samedi 30 mai 2020

Paul Cézanne : La maison lézardée





                                                La Maison lézardée

                                                         Entre 1892 et 0894 - Toile, 65 x 54 cm

                     'Voici une peinture romantique, ce qu'un ermite voit de la chaleur, de

la solitude, des ruines dans la nature, un lieu pour le saint Antoine de l'imagination

de Cézanne jeune homme. La disposition verticale du tableau, le sol montant,

incliné, sans perspective, créent un monde étrange : tout nous est proche, nous

sommes enfermés par l'intense ciel vide, l'horizon irrégulier, le sol abrupt et

instable, la maison en ruines. C'est un effet d'intimité et d'effort, d'agitation et de

 silence. Le thème du mur crevassé se retrouve partout dans le paysage : les

lignes noires des fissures réapparaissent dans les formes des troncs des arbres,

dans un sentier sur le sol et dans les marques sur les rochers. Le seul objet

humain,la maison, posée dans la fourche entre la terre et le rocher, repose sur un

seul point, comme les arbres agités, et répète leurs silhouettes qui se ramifient.

Les lignes de la maison, accentuées par les tuiles rouges, sont ajustées à la pente

du sol. Il y a partout une belle fermeté dans le jeu des horizonstales et des

verticales. la fenêtre noire, fortement installée dans l'hexagone du mur, n'est pas

une figure isolée : elle est relièe au sol par deux rochers massifs qui lui

ressemblent."

                  https://www.youtube.com/watch?v=FIbcZmEoenM





                                                    Portrait de Gustave Geffroy

                                                                  1895 - Toile, 116 x 89 cm

                           " Gustave Geffroy fut un des premiers critiques à reconnaître la

grandeur de Cézanne, il écrivit sur lui durant toute l'année 1895.

Ce portrait, de conception si compliquée, fut exécuté pendant une période de trois

mois dans la bibliothèque de Geoffroy. Cézanne désespérait de le finir, bien qu'il

nous semble assez complet et qu'il se révèle un triomphe de composition.

Ce n'est pas une étude révélatrice du visage, mais l'image du bibliophile, de

l'écrivain au milieu de ses objets familiers. Cézanne atténue souvent l'ndividualité

des êtres humains ; il se plait surtout avec des gens comme ses joueurs de cartes,

qui ne s'imposent pas en personne et qui sont parfaitement passifs et réservés, ou

plongés dans leurs travaux. Le portrait devient une gigantesque nature morte. Le

monde des objets absorbe et abaisse l'intensité de la personnalité de l'homme,

mais il le rehausse aussi grâce au cadre riche et multiple. Son activité refoulée se

reporte sur ses livres. Certes, la disposition de ceux-ci; d'abord en commençant

derrière lui, en saillie et en retrait, inclinée différemment d'un rayon à l'autre, puis

dans les volumes ouverts, semble plus humaine que l'homme lui-même qui nous

rappelle un long corps torturé d'un goût classique, comme "l'Esclave de de Michel-

Ange, "au Louvre, oeuvre que Cézanne admirait et dont il exécuta des dessins.

Pour faire contraste, l'homme est palqué avec sysmétrie, les bras étendus et

repliés - s'encadrant dans une pyramide immuable. La chaise et la table entre

lesquelles il se trouve emprisonné composent un autre ensemble de formes

inclinées faisant iune opposition abstraite avec le mur de livres et unies à eux par

des couleurs communes et par des correspondances de lignes surprenantes. Les

livres ouverts, posés sur la table, et les livres fermés, sur les rayons, convergeant

tous vers la tête de Geoffroy, appartiennent à une charpente commune de

directions équilibrées, bien qu'un groupe doive ses inclinaison à la pesanteur et

que l'autre les doive surtout à la perspective. Les différentes nuances d'orangé

dans le rayon et sur la table confirment le contraste des plans verticaux et

horizontaux. Nou pouvons voir le soin que Cézanne a apporté à l'étude des

différentes parties dans les touches chaudes près du sourcil, parallèles au livre

orange oblique près d'elles, séparées par des touches blanches et violettes, et

dans la tache de lumière inclinée qui marque l'épaule droite.

L'ensemble paraît à la fois intensément artificiel et intensément naturel. Nous

passons souvent de l'artifice des formes composées au désordre d'une pièce

encombrée et, de là, nous sommes vite ramenés à l'ordre imposant imaginé par

l'artiste ; le va-et-vient est constant.

 Aucune ligne n'est simplement un procédé de dessin ; elle a toujours le

frémissement de la vie dans la lumière et elle est un produit de la touche sensible

et robuste de Cézanne. Si la petite statuette féminine adoucit la sévérité des livres,

elle est aussi, par son axe et son bras plié, une contre-partie de la raideur de

l'homme ; la tulipe dans le vase vbleu est penchée comme son bras ; et sa main

droite, vivante et délicatement peinte, rappelle les livres éloignés au-dessus.


https://www.musee-orsay.fr/fr/collections/catalogue-des-oeuvres
/notice.html?no_cache=1&nnumid=1471


https://www.youtube.com/watch?v=ktu2TFvKdzs





vendredi 29 mai 2020

Paul Cézanne

 Il resterait encore à voir de nombreuses oeuvres de van Gogh, mais il est temps
 
de procéder à un changement d'artiste. Je vais avoir du mal à quitter  ce génial

coloriste pour un autre coloriste et rester encore à la même période et toujours en

Provence, Cézanne est tout trouvé.

Avec la même démarche, (le passant ne connaît de Van Gogh que "L'homme à

l'oreille coupée", "les Tournesols") trouver les oeuvres moins célèbres de Cézanne

à savoir ses "Pommes" ou les multiples "Montagne St Victoire".

Mais que faisait Cézanne dans les années 1888 quand van Gogh était à St Rémy ?

il n'était pas loin,  à Aix -en- Provence, dont il était originaire comme Zola que van

Gogh lisait  et qu'était allé faire Cézanne a à Auvers sur Oise ? rencontrer le

Docteur Gachet,  dont van Gogh avait fait le portrait.

 C'est pour l'instant le seul trait d'union que je trouve entre ces deux artistes;

 et je ne vous cache pas que j'ai pour l'instant aussi une préférence pour van

Gogh.

Je  vais chercher à retrouver des analogies dans la peinture,  peut-être  ce "Grand

Pin" où il me semble voir passer le mistral entre ses branches , ce n'est pas le

cyprès de van Gogh .... mais ! que nous en dit Schapiro ....


   

                                Entre 1892 et 1896  Toile 87 x 92 cm
Baissez le son

https://www.youtube.com/watch?v=OuYFgkyMuoM


                         "L'arbre est pris ici dans une conception poétique qui en fait

une individualité géante, s'élevant vers les cieux au-dessus des sommets de ses

voisins plus petits, tordu sur son axe et secoué de grandes forces, mais souverain

par sa hauteur et sa vaste étendue. Sa montée depuis le sol se fait par étapes

dramatiques ; par son vigoureux tronc incliné, plus puissant qu'aucun de ceux que

nous voyons ; par une zone de branches mortes dénudées se découpant sur le

fond du ciel et par la vaste couronne arquée de la cime qui traverse presque tout

le ciel. Les paysagistes de l'école romantique, Huet et Dupré, avaient peint des

arbres aussi héroïques, mais le ciel d'orage et le sol tourmenté de leurs tableaux

sont des causes extérieures évidentes de la souffrance de l'arbre.

 Dans le tableau de Cézanne, le drame réside dans l'arbre lui-même, avec ses

formes  en conflit, luttant contre le vent. Avec une simplicité remarquable, qui

passe souvent pour de la naïveté mais qui est la sagesse du grand art, il présente

l'arbre qu'il voit de la manière la plus simple, en le plaçant au centre de l'espace

qui nous fait face. Mais il sait comment utiliser les éléments environnants pour

supporter le drame. Les pentes du sol et les autres arbres sont inclinés de part et

d'autre du tronc comme s'ils avaient été séparés par le mouvement du géant du

ciel. Nous ne distinguons pas d'autres branches comme s'ils avaient été séparés

par le mouvement du géant du ciel. Nous ne distinguons pas d'autres branches

que celles de l'arbre principal, son supplice et son étendue sont un fait unique.

Le tableau est une harmonie agréable de bleus et de verts dans laquelle des

touches chaudes incidentes dans les branches et le feuillage rappellent la forte

bande ocre de la route.

Simples et parfaitement lisibles, les touches de pinceau confèrent à la toile

beaucoup de vitalité et de mouvement. En quelques lignes, elles créent par ses

directions changeantes un mouvement perpétuel dans l'espace, des courants

pleins de remous, des souffles de vent et de l'agitation, qui consistent pourtant en

quelques larges masses de couleurs.

L'attachement de Cézanne à ce grand arbre date de sa jeunesse. Dans une lettre à

Zola datée de 1858, il écrit : "... te souviens-tu du pin qui, sur le bord de l'Arc

planté, avançait sa tête chevelue sur le gouffre qui s'étendait à ses pieds? Ce pin

qui protégeait nos corps par son feuillage de l'ardeur du soleil, ah ! puissent les

dieux le préserver de l'atteinte funeste de la hache du bûcheron !..."

 Et dans un poème de 1863 :

Et l'arbre, secoué par les vents en fureur,

Agite dans les airs comme un cadavre immense

Ses rameaux dépouillés que le mistral balance...






mercredi 27 mai 2020

Van gogh : portraits

 Comme pour les ponts voici l'occasion de comparer les deux portraits d'Armand

Roulin : hormis le portrait de Patience Escalier, véritable chef-d'oeuvre où il n'a pas

tracé que des traits mais aussi figuré le caractère profond du personnage, d'une

façon générale je préfére les paysages ; vous avez sans doute aperçu au travers

des" you tube "que je vous ai proposé, quelques autres portraits comme celui de

l'Arlésienne que je trouve laide ...ou celui du facteur,   j'irai sans doute jusqu'à

celui du docteur Gachet.



                                         Portrait d'Armand Roulin.

              Entre août et novembre 4888 Arles - Huile sur toile  65 x 54 cm

(J'aime bien ce reflet d'une personnalité encore peu  sûre d'elle, un peu boudeuse,

 le suivant laissera paraître une interrogation ...)

              " Quand il se tourne vers le fils du facteur, garçon de dix-sept ans, van

Gogh change les termes de sa peinture. Pour l'adolescent - timide, le regard

détourné, les épaules tombantes, assez mal à l'aise dans ses vêtements - il choisit

une gamme de tonalités plus sombres, plus végétatives.

 Ce portrait, c'est le contraste du sujet sur le fond ; violet bleu sombre presque

noir sur le vert tamisé, et un visage de rêverie plus que de force (un âge qui ne se

connaît pas encore)  ; celui du père, c'est l'émergence puissante d'un bleu fort sur

un bleu plus clair, et l'affirmation sur ce bleu de son propre tempérament

dominateur dans la brillante chaleur des traits.

 (Bon, il faudra que je craque et vous le propose c'est sans doute ce côté dominateur qui me rebute)

 Dans ce portrait direct, libre, qui paraît si peu concerté - comme si l'artiste ne

désirait qu'une image adéquate - l'imagination se révèle dans le tracé énergique et

plein de caractère de la silhouette découpée, dans l'audacieuse simplicité qui, en

assimilant la couleur du chapeau à celle de la veste et en intégrant jusqu'à la

chevelure dans la limite sombre commune, construit une symétrie cachée,

accidentelle ; l'appariement de la tête et de la cravate entre les deux masses

sombres y ajoute une complication inattendue et de beaux accords. Les points

éclairés du noeud, chauds et surprenants, illuminent cette région admirablement

composée. La longue forme pointue, si chère à van Gogh, se retrouve dans le cou

et le petit bout de chevelure sur le front. le contour du visage a un tracé  très pur,

brisé par quelques traits et en refermant d'autres. Oeuvre remaruable de

simplicité, de subtilité et de vérité."


 au :     https://www.youtube.com/watch?v=0u0lAvUPGXA
    


                                          Portrait d'Armand Roulin

         Entre août et novembre 1888 Arles - Huile sur toile 65 x 55 cm

                            "Le second portrait d'Armand Roulin est d'un plus beau dessin,

avec des lignes douces, fluides, en harmonie avec les tons plus clairs, et l'humeur

plus ouverte du modèle. Ce dessin est parfaitement précis, mais détendu et sans

accent. les lignes de la vete jaune s'élèvent en mouvement variés - lignes bleues,

simples, montantes sur les bras et les épaules, plus vagabondes, ondulantes et en

zigzag à l'intérieur du buste. Elles convergent vers laz tête, finement tracée, avec

sa multitude de tons nuancés, sans ombres, dans une gamme étroite des

contours, dans la chevelure et les sourcils, dans le gilet et le bouton - est une

forme fascinante, symétrique dans son ensemble, irrégulière et libre dans le détail,

comme la conception de l'oeuvre entière. La liaison du visage avec le fond doux

vert clair est d'un raffinement magistral ; cette indescriptible couleur pâle de chair

contient des roses délicats, complémentaires du fond, et une varièté de verts

froids et clairs qui appartiennent à la couleur du fond. Les minuscules étincelles

jaunes des yeux et un filet de jaune sur le menton rappellent la veste jaune.

L'exécution est douce et tendre, peu appuyée, d'une finesse de matière

inhabituelle, qui fait penser par endroits à de l'aquarelle. Il s'agit là en esprit d'un

portrait de plein air, en été, dans lequel la vision franche et aimante de van Gogh,

son plaisir en présence d'un jeune individu déterminent une luminosité du coeur

plus humaine et plus révélatrice que l'ensoleillement poétique de la peinture

impressionniste.



 au : https://artsandculture.google.com/partner/museum-folkwang

            

 

mardi 26 mai 2020

Van Gogh : les Ponts

Il est intéressant de  pouvoir comparer deux ponts en Arles : l'un très 

lumineux  et plus connu le Pont Langlois que le second  plus terne,  le Pont de 

Trinquetaille, mais van Gogh nous en donne la raison :

            Lettre à Théo 

      .... Ensuite deux autres toiles de 30, le pont de Trinquetaille et un autre pont, sur la rue où passe le chemin de fer.
Cette toile-là ressemble comme coloration un peu à un Bosboum. Enfin le pont de Trinquetaille avec toutes ces marches est une toile faite par une matinée grise, les pierres, l'asphalte, les pavés sont gris, le ciel d'un bleu pâle, des figurines colorées, un malingre arbre à feuillage jaune. Donc deux toiles dans les tons gris et rompus et deux toiles très colorées.
Pardonne ces bien mauvais croquis, je suis assommé de peindre cette diligence de Tarascon et je vois que je n'ai pas la tête à dessiner. Je m'en vais dîner et ce soir t'écris encore.
Mais elle marche un peu cette décoration et je crois que cela m'élargira ma manière de voir et de faire.
Cela sera mille fois criticable, bon, mais enfin pourvu que j'arrive à y mettre de l'entrain.
Mais va pour le pays du bon Tartarin, je m'y amuse de plus en plus, et cela va nous devenir comme une nouvelle patrie. Pourtant je n'oublie pas la Hollande, juste les contrastes font que j'y pense beaucoup. Tout à l'heure je reprends cette lettre...


 

             Le Pont de Trinquetaille : octobre 1888 - Toile 73 x 92 cm


         " Cette peinture de pierre froide et de fer a été exécutée par une matinée 
 
      grise. L'activité des traits -parallèles, enchevêtrés, convergents - 

  remplace la variété de la couleur sur laquelle van Gogh appuie généralement

 la vie de son tableau. La stucture des marches et des poutrelles innombrables 

forme un réseau de lignes excitantes, provocantes,  qu'il a acceptées et dont il

a tenté de rendre le caractère de charpente et d'ossature. A la complication de

 l'architecture rigide asymétrique il a ajouté la complexité de la perspective,

  qui fait s'affronter l'échappée extrèmement oblique à travers l'arche à droite

et le zizag divergent des degrés du pont, avec sa succession vertigineuse de

lignes parallèles et convergentes, culminante dans l'emmêlement des

poutrelles.

 Très différent de son contemporain Seurat, qu'il admirait et qu'il imitait, van

 Gogh  ne voyait pas dans la construction mécanique de son temps une forme

 belle et rationnelle,  satifaisant l'artiste dans sa recherche de stabilité et

d'ordre parfait ; mais il en extrayait l'aspect le plus chargé et le plus mobile

comme un dédale équilibré pour l'oeil. Aux directions définies et à l'uniformité

 des parties rectilignes il opposait l'exécution turbulente du ciel pâle et de la

 route, tachetés d'empâtements épais. La rigidité des formes  géométriques est

adoucie par le dessin à main levée et par des notes dispersées de nature et de

vie humaine. Un trait surprenant pour l'oeil, et révélateur de l'intention

marquée de l'artiste, est le dessin de la femme située dans le prolongement

exact du bec de gaz - procédé qui contribue à unir les portions proches et

lointaines de l'espace en une structure cohésive. Cette longue verticale fait

partie d'une série d'autres verticales, comprenant les arbres, qui transforment

les constructions du paysage en construction du tableau."


                   Le Pont Langlois. Mai 1888  Arles - Huile sur toile 49 x 65 cm


      " Délicate vision poétique qui suggère l'art d'Extrème- Orient : dominante

 du ciel et de l'eau, rareté des détails, peu de tension et recoupements de

 formes, introduction à une paisible rêverie. Un lointain nuage est l'objet le plus 

tangible. Bande transversale le long de l'horizon, une file de notes variées,

d'une qualité immatérielle, offre à l'oeil autant d'enchantements : maison 

bleues comme le ciel, cyprès élancés d'un trait délicat, un délicieux cheval en 

miniature, avec sa charrette et son conducteur, le pont-levis, svelte et léger 

comme une toile d'araignée, et, à l'extrème droite, les maisosns bleu clair,

 avec des toits à rayures rouges pénétrés de lumière. Quelle surprise que le

mur intérieur du pont de pierre, transparent comme l'eau qui coule au-dessous, 

lui-même pont entre l'eau et le ciel !". 

                        https://www.youtube.com/watch?v=JMNSWUchRqI

lundi 25 mai 2020

Van Gogh : Les Paveurs. Escaler à Auvers

                      Les Paveurs, Boulevard Victor Hugo à Saint Rémy

                 Décembre 1889, Saint Rémy Huile sur toile 74 x 93 cm






                  " Transposition  bouleversante de la scène de rue familière à 

l'Impressionnisme - Manet, déjà avait peint les paveurs au travail. Ici, au milieu 

de la rue éventrée par une excavation, la nature s'afirme derechef avec une 

énergie impétueuse et triomphante dans les troncs géants, les branches et les 

masses fougueuses de feuillage, transformant cette promenade intime en un 

monde apocalyptique, ni naturel ni urbain. Dans cet espace étroit où

 les branches de monstrueux platanes s'élèvent frénétiquement comme des 

racines renversées vers la zone supérieure de flammes, les autres éléments 

-maisons, routes, personnages  en marche ou au travail - gardent leur

 médiocrité quotidienne ; toutefois si on les isole en vues fragmentaires 

découpées entre les voûtes des arbres, ils prennent un aspect étrange et

 particulièrement irrégulier. ici comme dans d'autres oeuvres de cette époque, 

la perspective est source d'inspiration et se marie à la structure instable des 

objets. La diagonale aigue de la rue (qui est la diagonale même du regard du 

spectateur) , où contrastent  les lumières froides et les ombres chaudes ainsi

 que des tas de sable houleux et désordonnés et des pierres régulièrement 

taillées, est riche aussi de zigzags abrupts. Ce grand courant diagonal en

 prodondeur contrebalance et soutien la turbulence des branches au-dessus  et 

les arches pointues et tourmentées des arbres qui encadrent les aperçus 

obliques  sur les maisons de l'autre côté de la rue.

 Sans surfaces étendues de couleur simple, sans foyer visible ni points de 

repos l'équilibre de cette peinture semble un miracle. C'est au premier regard

un chaos, un orage, non seulement dans les lignes mais dans le mouchetage 

compliqué des couleurs que van Gogh recherche et multiplie sur l'arbre le plus

 proche,  dont l'énorme tronc est tissé de méandres de couleurs contrastées et

 marbrées. Et même lorsqu'on a discerné une harmonie grave dans la gradation

 serrée des couleurs locales propres aux objets - des tons chauds de la

chaussée,  de la rue des maisons avec les volets verts, et du vert feuillage, aux 

tons plus gris et plus rompus du reste- on est invinciblement ramené à la

 violence et à la véhémence de l'ensemble. l'opposition des jaunes ardents du

lointain avec les tons froids et neutralisés des arbres et du premier plan donne 

 à la toile entière une saveur originale ".


                      https://www.youtube.com/watch?v=2r40saZCRXI






      Mon cher Théo et Jo 

    Dans l'autre lettre j'ai d'abord oublié de te donner l'adresse d'ici, qui est provisoirement place de la Mairie chez Ravoux, puis lorsque je t'ai écrit je n'avais encore rien fait. A présent j'ai une étude de vieux toits de chaume avec sur l'avant-plan un champ de pois en fleurs et du blé, fond de colline, une étude que je crois tu aimeras.
Et je m'aperçois déjà que cela m'a fait du bien d'aller dans le Midi pour mieux voir le Nord . C'est comme je le supposais, je vois des violets davantage où ils sont. Auvers est décidément fort beau. Tellement que je crois que ce sera plus avantageux de travailler que de ne pas travailler, malgré toutes les mauvaises chances qui sont à prévoir dans les tableaux....



                                                                    Escalier à Auvers

                                Juin 1890 Huile sur toile 51 x  71 cm 

                   " Par sa large symétrie, ses répétitions, ses arabesques rythmées,

 sa structure ondoyante et enrubannée, c'est là un des tableaux de van Gogh  

les plus proches de l'ornementation et du goût décoratif populaire 1900, appelé 

art nouveau. Il annonce aussi cet art par son absence de relief, sa matière 

réduite et sa légéreté générale de couleur. Par rapport aux autres toiles de van 

Gogh, celle-ci a une qualité nuancée en raison de l'apport de blanc et de tons

 dilués de jaune, de vert et de bleu. Constituée de convergences et de 

rencontres multiples, axée autour d'un foyer central au pied des escaliers, cette

 scène n'a pas de dominante réelle : l'effet d'ensemble est commandé par le 

mouvement trépidant de diagonales instables imposé à des objets de caractère

 dissemblable. La répétition de ce thème incessant est si spontanée cependant

 et contient tant de variations intéressantes que la peinture perd bientôt cet 

aspect ornemental et devient une oeuvre de passion intense et de vision

 concentrée. On découvre dans les maisons des lignes droites en contraste, 

horizontales et verticales stabilisantes, les toits rouges importants et de

 nombreuses touches comme les chapeaux jaunes, l'encadrement jaune de la

 porte et les fenêtres sombres ( qui rappellent les jupes des femmes) - opposées

 délibérément à l'instabilité générale,  mais non complétement toutefois dans

 leur propre mouchetage. Les formes onduleuses ont aussi leur caractère 

individuel. Entre la maison et les escaliers, elles définissent une longue forme

 sinueuse, triangulaire, qui s'apparente au cyprès et à la route dans une oeuvre 

antérieure d'une qualité extatique, visionnaire (revoir "la route aux cyprès).

 Ici, comme en  certaines peintures plus anciennes, van Gogh pratique cet

 échange de tons entre des parties très éloignées de l'espace (et entre des 

objets voisins sur des plans différents ) qui est de ses plus puissants moyens 

d'unification. Les mêmes tons blancs avec des notes de bleu et de vert 

apparaissent dans la maison éloignée, les robes des deux fillettes au premier 

plan, sur la route et le mur qu'elles réunissent. Dans toute cette agitation de 

lignes et de taches il y a aussi une note de gaieté allègre et de ravisement".


                       https://www.youtube.com/watch?v=F3wjscNoMwQ
 

vendredi 22 mai 2020

Les Couleurs d'Isarde

 Van Gogh aurait été heureux dans mon jardin, petit intermède ce matin , le

temps de choisir encore de ses toiles, les moins connues de préférence et de

vous ouvrir les portes de mon jardin.

 C'est un bonheur d'y retrouver les couleurs  que  cet artiste  savait si bien

reproduire et mélanger.

             sans texte, baladez-vous....


         la Pullman Orient express



          Azalées




      Clématite









mais oui, c'est vrai, j'aime sortir les roses de leurs feuillages  et les faire partir 

à la conquête du ciel, plusieurs sont des rosiers lianes et  s'y élancent tous seuls



     plus terre à terre les orchidées sauvages de la pelouse qui se sont bien 

           multipliées


             comme les petits oeillets



           le rosier Constance Spry

























 et quelques vues


 d'ensemble avec une


 touche d'exotisme








              la rivière qui passe régulièrement par dessus-bord,

                                                      plus ou moins  méchamment.  

                                                                             

        l'Afrique

 et  l'Asie,

                 un condensé en quelques mêtres...


et... regardez-y de plus près, j'ai des visiteurs qui ne me craignent pas ...




jeudi 21 mai 2020

Pietà ( d'après Delacroix) Van Gogh

 où l'on voit que van Gogh est un lecteur assidu et un admirateur de Delacroix 

ou de Millet.


Lettre à Théo.  octobre 1889

     .... Le Delacroix est une Pietà c.à.d.un Christ mort avec la Mater Dolorosa. A l'entrée d'une grotte  gît incliné, les mains en avant sur le côté gauche, le cadavre épuisé et la femme se tient derrière. C'est une soirée après l'orage et cette figure désolée vêtue de bleu se détache- ses vêtements flottants agités par le vent - contre un ciel où flottent  des nuages violets bordés d'or.
Elle aussi par un grand geste désespéré, étend les bras vides en avant et on voit ses mains, des bonnes mains solides d'ouvrière. Avec ses vêtements flottants cette figure est presque aussi large d'envergure que haute. Et le visage du mort étant dans l'ombre, la tête pâle de la femme se détache en clair contre un nuage - opposition qui fait que ces deux têtes paraîtraient une fleur sombre avec une fleur pâle arrangées exprès pour se faire valoir. Je ne savais pas ce qu'était devenu ce tableau  mais précisément pendant que j'étais en train d'y travailler je tombe sur un article de Pierre Loti, l'auteur de Mon frère Yves et de Pêcheur d'islande et de Madame Chtysanthème...


               Septembre 1889 Saint Rémy Huile sur toile 73 x 60,5


               " Pendant sa convalescence à St Rémy, Vincent est souvent l'objet de

 préoccupations religieuses,  C'est alors  qu'il exécute un certain nombre de 

thèmes bibliques. Avec une sincérité qui le caractérise, il ne concevait pas 

d'imagination ses figures religieuses - car il n'était plus croyant, bien qu'il 

admirat le Christ comme l'exemple suprême du don de soi et de l'amour. Il 

copiait et transposait en couleurs ses tableaux religieux d'après des 

reproductions ou des gravures de maîtres plus anciens, Delacroix et 

Rembrandt. 

Dans le choix des sujets son mobile est évident : le Christ mort dans les bras 

de la Vierge, la Résurrection de Lazare, le Bon Samaritain - tous représenternt

 une souffrance et annoncent un salut à venir.

En copiant la composition et les figures étudiées de Delacroix, van Gogh traduit

 les lignes et les couleurs dans son propre langage, plus maladroitement

 pathétique et plus vibrant.,  cassant les silhouettes, multipliant les coups de

 pinceau visibles et accentuant l'étendue des jaunes et des bleus ; l'ombre des

 vêtements de la Vierge est d'un bleu sombre et absolu, comme ses ciels les 

plus visionnaires et les plus tempêtueux. Le linceul du Christ est, par contraste, 

d'un jaune blanchâtre hardiment recouvert d'ombres bleues. La même

 opposition dramatique de jaune et de bleu divise le ciel en deux grandes 

zones. Le rose et le vert dans la chair du Christ sont répétées de façon 

correspondante dans les rochers à droite. La tête du Christ, avec une barbe

 rougeoyante et des ombres vertes, rappelle les auto-portraits de van Gogh,

 mais par sa seule couleur, car les traits sont différents. dans le mouvement

 plus déchiqueté et plus intense de l'ensemble, dans le contraste des formes

cassées et sinueuses et dans la houle des lignes qui se rencontrent en pointe 

allongée comme une feuille - par exemple l'épaule gauche du Christ et le sol 

- on reconnaît la transformation  par van Gogh des courbes souples de 

Delacroix. Mais cette copie permet aussi de voir la parenté de l'oeuvre de Saint

 Rémy avec l'art romantique et baroque."


https://books.google.fr/books?id=HZ9pmSIO0FQC&pg=PA151&lpg=PA151&dq=toiles+religieuses+van+Gogh+Amsterdam&source=bl&ots=C8nj1-q_J8&sig=ACfU3U3LtkYAvb-IAZ5KEXdLrL2XRDH3Jg&hl=fr&sa=X&ved=2ahUKEwik0JP33cTpAhVCyhoKHWSlCVMQ6AEwBHoECAwQAQ#v=onepage&q=toiles%20religieuses%20van%20Gogh%20Amsterdam&f=false