Johann Walter. Gustave-Adolphe, Roi de Suède à la Bataille de Breitenfelf (1632)
conservé à Strasbourg au Musée Historique
Walter n'est en effet pas connu comme peintre, mai aussi chroniqueur. Il a laissé
une chronique relatant l'histoire de sa ville natale, des origines à son temps, dont
la bibliothèque de Strasbourg possède deux manuscrits. Cette chronique nous
montre un homme honnête, d'une innocence candide, qui "copiait" aveuglément
les autres historiens, commençant son récit par le Déluge et attribuant la
fondation de Strasbourg aux Assyriens, très précisément à Trébéta, beau-fils de la
reine Sémiramis en l'an 2683, avec trois-cent cinquante ans d'antériorité par
rpport à Rome!
C'est un peu la loi de ce genre de chronique : les temps les plus proches du
narrateur sont seuls utiles et même précieux pour le XVII ème siècle.
Il apparaît comme un homme sincère, de bon sens, bien informé. Sa chronique est
intéressante pour la guerre de Trente Ans mais pour la lente décadence de sa ville
natale (1649-1676) et la montée du pouvor absolu de Louis XIV. Son témoignage
est précieux du point de vue économique, politique et religieux. Mais ce brave
bourgeois, protestant zélé, est aussi crédule (il croit aux 'Poltergeyst, esprits
frappeurs et autres phénomènes) que cancanier. Il rapporte avec les mêmes
frissons les faits d'armes de son pays et les exécutions de femme convaincues
d'adultère. Il fustige le dévergondage des moeurs, et relate avec une feinte
épouvante dissimulant mal une certaine satisfaction, le châtiments des coureuses
de foire.
Sa vie ne dut pas être de tout repos, car on le voit parcourir des contrées
dangereuses : ainsi raconte-t-il revenir d'Ilstein alors que les armées impériales
font diversion au roi de France aux environs de Francfort et comment il passe le 7
octobre 1672 avec cinq compagnons en voyage au milieu de deux armées ;
quelques jours plus tard on le voit assurer le tour de garde avec sa compagnie
alors qu'il est presque septuagénaire. Sa haine des Français éclate partout,
pourtant il truffe son texte d'expressions françaises.
Walter dont le style est si serein et si pur, qui est attaché à peindre les merveilles
de la nature a donc vécu dans une période les plus terribles de l'histoire
européenne. Pendant la guerre de Trente Ans (1618-1648) l'Alsace servit de
champ de bataille. Les armées impériales suédoises, françaises la parcoururent
en tous sens. Massacres et famines décimèrent les populations, et ce fut une
Alsace misérable que le traité de Westphalie céda finalement à la France.
...........................................................................................................
C'est surtout pour ses peintures sur vélin que Walter est passé à la postérité. Son
oeuvre la plus célèbre est" l'Ornithographia" que conserve aujourd'hui l'Albertina
de Vienne. C'est un sublime recueil d'une centaine de dessins aquarellés d'oiseaux
de toutes sortes dont beaucoup d'exotiques. Le margrave de Bade-Durlach lui
envoya des spécimens rares, sachant qu'il les recherchait.
Outre du Florilège c'est d'un autre volume que peut s'enorgueillir le
Département des Estampes de la Bibliothèque nationale, un sublime recueil
attribué de nos jours à Georges Hoefnagel, attribution flatteuse s'il en est mais
erronée, bien qu'elle ait été toujours considérée comme intangible, en raison
d'une mention manuscrite sur la page de titre. Ce volume relié par Derôme le
Jeune, comporte quarante et une planches de la main de Walter. Le Cabinet des
Estampes de Strasbourg possède de son côté vingt planches qui pourraient bien
avoir initialement appartenu au même recueil. Au début du XVIII ème siècle,
Claude Aubriet, peintre attaché au jardin du roi, possédait en effet une
Ornithologie due au pinceau de Johann Walter.
'Picus maximus niger, vulgo "Ein Trâbe Pfecht" 17 octobre 1646
grand pic noir.
Les légendes sont en latin et en allemand. La valeur scientifique est très grande,
car Walter peignait avec une exactitude scrupuleuse. Il a en outre noté les
passages d'oiseaux en Alsace. L'album comporte des indications biographiques.
C'est ainsi que sur la légende d'un oiseau, il explique avoir vu l'animal à Chantilly
: pour tel autre il précise que ce spécimen lui a été envoyé par le margrave de
Bade-Durlach.
"Pica Marina" (Planche 19)