Bien que dans ces images, on peut reconnaître ce qui reste d'une tranchée, cette photographie est avant tout une image de ce qui n'existe plus ; il est un enregistrement de traces lointaines semblables à la plus ancienne preuve d'archéologique, qui nous parle à travers des fragments de réalités perdues, à travers les ruines.
L'artiste cependant, ne s'autorise pas à se laisser emporter par de mystérieuses rencontres entre son regard et la scène qui est en face d'elle.
Au contraire, elle formule à priori, une pensée qui peut la guider dans son enquête.
Sa photographie est un projet ; elle est une pensée qui, à partir de la mémoire des histoires de cette guerre lointaine maintenant - histoires entendues dans la salle de classe ou dans la famille - remonte dans l'histoire.
Suivant cette idée, Paola De Pietri, a cherché et vérifié la réalité matérielle des anciens sites de la guerre sur la montagne.
Où il y a un siècle il y avait la guerre, maintenant il y a la nature, et les signes qu'elle a laissé sont mélangés dans la roche de la montagne et dans l'herbe qui recouvre tout.
Si, afin de transformer la pensée en images, Paola De Pietri réalise un travail de conceptualisation, cela ne signifie pas qu'il n'y a pas d'histoire ; mais là encore, il est un genre unique de l'histoire dans laquelle le vide et le silence dominent : un histoire dépourvue de son objet.
Nous avons beaucoup réfléchi, ces dernières années, à la fin des grands récits et à l'aplanissement de la profondeur de l'histoire dans un présent à une dimension, sur la fragmentation, l'impermanence et la discontinuité des langues, la transformation rapide des connaissances, et l'impossibilité de comprendre les principales caractéristiques de l'âge dans lequel nous vivons ou d'imaginer le passé.
Nous nous sommes demandés s'il était encore possible pour l'homme contemporain de réfléchir sur lui-même dans le grand processus de l'histoire en cherchant des traces et des significations possibles de cette histoire dans le présent.
Paola De Pietri a abordé ce problème d'une manière qui est à la fois directe et radicale - frontale, on peut dire.
Elle a choisi d'aller à plusieurs reprises et de manières programmées, avec son corps et ses pas, sur ces hauteurs où les hommes ont construit, se cachant comme leurs ancêtres préhistoriques, ont combattu, tué et sont morts.
Afin de se rapprocher d'un grand récit, elle a engagé son corps pendant plusieurs années, en explorant à fond les montagnes.
L'histoire, si elle doit être encore perçue parmi les problèmes de notre postmodernité, exige du temps et des efforts."
Roberta Valtorta
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