci
" Il faut avant tout étudier les valeurs. Nous ne voyons pas de la même façon : vous voyez vert et moi je vois gris et blond. Mais ce n'est pas une raison pour que vous ne travailliez pas les valeurs, car cela est au fond de tout et, de quelque façon que l'on sente et que l'on s'exprime, on ne peut faire de bonne peinture sans cela".
Dés 1863, Pissarro se trouve confronté aux mêmes soucis que ses contemporains
(sauf Lautrec) et c'est une "mésalliance" aux yeux de sa famille qui est la cause
de la suppression de la pension que lui allouait son père. Il n'épousera la servante
de la famille dont il a un fils au moment du Salon des Refusés que lorsqu'il se
trouvera à Londres en compagnie de Monet, réfugié comme lui dans cette ville à
la suite de la défaite de 1870. C'est un élève de Courbet, Ludovic Piette qui lui
donne l'hospitalité dans la Mayenne. L'obstination des jurys des Salons l'incite à
des idées anarchistes qu'il exprime avec chaleur à ses amis du groupe des
Batignolles au café Guerbois où se réunissaint Manet, Degas, Renoir, Monet,
Sisley ;( il fallait affronter la société contemporaine) et Bazille parfois aussi
Cézanne. Revenons à Durand-Ruel exilé aussi à Londres qui met sa fortune en
péril pour le soutenir comme il le fait pour tous les autres jeunes
impressionnistes. Monet et Pissarro fréquentent les musées londoniens et
étudient les paysagistes Turner ou Constable; mais Pissarro a hâte de rentrer à
Louveciennes. Les conséquences économiques de la guerre de 1870 sont
désastreuses pour le monde de l'art (en sommes-nous arrivés au même stade ?)
je passerai sur les désespoirs de chacun, pour en arriver à l'embellie, l'arrivée
des "sauveurs " Caillebotte qui se lie avec Monet, Victor Choquet dont nous
avons vu les portraits, lequel soutirent plutôt Renoir et Cézanne.
En 1876 une tentative de Monet pour une exposition du groupe des
impressionnistes n'aura pas plus de succès, toutefois cette année 1876 n'est pas si
mauvaise et celle de1877 meilleure encore Caillebotte fait l'acquisition d'une
grande toile de Pissarro et celui-ci décide enfin Cézanne de participer à la
troisième exposition des impressionnistes, lesquels restent encore divisés,
soupconneux de se faire valoir les uns les autres, les toiles y sont nombreuses :
35 de Monet, 25 de Degas, Renoir 21 et Pissarro 22 , le tout sans recevoir une
rande faveur du public!!!
Il faut que ce soit le patissier Murer qui échange des plats contre leurs
toiles, pour nourrir Pissarro et ses amis. Gauguin aussi participe au sauvetage,
sans parvenir non plus à rétablir des situations catastrophiques, Piette décède et
lorsque Pissarro voit naître son troisième enfant en 1878 il lui donnera le prénom
de son ami disparu, Ludovic-Rodolphe.
A cinquante ans, Pissarro doute de voir l'avenir s'éclaircir. En 1880, la situation
financière de Durand-Ruel s'étant redressée, celui-ci reprend ses achats. c'était
quand même beaucoup de constance de sa part, et d'intuition, du goût peut-être ).
Pour la cinquième exposition, le groupe des impressionnistes se dissout, Pissarro,
Degas et Berthe Morisot y exposent seuls alors que Monet et Renoir préfèrent
suspendre encore leur toile au Salon.
Degas les qualifie de "lâcheurs" ce qui rendra Caillebotte furieux.
Il écrit à Pissarro " S'il y a quelqu-'un au monde qui ait le droit de ne pas
pardonner à Renoir, Monet, Sisley et Cézanne, c'est vous, parce que vous, vous
avez connu les mêmes besoins d"existence qu'eux et que vous n'avez ps faibli.
Mais vous ètes en vérité plus simple et plus juste que Degas..."
Ceci eut pour résultat que lors de la sixième exposition en 1881, il y eut encore
moins de participants. Mais Pissarro n'était pas rancunier et c'est avec Cézanne
qu'il peint encore pendant l'été à Pontoise. Gauguin les y rejoint et participe à
l'organisation d'une septième exposition avant que le torchon ne brûle encore
avec Degas.
Plus tard, après un nouvelle période de crise financière, Durand-Ruel, qui
a abandonné tout espoir de concorde entre les impressionnistes, décide de les
exposer tour à tout et séparément. Après l'expérience du pointillisme avec Signac
et Seurat, il abandonne leur technique mais son style en sort plus épuré (j'ai volontairement omis de vous retranscrire les critiques de Castagnary pour ne pas vous influencer)
Rien ne dure et tout évolue !!!, Durand Ruel est parti s'installer à New-York où les
amateurs amériains sont plus réceptifs à l'impressionnisme. et les affaires
reprennent. Pissarro s'installe près de Gisors et y reçoit Vincent van Gogh à la
demande de Théo,; Pissarro pressent alors la puissance de ce peintre mais son
épouse récuse, sous prétexte d'une maison remplie d'enfants, son hébergement ;
van Gogh résidera par conséquent chez le docteur Gachet à Auvers.
Nous verrons les toiles que Pissarro à peint à Rouen en 1896 et 1898 malgré des
soucis ophtalmologiques. Son fils Lucien s'installe à Londres où il lui rend visite.
Moins prisé que Monet, il atteint enfin un certain renom lorsqu'il décède en
1903.
Cézanne, à la fin de sa vie, fit écrire sur un catalogue d'exposition à Aix
"Paul Cézanne, élève de Pissarro"
Gauguin, depuis le bout du monde avait écrit un an avant sa mort, sa plus belle
épitaphe:
"Si on examine l'art de Pissarro dans son ensemble, malgré ses fluctuations, on y
trouve non seulement une excessive volonté artistique qui ne se dément jamais,
mais encore un art essentiellement intuitif de belle race... Il a regardé tout le
monde, dites-vous,! Pourquoi pas ? Tout le monde l'a regardé aussi, mais le renie.
Ce fut un de mes maîtres et je ne le renie pas."
Vous vous ferez votre propre opinion.
https://www.youtube.com/watch?v=uK7PmG25N-0