A quoi vous attendez-vous? ou le connaissez-vous déjà ? et cette formule
proposée par le musée de Valence ?
Trois questions auxquelles j'ai répondu par la négative, pire encore !!! par un
certain désintérêt, sur place trop occupée à suivre mon fil personnel.
Je me rattrape et à l'issue de la consultation de ses Folios,vous aurez au moins
fait connaissance avec cet artiste . Vous ne cheminez pas dans les très
nombreuses salles de ce musée en y découvrant sa "patte" mais vous aurez déjà
au moins une idée de cette formule inaugurée par le musée en 2019 en invitant
Gerda Steiner et Jörg lenzlinger.
On présente Favier comme" inclassable " mais il est si sensible à toute forme d'art
qu'introduire ses ouvres au sein du musée et des différentes périodes de l'art
semble tout à fait approprié. Alors! on se lance !!!
Ce qui tout d'abord a provoqué mon intérêt, dans la salle d'André Lhote.
Voilà pour les photos sur place
https://www.museedevalence.fr/fr/philippe-favier-all-over-1
On attaque le Folio n° 12 : Les jeux sont faits.
" J'ai un frère qui ne rêvait pas du même côté que moi. Il partait très loin et même si j'avais pu un instant imaginer l'accompagner, il partait tout seul. J'ai dû composer sans lui cette partition indéchiffrable de l'enfance et, d'évidence, je pris goût à la solitude et aux opéras ludiques qu'elle m'offrait.Il n'y aurait eu ces interludes scolaires, j'aurais joué de l'aube au crépuscule : mais impossible d'échapper aux betteraves rouges de la cantine et aux néons d'autopsie des salles de classe. on ne dit pas assez que le plus supportable dans l'année scolaire reste les derniers jours, quand le maître devient sympa comme un prof de gym et qu'il nous laisse... jouer.
Je détestais ce qui se jouait à plus de moi, à deux naissent les compromis, quant à trois, le risque qu'il y ait un "collabo" devient impressionnant . Imaginez que pour ces broutilles sans enjeu, j'abandonnais mes troupes dans un bordel monstre ! Diên Biên Phu à deux pas des toilettes !
Il me fallait toutes les vacances pour effacer ces jours interminables ; c'est dire qu'elles devenaient trop courtes pour oublier la rentrée. Revenir à l'école, c'était revenir sur terre et mon monde n'était pas de cet épiderme là. Il était de nulle part, ce qui laisse une jolie marge.
J'ai profité de mon enfance pour apprendre à jouer, rien de bien extraordinaire jusque-là. Il me semble toutefois qu'il y avait dans le sérieux avec lequel je m'appliquais à le faire, une prescience des temps à venir. le pressentiment qu'il serait indispensable de savoir jouer quand les choses sérieuses commenceraient, car elles commenceraient.
L'enfance c'est quand tous ceux qu'on aime sont vivants ...La disparition de ma grand-mère aura définitivement et profondément brisé quelque chose. Elle emportait avec elle le bon Dieu et le père Noël. J'appris brutalement qu'on pouvait mourir le jour de Noël et que le bon Dieu était infoutu d'empêcher ça.
Depuis, il me semble que dans mon atelier je joue. je ne joue pas pour jouer, non, je joue vraiment, infiniment. En jouant, je rêve que je me joue de tout et si possible un peu du reste, parce qu'ici, voyez-vous on meurt à Noël."
Philippe Favier 2020