dimanche 23 décembre 2018

Gentile da Fabriano


                        https://www.youtube.com/watch?v=E9icNqNt2Yw  


 Noêl de la fin du XVème

 Noël nouvelet, Noël chantons ici.
Dévotes gens, rendons à Dieu merci ;
Chantons Noël pour le Roi nouvelet.

Quand m'éveillai et eus assez dormi,
Ouvris mes yeux, vis un arbre fleuri
Dont il sortit un bouton vermeillet.

Quand je le vis, mon coeur fut réjoui,
Car grand'beauté resplendissait en lui,
Comme soleil qui luit au matinet

D'un angelet après le chant ouïs,
Qui aux pasteurs disait :
"Partez d'ici :
En Bethléem trouverez l'Agnelet."

 En Bethléem Marie et Joseph vis,
L'âne et le boeuf, l'Enfant couché parmi ;
La crèche était au lieu d'un bercelet.

 L'étoile vint, qui la nuit éclaircit,
Qui d'Orient, d'où elle était partie,
En Bethléem les trois Rois amenait.

L'un portait or, et l'autre myrrhe aussi,
Et l'autre encens qu'il faisait bon sentir;
De Paradis semblait un jardinet.

Quarante jours la nourrice attendit,
 A Simeon l'Enfant elle tendit ;
Deux tourterell' avait dans un panier.

 Quand il le vit, il fit haut cri :
"Voici mon Dieu, mon Sauveur Jésus-Christ,
Voici Celui qui joie au peuple met !"

Un prêtre vint (dont je fus ébahi)
Qui les paroles hautement entendit,
Puis les mussa dans un petit livret.

Et il me dit "Frère, crois-tu ceci ?
Si tu y crois, au ciel seras ravi ;
Si tu n'y crois, va d'enfer au gibet."

Et l'autre jour, je songeais en mon lit
 Que je voyais un enfant tout petit,
 Qui s'appelait Jésus de Nazareth



             https://www.youtube.com/watch?v=GqYIWKFt3Ag

 Si l'Adoration des mages de Gentile da Fabriano se trouve à Florence la Présentation au temple se trouve au Louvre


                                               Joyeux Noël à tous  !

samedi 22 décembre 2018

Bernardino Luini



                             https://www.youtube.com/watch?v=0H0duzsJcTo              



O Reine qui fûtes mise
Et assise
Là-sus au trône divin, 
 Devant vous en cette église,  
Sans feintise,
Je suis venu ce matin.
Comme votre pélerin, 
Chef enclin,
Humblement je vous présente
Mon corps et mon âme, afin
Qu'à ma fin
Vous veuillez être présente.

Vierge, reine débonnaire,
 Exemplaire
De parfaite charité,
Vers vous je me viens retraire,
Car soustraire
Veux de mon coeur de vanité.
Hélas! Vierge, j'ai été
 Maint été
Et maint hiver, sans bien faire ;
L'ennemi m'a fort gutté
Et tenté
Pour moi en enfer attraire.

Je suis des mauvais le pire,
A vrai dire ;
Car tout mon entendement
Ai mis pour à chacun nuire,
 Et empire
De jour en jour grandement.
Quand je pense fermement
Vraiement,
Je ne sais moi que fasse
Sinon de pleurer souvent
Ci-devant.

Votre glorieuse face,
Très précieuse fontaine,
 Claire et saine,
Et vraie étoile de mer,
 Espérance très certaine,
 D'amour pleine,
Que pécheurs doivent clamer,
Où me pourrai-je bouter
 Ni sauver
Quand Dieu chacun jugera ?
Qui me pourra conforter
N'assurer, 
Vierge, quand le jour sera?

Hélas ! Vierge, que feront, 
Que diront
Pécheurs à cette journée ?
Car les anges trembleront
Quand orront
 La sentence redoutée.
Lors soyez, Vierge honorée,
 Apprêtée
Devant Dieu à jointes mains,
En disant : "Douce portée,
Très aimée,
Ayez pitié des humains"


Hélas ! Verge que ferai
Où serai
A ce jour horrible et fier ?
A vous du tout me rendrai
Et dirai
Que je suis votre prisonnier.
Je m'y dois bien rallier
Et fier ;
Car vous étes tant bénigne
Que vous ne pouvez oublier
Ni laisser
Celui qui vers vous s'incline.

                                                  Guillaume Alexis
                                                vers 1500


                  https://fr.wikipedia.org/wiki/Guillaume_Alexis

 http://www.nouvellesimages.fr/Bernardino-Luini_id~artistes_aut~AUT001339


vendredi 21 décembre 2018

Un autre ciel

Permettez moi cette parenthèse, mais je ne saurais manquer de vous faire part

de l'inauguration du Musée de l'Aéropostale :  presque 100 ans jour pour jour

 avec ce Noël de 1918 où un avion de Latétoère décollait pour de grandes

 traversées:

 Prenons aussi à la lettre les voeux de Bertrand Picard, parrain de ce nouveau

 musée toulousain : l'Envol des pionniers :

           https://www.youtube.com/watch?v=87rMcolKLjw

             https://www.youtube.com/watch?v=44hyIGrRweg

               https://www.youtube.com/watch?v=fQLGkmiFEcE

 https://www.arte.tv/fr/videos/080796-000-A/aeropostale-100-ans-apres/

              https://www.youtube.com/watch?v=kvAg3yCC4WM

Hugo Van der Goes

https://www.universalis.fr/encyclopedie/hugo-van-der-goes/

 Il n'est pas le seul peintre  qui ait été dans les ordres, nous avons dans les

 pages précédentes  un "capucin" et un "carmélite"... ils ne sont plus là pour

 nous donner les raisons de leur vocation ?


 Il fait preuve d'un grand réalisme ; ici, le mélange de la personnalité des

 bergers avec la présence d'anges assez sophistiqués est assez surprenant,

 j'allais dire "anachronique"..

  
 C'est à Vauquelin de la Fresnaye vers 1600  que je laisse le soin de la

 louange  :

Voyez l'étoile reluisante,
Ou bien plutôt ce beau soleil,
Qui de sa lumière éclatante
 Fait d'ue nuit un jour vermeil,
Et nous montre le lieu
Où le grand Roi de tous les rois
Qui, se faisant ore homme-Dieu,
A pris naissance à cette fois.
Allons, courons voir la Fillette
Qui emmaillote l'Enfançon,
 Qui dorelote et qui muguette
Son Seigneur, son petit garçon.

Ja les Rois, de Levant
Venus, lui présenter de l'or,
De l'encens, du myrrhe et, devant 
S'agenouillant, l'adorent or.
 Voyons le boeuf et l'âne encore, 
Et le bon Joseph à genoux,
Dont chacun d'eux l'Enfant adore,
Qui les regarde d'un oeil doux.

Une belle clarté,
Comme un grand soleil rayonnant,
 Claire, va de chaque côté 
L'Enfantelet environnant.
Un long bourdonner de musettes,
Dessous un murmure, un parler
De bergers et bergerettes,
Font haut partout retentir l'air.

 Ils viennent à monceaux
De toutes parts joyeusement,
Pour célébrer par chants nouveaux
De la Vierge l'enfantement.
 On ouït aux cieux des voix clairettes ,
Des trompettes et des clairons
D'anges, d'archanges, d'angelettes
Qui vont chantant aux environs :

Que gloire soit aux cieux,
En terre paix et bonté, 
L'abondance, voir, encor mieux,
Aux coeurs de bonne volonté !
En dépit du roi de Judée 
Des innocents cruel bourreau,
 CetteVierge recommandée
Et cet Innocent juste et beau
Iront en sûreté,
 De Joseph guidés seulement,
 Tant qu'en Egypte, en sauveté,
Ils éviteront le tourment. 
L'Enfançon, conduit par la grâce
Du Père et de l'Esprit divin,
Rachètera l'humaine race
Par son propre sang, à la fin;

Il fera dedans nous
 Renaître les belles vertus,
Dont premier, sans mal ni courroux,
Eve et Adam furent vêtus. 
Les loups et bêtes ravissantes
N'offenseront plus nos troupeaux;
Désormais ne seront nuisantes
Les sorcières à nos agneaux.
 On lairra seulement
 Le soc et la charrue aux champs :
Plus ne seront aucunement
Dérobés des larrons et méchants.
Prenons chacun sa panetière,
Suivons Philémon le berger,
Annette-Philis sa bergère :
Venez, Jane et Janot,
Anne, Madelon, Colinet,
Marion, Carlet et Margot,
Guillot, Jacquet, Bernardinet !
Adorons l'Enfant tous ensemble !

 https://www.youtube.com/watch?v=xGD7pwIiIis

jeudi 20 décembre 2018

Le Corrège

https://fr.wikisource.org/wiki/Etudes_sur_l%E2%80%99art_en_Italie_%E2%80%93_Le_Corr%C3%A8ge



                                                  La Sainte Nuit

                                               Di Maria Dolce 

  Dis, douce Marie, avec quel amour
Tu regardas ton petit enfant, le Christ, mon Dieu !
Quand tu l'eus enfanté sans peine.
La première chose, je crois, que tu fis
Fut de l'adorer, ô pleine de grâce !
Puis sur le foin, dans la crèche, tu le posas ;
Tu l'enveloppas dans quelques pauvres langes,
L'admirant et te réjouissant, je crois,
 Oh ! quelle joie tu avais et quel bonheur
Quand tu le tenais dans tes bras  !
Dis-le, Marie : car peut-être conviendrait-il
Que par pitié du moins, tu me satisfasses un peu.
Tu l'embrassais alors sur le visage,
Si je crois bien, et tu lui disais :" O mon petit enfant !"
Tantôt enfant, tantôt père et seigneur,
Tantôt Dieu et tantôt Jésus : ainsi tu l'appelais. 
O quel doux amour tu sentais en ton coeur,
Quand sur ton sein tu le tenais et l'allaitais !
Que de doux et suaves gestes d'amour
Charmaient tes yeux, quand tu regardais ton fils!
Si parfois dans le jour il s'endormait un peu
Et que tu voulusses éveiller ce trésor de paradis
Tu marchais tout doucement, tout doucement ,
 pour qu'il ne t'entendit pas,
Et tu posais ta bouche sur son visage,
Et puis tu lui disais avec un sourire maternel :
"Ne dors plus, cela te ferait mal."
Fille du souverain Père,
Humble servante du Seigneur,
 Très pieusement pour lui tu fus appelée "Mère".
A cette seule pensée, le coeur se fond
A qui sent quelque douce étincelle
 De cet amour, dont toujours je m'éloigne. 
Va, ma chanson, vers Marie, notre chère avocate.
Agenouillée devant elle, prie-là pour moi
Afin qu'elle ne soit pas trop avare de son fils,
Qui jamais ne lui refusa, ni ne lui refuse rien.
 Et dis-lui encore : "Ah ! retiens, retiens pour jamais
Celui qui toujours s'éloigne de toi !"

                                                                                 Giovanni Dominici 

       traduit de l'italien  par Gindret (1356-1419)

 https://data.bnf.fr/12435354/giovanni_dominici/

 Dans la montagne pyrénéenne : c'est le village qui chante

 https://www.youtube.com/watch?v=agBTYWPMtyg

mercredi 19 décembre 2018

Rogier Van der Weyden

 C'est un vrai concours de beauté et je ne sais laquelle choisir !! un voyage en

 Europe ! vous pensez bien que j'ai tout cela sous la main, la seule difficulté est

 de vous trouver la reproduction internet qui va pouvoir vous parvenir.

Je suis restée longtemps ce matin sur un poème de Francis Jammes sur Notre-

Dame de Sarrance et finalement, je me décide pour un Hymne de Pierre 

Gringoire en 1525, et une Vierge de Van der Weyden au Musée du Prado. 




Dame d'honneur, par- dessus les étoiles
Exaltée es très glorieusement.
Allaité as de tes saintes mamelles
Celui qui ta créée providamment.

Par le fruit que mangea notre grand'mère,
Du lieu de paix fûmes privés jadis ;
Mais ton saint fruit nous ôtes de misère,
En nous rendant la joie et paradis.

Tu es la porte où passa le haut Roi
Porte dorée et toute lumineuse,
Quand il nous vint tous mettre hors d'émoi.
Toutes gens donc, faites chère joyeuse.

Gloire à toi soit, noble et puissant Seigneur,
De mère né, qui est vierge et pucelle,
Au père aussi et Saint-Esprit honneur,
 Tous trois régnant en la gloire éternelle.





https://www.persee.fr/doc/shf_0000-0001_1906_num_1_1_1095_t1_0140_0000_3

https://www.universalis.fr/encyclopedie/rogier-van-der-weyden/

mardi 18 décembre 2018

Bernardo Strozzi

  
 https://musees-occitanie.fr/musees/musee-massey/collections/beaux-arts/bernard-strozzi/musiciens/

                https://www.youtube.com/watch?v=QPFrJq868PE




                                                  NOËL

                                  du début du Seizième Siècle
                                                                  par Y. L Crestot, presbyter 

Mes bourgeoises de Chastres
Et de Mont-le- Héry,
Menez toutes grand'joie
Cette journée ici 
Que naquit Jésus-Christ
De la Vierge Marie,
 Près le boeuf et l'ânon, don, don, 
 Entre lesquels coucha, la, la
En une bergerie


 Les anges ont chanté
Une belle chanson
Aux pasteurs et bergers 
De cette région,
Qui gardaient leurs moutons
Paissant sur la prairie,
 Disant que le mignon, don, don,
Etait né près de là, la, la,
Jésus le fruit de vie
 

Laissèrent leurs troupeaux
Paissant parmi les champs
Prirent leur chalumeaux,
Et droit à Saint Clément
Vinrent , dansant , chantant,
Menant jouyeuse vie,
 Pour visiter l'Enfant si gent,
Lui donnant des joyaux si beaux ;
Jésus les remercie.

Puis ceux de Saint Germain,
Tous en procession,
Partirent bien matin
Pour trouver l'Enfançon
Et ouïrent le son
Puis la douce harmonie
Que faisaient les pasteurs joyeux,
 Lesquels n'étaient pas las, la la,
De mener bonne vie 

Lors ceux de Saint Clément
Firent bien leur devoir
De faire asseoir les gens
Qui venaient voir leur Roi.
Joseph les remercie,
 Et aussi fait la Mère.
 Là eussiez vu danser, chanter
Et mener grand soulas, la, la,
En faisant tous grand'chère.

Lors un nommé Corbon
 Faisait de bon brouet
A la soupe à l'oignon
Cependant qu'on dansait;
Et lapins et perdreaux,
Alouettes rôties,
Canards et cormorans friands,
Gillet Badault porta, la, la,
A Joseph et Marie.


Messire Jean Guyot, 
Le vicaire d'église,
Apporta plein pot
Du vin de son logis.
messieurs les écoliers, 
Toute icelle nuitée,
Se sont pris à chanter de hait
Ut, ré, mi, fa, sol, la, la la,
A gorge déployée.

Nous prions tous Marie,
Et aussi son cher fils, 
Qu'ils nous donnent leur gloire
Là sus en Paradis ;
Après qu'auront vécu
En ce mortel repaire,
Qu'ils nous veuillent garder d'aller
Tous en enfer là-bas, la, la,
En tourment et misère.

lundi 17 décembre 2018

José de Ribera


Autre tableau d'Adoration des bergers peint par Ribera "El Españoleto"

Né à Jativa, il apprit son art à Valence auprès de Francisco Ribalta ; mais c'est 

en Italie qu'il va lui donner toute sa maîtrise  : Parme, Rome et puis Naples où

 il réside au service du Vice-Roi et travaille pous la Cour de Madrid. C'est au

 contact du Caravage qu'il perfectionne  le clair-obscur sans délaisser la qualité

 d'un dessin perfectionné : j'attirais votre attention récemment sur la poulaine

 du premier plan, ici nous avons un pied dénudé parfaitement dessiné.

      Et pour aller avec, un Noël composé par Lucas Le Moigne en 1520.


Chantons, je vous en prie,
 Par exaltation
En l'honneur de Marie
Pleine de grand renom.
Pour tout l'humain lignage
Jeter hors de péril 
Fut transmis un message
A la Vierge de prix.
 - Or nous dites, Marie ; 
Que vous dit Gabriel
Quand vous porta nouvelle
De vrai Dieu éternel ?
   - Dieu soit en toi, Marie,
Dit-il sans fiction ;
Tu es de grâce emplie
Et bénédiction.
  - Or nous dites, Marie,
Si, neuf mois accomplis, 
Naquit le fruit de vie
Comme l'Ange avait dit.
  - Oui, sans nulle peine
Et sans oppression
Naquit de tout le monde
La vraie rédemption.
  - Or nous dites, Marie, 
Du lieu impérial :
 Fut-ce en chambre parée
Ou en château royal ?
  - En une pauvre étable
Ouverte à l'environ, 
Où n'avait feu ni flamme ,
Ni latte ni chevron
  - Or nous dites, Marie,
Qui vint vous visiter
Les bourgeois de la ville
Vous ont-ils confortée ?
  - Oncques homme ni femme
n'eut de moi compassion
Non plus d'une esclave
D'étrange région.
  - Or nous dites Marie, 
les laboureurs des champs
Et aussi les marchands ?
  - Je fus abandonnée
De cette nation,
De tous, cette nuitée, 
Sans consolation.
  - Or nous dites Marie,
 Des pauvres pastoureaux
Qui gardaient aux prairies
Leurs brebis et agneaux.
  - Ceux-là m'ont visitée
Par grande affection ;
Et moult m'a sonsolée
Leur visitation.
  - Or nous dites, Marie,
Les princes et les rois, 
Votre enfant débonnaire,
Le sont-ils venus voir ?
  - Trois rois de haut parage,
 D'étrange région, 
Lui vinrent faire hommage
Et grande oblation.

Nous vous prions, Marie, 
De coeur très humblement, 
Que vous soyez amie
Vers votre cher Enfant,
Afin qu'au jour funeste
Que tous jugés nous serons,
 Puissions être à la dextre
 Placés avec les bons.

https://fr.wikipedia.org/wiki/X%C3%A0tiva

dimanche 16 décembre 2018

Giotto

Cela devient de plus en plus difficile de choisir, et j'ai de plus en plus de

 prédilection pour des tableaux qui se rapprochent de la simplicité : aujourd'hui 

je vous emmène à Padoue dans la chapelle Scrovegni :


https://www.cineclubdecaen.com/peinture/peintres/giotto/chapellescrovegni.htm


 Cette Nativité  de 1304 me semble bien assortie à ce Noêl du début du XVI ème siècle :

Laissez paître vos bêtes,
Pastoureaux, par monts et par vaux,
 Laissez paître vos bêtes, et venez chanter Nau.


j'ai ouï chanter le rossigneau,
 Qui chantait un chant si nouveau.
Si haut, si beau, si raisonneau.
Il m'y rompait la tête,
Tant il prêchait et caquetait !
Adonc pris ma houlette
Pour aller voir Naulet.

Je m'enquis du berger Naulet :
"As-tu ouï le rossignolet
 Tant joliet, qui gringotait
Là-haut sur une épine?
-Oui me dit-il, je l'ai ouï ; 
J'en ai pris ma bussine
Et m'en, suis réjoui." 


 Nous dîmes tous une chanson,
 Les autres y vinrent au son.
Or, sus, dansons, prends Alison,
Je prendrai Guillemette. 
Margot tu prendras Gros-Guillot.
Qui prendra Péronelle?
Ce sera Tallebot.


Ne dansons plus, nous tardons trop.
 Pensons d'aller, courons le trot.
Viens-tu Margot ?- J'attends Guillot.
J'ai rompu ma courette, 
Il faut racoutrer mon sabot.
-Or tiens cette éguillette :
Ell' te servira trop.

 Comment, Guillot ! ne viens-tu pas ?
- Et oui j'y vais tout l'entrepas.
Tu n'entends pas du tout mon cas :
J'ai au talon les mules,
Par quoi je ne puis pas trotter;
Prises m'ont les froidures
En allant estraquer.


 Nous courûm's de telle roideur
 Pour voir notre doux Rédempteur,
 Vrai Créateur et Formateur.
Il avait, Dieu le sache, 
De linges assez grand besoin : 
Il gisait dans la crèche,
Sur un botteau de foin.


 Sa mère avecques lui était, 
Un vieillard or lui éclairait :
Point ne semblait au beau douillet,
 Il n'était pas sans père.
Je l'aperçus trop bien et beau;
 Il semblait à la mère,
 Encor est-il plus beau.


Pas ne laissâmes à gaudir
Je lui donnai une brebis
Au petit fils ; une mauvis
Lui donna Péronelle ; 
Margot ell' lui donna du lait
Toute pleine une écuelle 
Couverte d'un volet.


Or déprions le Roi des rois
Qu'il nous donne à tous bon Noël,
Et bonne paix de nos méfaits ;
Ne veuille avoir mémoire
De nos péchés, mais pardonner ;
A ceux du Purgatoire
Leurs péchés effacer.


Laissez paître vos bêtes ,
Pastoureaux par monts et par vaux,
 Laissez paître vos bêtes,
 Et venez chanter Nau. 

 







samedi 15 décembre 2018

el Greco

 C'est autour de 1600   que ce Crétois de naissance peint cette Sainte Famille,

(il en peindra d'autres versions). Avant d'arriver à Tolède, après avoir été initié

 à la tradition primitive de l'art bysantin, il est passé par Venise et Rome, où il a

 pu admirer le Titien et le Tintoret, mais sa "facture" est toute personnelle et

 reconnaissable entre tous.

Peintre, presque exclusivement  d'art religieux et portraiste.

Cette "Sainte Famille" exposée au Musée du Prado, est pleine de spontanéité 

Sainte Anne se joint à St Joseph pour admirer ce beau bébé.

 Mais c'est la présence du jeune Jean (baptiste) qui est plus surprenante, selon

un  évangile apocryphe, orphelin il aurait été adopté par Marie et la

symbolique du panier de pommes apportent un regard nouveau sur cette scène

toute "familliale" (https://fr.wikipedia.org/wiki/Prot%C3%A9vangile_de_Jacques)



                                                        
SEQUENCE

de Noktèr pour la Nativité

                                          Poème du X ème siècle, traduit du latin.


Il est né avant les siècles le Fils de Dieu, invisible, infini ;

Par lequel est faite la machine du ciel  det de la terre, de la mer et des êtres qui vivent là :

Par lequel les heures et les jours tombent et de nouveau jaillissent :

Auquel les anges dans la cité du ciel chantent sans cesse des chants harmonieux.

Il avait pris un corps fragile, sans souillure du crime originel, fait de la chair de la Vierge Marie, pour laver la faute du premier père et la lascivité d'Eve.

 Ce présent jour de répit, ce jour très clair nous dit par sa longueur accrue que le vrai soleil, par le rayonnement de sa lumière, a chassé les vieilles ténèbres de la naissance du monde.

Et la nuit se para de la lumière d'une étoile nouvelle qui épouvanta les yeux doctes des mages.

Et la lumière apparut aux maîtres des troupeaux, qu'éblouit la clarté des soldats de Dieu.

Réjouis-toi Mère de Dieu, ô toi qu'entourent, au lieu d'accoucheuses, des anges qui chantent : Gloire à Dieu !

Christ, fils unique du Père, toi qui pris pour nous la forme humaine, réconforte tes suppliants.

Et de ceux auxquels tu as daigné participer, daigne, Jésus, accueillir les prières,

 Afin de les faire, ô Dieu, participer à ta divinité, ô toi l'unique fils de Dieu.



Noktèr dit le petit bègue, à Saint Gall lauteur du "Séquencier" c'est à dire du

 livre qui contenait toutes les proses qu'il avait faites pour être chantées à 

l'Alleluia de la Messe, mort  le 6 avril 912, dont on fait l'office à Saint Gall avec

 le titre de bienheureux depuis 1514 par permission de l'évêque de Constance

 Hugues de Lambert.( Bade-Wurtemberg).

 L’abbaye de Saint-Gall est une abbaye bénédictine du VIIᵉ siècle de Saint-Gall 

en Suisse alémanique qui fut pendant plusieurs siècles avec sa bibliothèque l'un

 des monastères bénédictins les plus importants d'Europe.

                      https://www.youtube.com/watch?v=37QhEtGMHTI

mercredi 12 décembre 2018

Murillo


                     Vierge du Rosaire : avant 1650. Musée du Prado Madrid

De l'Italie nous passons à l'Espagne, avec le Sévillan Murillo qui ne quitta pas sa

ville natale, et pourtant son oeuvre se ressent des influences vénitiennes et

surtout flamandes; on continuera à sa suite à peindre suivant son école jusqu'à

 la moitié du XIXème. Alonso Cano eut sans doute sur lui, au moins à ses débuts,

    une certaine influence. On peut le vérifier sur cette composition identique à

 celle de Murillo : une grande simplicité dans les costumes, rien d'ostentatoire.



 Et pourquoi pas un poème de Frédéric Mistral, en occitan, notre félibre

 provençal :


O bello Vierge Inmaculado
Que dins lis astre enmantelada
Tèmes d'à lou monde e nôsti van trafé,
O douço Reino de la Franço
Qu'em'un regard debenuranço
Pos abouca l'infère e si rire trufet.
 Di man indigno dôu felibre,
 Recibe en gràci aqueste libre
Ounte li gènt de Franço an estampa sa fe !



 Sus chaque pive, sur chasco cimo
 Noso nacioun crestianissimo
 T'a dreissa de capello à ras di nivoulum ;
Touti li flour de si mountagno.
De la Prouvènço à la Bretagno 
Te brulon soum encens ; e tout soun aucelun
Te canto li sèt alegresso
 Qu'à Belelelèn i' avies apresso
Quand bressaves toun fiéu agouloupa de lum


I'a gens de bourg que noun, en aio,
Chasque ans te vogue pèr sa maio,
 O femo vinceiris qu'as escracha la serp !
J'a gens de prèire dins soun prone, 
Gens de marin sus mar o de pastre au desert
Que noun te digne Noetro-Damo !
E l'univers, de cor et d'amo


Te prègo d'à geinoui e s'apound' au councert !
Nèu dou Liban, neu eternalo
Ounte l'idéio divinalo
 S'èro dicho toustèms de traire soun belu,
 Nèu cando e bléujo, nèu blanduèlo
Qu'entre senti la belugneto
 Illuninè d'amour la terro e lou céu blu,
Nèu mai courouso que lis ièli
 Que l'ange, nous dis l'Evangéli !
De la part d'ôu Segnour, t'aduguè lou salut !

 Santo Marîo, fai nous lume !
Que nosto  raço noun s'embrüme
Dins l'embriagamen, dins lou foum e l'ourquei
De la matèri ! Zou estrasso
De ti lusour la niué nefrasso
 Que sous lou mounde entié lou mau escampo vuei
Emé toun fiéu qu'as sus ta faudo
 Enca saunous, Maire esbribaudo
Tôuti li manufatam que seménon lou juei !



« Ô Belle Vierge immaculée qui, emmantelée dans les astres, veilles sur notre monde et nos vaines agitations ; ô douce Reine de la France qui d'un regard béatifique peux confondre l'enfer et ses sarcasmes ; des mains indignes du félibre, reçois bienveillante ce livre où les peuples de la France ont imprimé leur foi. Sur chaque puy, sur chaque cime, notre nation très chrétienne t'éleva des chapelles au ras des nues ; toutes les fleurs de ses montagnes, de Provence à la Bretagne te brulèrent leur encens ; et tous ses oisillons te chantent les Sept Allégresses qu'à Bethléem tu leur appris quand tu berçais ton Fils enveloppé de lumière. Il n'y a point de bourg qui, en émoi ne te consacre chaque année son mois de mai, ô femme triomphante qui écrasa le serpent ! Et point de reine sur le trône et point de prêtre dans son prêche, sur mer point de marin ou de pâtre au désert qui ne t'appelle Notre-Dame ! Et l'univers, d'âme et de cœur, Te prie agenouillé et s'unit au concert. Mais si tu es, ô Bienheureuse, à Toulouse Notre-Dame la Daurade car l'or pur du soleil est effacé par toi ; si entre Avignon, Marseille et Vence, si tu es Notre-Dame de Provence car sainte Anne et sa tombe y appellent tes bienfaits ; sur la roche Corneille du Puy, tu es, ô Vierge aimée, Notre Dame de France, un nom que nous te fîmes ! Ta gloire croît de siècle en siècle, car ton sein vierge est un ciboire où mon Rédempteur s'incarne pour moi ! Et tu es la merveille humaine car dans son sang et dans sa fille, Adam peut vénérer la Mère de son Dieu ; tu es près de Dieu l'avocate qui défend l'homme et qui le couvre contre le courroux du ciel et ses foudres vengeresses. De ta couronne virginale, hier enfin unanime l'Église a voulu dévoiler le diamant le plus beau; et le grand prêtre du Très-Haut ; celui qui tient l'anneau de Pierre, a fait sur nos ténèbres resplendir le flambeau, te proclamant Immaculée comme la neige amoncelée qui se fond en rivière au lever du soleil. Neige du Liban, neige éternelle où l'Idéal divin s'était dit avant le temps de jeter son rayon ; neige pure, éblouissante, neige blanche qui, au contact de l'étincelle illumina d'amour la terre et le ciel bleu ; neige plus que les lis brillante que l'ange, nous dit l'Évangile, de la part du Seigneur vint saluer ! Aujourd'hui les langues antiques de notre France, ô fleur mystique, veulent te saluer pour embaumer leur fin : mères du peuple, humbles et craintives, mais avec foi et de bon cœur, avant que de mourir, elles viennent te demander le sauvement de cette France qui tant de fois rompit sa lance pour défendre les uns ou pour aider les autres. Les populaires parleries de saint Elzéar, saint Hilaire, de saint Vincent de Paul, du pèlerin saint Roch, les pauvres vieilles défaillantes que, dédaigneux, le monde oublie, viennent te rendre grâce de t'être sur nos rocs manifestée à l'innocence, lorsque tu la ravis dans l'éclat de l'Extase, lui parlant doucement en notre langue d'oc. Louange à Toi, Mère du Verbe ! Tu abaisses ainsi les superbes, élevant les petits jusques à tes pieds blancs... Et sur les montagnes bénies que tu t'es choisies pour autels, à la pointe des Alpes, au front des Pyrénées, aussitôt prononcés tes oracles, aussitôt les miracles se montrent, et ta source aux malades moribonds rend la vie ! Arrière donc, science profane, avec ta présomption qui s'obstine à nier les pouvoirs du Maître tout-puissant ; toi qui te vantes d'êtres à point pour maîtriser la grande nature, arrière ! Au fond des cœurs une autre voix s'entend qui, surnaturelle, crie : « En bas, la science est défleurie ; en haut, au sein de Dieu, la science reste en fleurs ». Sainte Marie, éclaire-nous ! Que notre race ne s'enténèbre pas dans les ivresses, la fumée et l'orgueil de la matière ! Oui, déchire de ta splendeur la nuit obscure qu'aujourd'hui sur le monde entier le mal répand ; avec ton Fils qui saigne encore sur ton giron, éblouis, ô Mère, tous les malfaiteurs qui sèment l'ivraie. Ainsi soit-il. »
                                                              Frédéric Mistral (1830-1914)

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