samedi 13 février 2016

Quand les Pyrénées perdent pied

 Quand les Pyrénées, à l'ouest, perdent pied dans l'Océan, les Labourdins, les Basques se tournent vers la mer et savent en retirer les bénéfices.
Bayonne, St Jean de Luz, Capbreton...
 Dans "Us et coustumes de la mer" vous pouvez lire:

 "les Basques de Biarris, Gatiari, Sainct Jean de Luz, Ciboure, les pescheurs de Capbreton du Pech ou Boucau Vielh, et autre pescheurs de Guyenne, lesquels vont hardiment et par grande adresse harponner et blesser à mort les baleines en pleine mer"



 Etonnant ? non? et pourtant ce ne sont plus les pêcheurs de baleine qui se jettent dans leurs embarcations au premier signal du "souffle" de la baleine, mais les surfeurs qui guettent le pipe.
C'est même jusque dans les eaux de Terre-neuve qu'ils allaient pêcher la morue.
Deux siècles de "bonne fortune" XVI ème et XVII ème puis peu à peu du plus gros au plus petit, les Pyrénéens n'eurent plus à pêcher que la sardine......
Si l'on peut dire  !  car nous allons toujours sur le port de Capbreton à l'arrivée des chaluts; les étals juste au-dessus des bateaux sur le quai proposent,  colins, thons et bonites, chipirons, soles, baudroies,  maquereaux etc.

Un épisode ne devait pas manquer de sel.....; les cascarotes, vendeuses de poisson réputées, d'origine bohémienne calaient leurs paniers sur la tête et partaient en courant vers Bayonne:

" Dés que les chaloupes sont à cent mètres du rivage, raconte Lomet en 1788
 elles se mettent toutes nues, dansent et folâtrent puis se jettent ensemble à la nage, à la rencontre des bateaux.
Celle qui arrive la première s'assied sur le banc et fait le prix avec le patron pour toute la pêche du jour.
Dès que le prix est fait, le bateau  aborde et le prix est payé.
Les femmes se distribuent le poisson, s'habillent et font la course pour aller le vendre"
Lorsque la raréfaction du poisson, ( déjà ) se fait sentir ces hommes ne manquent pas de ressources, ils arment et convertissent leurs navires en corsaires (autre forme de banditisme sur mer cette fois) ...

                                         Le port de Bayonne Joseph Vernet 1760
 
Dès le Moyen Age, les ports basques étaient catalogués comme des nids de pirates, avec la bénédiction du pouvoir royal qui couvrait de son autorité tout arraisonnement de navire de commerce ennemi.
Soulet nous dit que les prises furent innombrables, tant pendant les guerres du règne de Louis XIV que durant celle de Sept ans et de l'Indépendance américaine.
Des noms basques ou gascons brillent au firmament des corsaires, à côté des Jean Bart, des Dugay-Trouin ou des Forbin.
Harismendy, Saint-Martin, Dolabaratz courent sus aux navires ennemis jusqu"au Groënland.
Johannes de Suhigaraychipi trouve la mort près de Terre-Neuve.
Duconte de St Jean de Luz, ramène onze prises en une seule sortie.
Jean Peritz de Haranader, autre Luzien qui servit de modèle à André Lichtenberger pour son Gorri le forban aurait amassé une fortune de 2.000000, de livres.
Même si l'essentiel des prises était monopolisé par les armateurs et les capitaines, il parait indubitable que la course et la pêche hauturière, qui, à l'époque de Louis XIV, intéressèrent peut-être la moitié de la population du Labourd, sauvèrent de la misère des milliers de Pyrénéens et empêchèrent ou retardèrent leur exode.
 Que revoyait, ou voyait Maurice Ravel, natif de Ciboure, lorsqu'il composa ce Concerto en sol majeur ?

https://www.youtube.com/watch?v=Ro7ApxqouJ0

 http://o-s-b.fr/IMG/pdf/Ravel_-_Concerto_pour_piano_no3.pdf

https://www.youtube.com/watch?v=LrVIEYPHfw4

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k959800.r=Les+us+et+coutumes+de+la+mer.langFR

vendredi 12 février 2016

échanges trans-frontaliers

Je suis très hésitante ce matin sur la teneur de mon article.....poursuivre les investigations sur ces coutumes ou bien passer à autre chose ?

 Les transgressions ayant toujours un petit côté attractif, pourquoi ne pas vous parler de cette contrebande trans-pyrénéenne, dont "j'ai eu vent" dans ma jeunesse, en Andorre.
On n'y montait pas sans jauger les dénivelés que l'on savait franchis de nuit par les contrebandiers.
Soulet nous dit  que jusqu'au XIX ème la population fermait les yeux sur ces trafics et ne dénonçait jamais ces passeurs.
Lesquels passeurs du XX ème siècle ont mis à profit leur connaissance du terrain pour permettre les évasions  de tous les individus fuyant la France de la guerre 39-45 et souvent au péril de leur vie.
Ce sont les fameux "Chemins de liberté" que j'ai déjà évoqué dans des articles précédents.
 Vincent Chausenque en 1810 raconte qu'il a été témoin du passage nocturne de l'un de ces convois : cet épisode se situe dans la  haute vallée d'Aspe.

"Vers le haut de la vallée, un large cordon de feux, souvent cachés dans les bois ou par les plis du terrain, descendait en serpentant.
Bientôt toute la caravane se déploya sur la route et vint défiler ...
En tête marchait un groupe d'hommes armés de carabines, et à leur suite les conducteurs de mulets, portant des torches, et en menant chacun six ou sept à la file. Un autre peloton faisait l'arrière-garde.
Nous comptâmes plus de trente torches, environ deux cents mulets, et une cinquantaine d'hommes d'escorte.
Une contre-bande ainsi armée se faisait respecter".

 http://www.pyrenees-passion.info/vincent_chausenque.php

Endurance, souplesse, robustesse permettaient à ces montagnards de passer, armés de leur long coutelas à la ceinture, des charges de soixante livres sur le dos, appuyés sur leur gourdin de néflier, sur des distances qui les faisaient marcher toute la nuit.

                                             le Contrebandier.
                                                                     A. Pingret
D'autes franchissaient aussi les Pyrénées pour des travaux saisonniers et cet exil donnaient à tous ces montagnards jusqu'au Piémont la possibilité de subvenir aux besoins de leur famille; ils se louaient pour les moissons, les vendanges et en hiver pour le pressage des olives dans les provinces frontalières mais jusqu'à la plus lointaine Andalousie.
Ceci à grande échelle puisque le canton d'Aspet, dans une enquête de 1804, perdait mille cinq cents habitants, les vallées d'Ourle et du Louron trois mille personnes.
Louis de Froidour écrit:
"Ils vont travailler en Espagne à la culture des terres, des jardins et des vergers ; ils y fauchent les prez, font les récoltes des bleds, des vins et des huiles ; surtout ils sont excellens ouvriers pour bûcher et remuer la terre et ils s'y occupent aussi à faire ou à réparer les fossez que l'on fait ordinairement pour la clôture des terres.

                                                           La forge. Francisco Goya

Du pays de Foix partait vers novembre et jusqu'en mai, un nombre élevé de bûcherons, de charbonniers et de forgeurs. Le Pays Basque, à cette époque, fournissait d'excellents tuiliers, briquetiers et tanneurs ; le Comminges, des chaudronniers qui allaient jusqu'à Madrid ; le Saint-Gaudinois des raccommodeurs d'ustensiles, des affûteurs et le Rémouleur


                                                      Le Rémouleur Francisco Goya

 Plus tard, le courant s'inversa, ce sont les saisonniers espagnols qui traversèrent les Pyrénées pour venir travailler en France.

jeudi 11 février 2016

Western Pyrénéen



Il serait fallacieux de vous laisser imaginer que les Pyrénées n'étaient qu'un vaste lieu d'échanges paisibles; si cela vous intéresse je pourrais vous parler des "miquelets", "bandouliers" puis contrebandiers ?
  Ce ne sont pas des attaques de diligences qui ne pouvaient emprunter des routes qui n'existaient pas mais des attaques de villages ou de voyageurs, à pied ou à cheval,  muletiers aussi,  tout ce qui transitait au travers de ces montagnes.

                                      Attaque de voleurs. Francisco Goya

 Ces brigands ou bandits de grand chemin se transformaient quelque fois en contrebandiers mais ils étaient alors considérés avec plus d'indulgence, la contrebande devenait un métier .....
 Plusieurs chefs de bande s'illustrèrent, en majorité espagnols.

 

..................."Parmi les multiples personnages qui, hiver comme été, hantaient routes et sentiers, le brigand occupe une place de choix.
S'il attendit le XIX ème siècle pour devenir un héros de la grande et petite littérature pyrénéenne, il fut l'un des familiers de la montagne dés l'époque moderne.
Il fut le seul, en effet, à profiter du climat d'insécurité qu'engendrèrent les troubles religieux et les différends franco-espagnols, deux siècles durant.
Déjà "la passerie" d'Arrens dénonçait ces "vagabonds, coureurs de grands chemins et autres malfaiteurs" qui volaient les troupeaux, détroussaient les marchands, incendiaient, assassinaient, bref, semaient l'épouvante dans les vallées.
Le nom par lequel on les désignait alors, "les miquelets", emprunté à leur redoutable chef Miquelot de Prats, devint très vite synonyme de terreur.
 (On appelle aussi miquelets,des miliciens, des mercenaires ou des soldats auxiliaires d'origine cévenole ou catalane).
Forts de la curieuse protection de Saint Michel, qui, disait-on assurait leur invulnérabilité, parfaitement au fait des méthodes de la guérilla, ils attaquaient en petites bandes et par surprise.
Ramassis d'irréguliers de toutes sortes, de déserteurs et de désoeuvrés, d'origine en grande partie espagnole, ila avaient leur base sur le versant sud, dans les vallées isolées de l'Aragon.
Revêtus d'une veste rouge et d'une culotte, chaussés d'espadrilles, bardés d'épées et de dagues, de mousquetons et de trois ou quatre pistolets, ils visitèrent, une fois ou l'autre, à peu près toutes les communautés des vallées et du piémont..
Dans l'espace de quatre ans entre 1708 et 1711, on relève leurs méfaits (vols, incendies,et meurtres dans les vallées de Luchon, de Barèges, d'Aure, d'Aspe et d'Ossau.
C'est dire combien leur champ d'activités était vaste.
Redoutable et insaisissable, le miquelet devait fixer toute l'hostilité que les Pyrénéens français n'avaient pas manqué d'accumuler, en raison de leur vie commune, à l'encontre des Espagnols.
Ainsi, éclipsa-t-il presque totalement l'autre figure du banditisme pyrénéen de cette époque que fut le "bandolier".
Voici en quels termes nuancés ce dernier nous est dépeint par le géographe Pierre Davity vers 1665:
"Les habitants de Foix sont adonnés au travail, supportent toutes sorte d'incommodités.
Ils sont aussi remplis de courage.
Mais il y a un mal en ce pays qui est que plusieurs ne pouvant vivre au plus mauvais pays, s'adonnent à demander la gracieuseté avec un poictrinal (pistolet) en bandolier.
Toutefois ils ont un bon naturel pour la plupart, que si vous les contentez volontairement, ils ne vous font nul mal et mesmes quelquefois les premiers que vous rencontrez vous mettent ou font mettre hors de tous dangers et de tous mauvais passages.
Quelquefois aussi, ces bandoliers vous laissent en blanc (dévalisé) ainsi que vous passez d'Espagne en France ou de France en Espagne"




Dans le premier quart du XVIII ème siècle, presque tous les habitants du Bosc "tenaient" la haute vallée de la Barguillère et faisaient preuve d'une étonnante  solidarité.
( Lorsque nous allons passer par là prochainement avec Frisco, nous apprécierons la sécurité que nous y rencontrons ).

Si l'un d'entre eux était arrêté, les autres s'attroupaient et le délivraient.
Certains seigneurs ne dédaignaient pas ce genre d'activité et le château d'Urs (Les Cabannes) demeura longtemps le principal repaire des "bandoliers" de la région axoise.
Le terrain de prédilection de ces bandes était constitué par les zones les plus isolées.
Les vastes landes du plateau de Lannemezan n'étaient pas seulement le lieu de rendez-vous des sorciers de Gascogne, venus, selon la tradition, participer à d'extraordinaires sabbats.
Elles servaient aussi d'asile à des troupes de" gens sans aveu", aussi bien organisées qu'audacieuses.
Ne fallut-il pas en 1708, faire appel à trois régiments pour venir à bout de la bande de malfaiteurs commandée par le célèbre Loubayssin ?  ( voir le lien, book, plus bas,  chapitre, Dissidence et révolte dans une région frontière).
Pareille notoriété donna même l'idée à Daniel Defoe de situer le retour de Robinson Crusoé dans cette région où, parmi les voyageurs, les animaux les plus sauvages demeuraient, selon lui, les "bêtes à deux jambes" .
Malheur aussi au voyageur qui s'aventurait seul sur la route de Tarascon à Quillan (je peux vous dire que lorsque nous rentrons seules avec une de mes filles par cette route quand nous rentrons d'Andorre à la nuit tombée il n'y a pas "âme qui vive ou voiture qui roule" mais pas de bandit à l'horizon)
 ou sur celle d'Ax au Puymorens ! il risquait fort, au passage du col de Marmare ou du territoire de Mérens, d'y laisser sa bourse, si ce n'est sa vie même."




                                                                  photos isarde
https://books.google.fr/books?id=0iNXpKxdtFUC&pg=PA62&lpg=PA62&dq=bandit+Loubayssin&source=bl&ots=lPlxwyS-KU&sig=Tu_0379MESvejnLd8UXVHkpJlVY&hl=fr&sa=X&ved=0ahUKEwiZmqHsnO_KAhUCtRoKHZc3CHYQ6AEIIzAA#v=onepage&q=bandit%20Loubayssin&f=false


http://donquijotedelamancha.free.fr/Bandolerismo.pdf

                                                Asalto de coche. Francisco Goya

mercredi 10 février 2016

Promenade

Il faisait encore beau en fin de semaine dernière, occasion à ne pas manquer  de se lancer sur les chemins.
 Ma  démarche  est inverse ce matin, habituellement, je cherche à illustrer mes propos, aujourd'ui, ce sont mes photos que je veux habiller.
La température était anormalement élevée, une brise légère secouait à peine les châtons de noisetiers.


Aucun bruit non plus, hormis le beuglement d'un troupeau, en contre-bas qui répandait une forte odeur;
pratiquement chaque vache allaitait son veau; alertées par ma présence insistante, elles me fixaient pour évaluer un danger potentiel.
Ce sont de jeunes agriculteurs qui sont les propriétaires de ces animaux, ils ont planté leurs pénates dans l'Aude voisine mais ont conservé ces terrains..
Cela m'a remis en mémoire leurs difficultés actuelles et donné envie de rouvrir le livre  encore à mes côtés de Jean --François Soulet. C'était  l'Age d'Or  des "passeries" Pyrénéennes, quand les accords transfrontaliers abolissaient les frontières pour donner libre cours aux pacages.
Je vous ai déjà fait part de ces coutumes dans un article de l'an passé sans doute sur la Pierre St Martin et la vallée de Roncal, où ces accords sont encore fêtés.
 L'ethnologue autodidacte se double d'une géologue plus autodidacte encore !!, quand on est passionné par toutes ces matières................
Et pourquoi se tourner vers le passé ? le présent est incertain, pour beaucoup, et l'avenir très flou !!!.... alors ! revivons des périodes plus fastes .

...................Entre les Royaumes de France et d'Espagne

Un 22 juillet, au matin. Deux groupes d'hommes se font face sur la pelouse inondée de soleil de la "prade St Jean" au pied du Cirque de Gavarnie.
Parmi eux on reconnait sans peine, avec leurs vastes sombreros,  leurs foulards et leurs vestes de velours, plusieurs Aragonais. Partis de nuit de la vallée de Broto, ils ont, chaussés de leurs seules "abarcas" marché des heures durant, grimpant jusqu'au col des Pierres-de-Saint Martin (aujourd'hui, Boucharo) , pour dévaler ensuite vers le vallon du Pouey-Aspé et y atteindre Gavarnie.
Les voilà face aux, "Toys" , autrement dit aux délégués de la ville de Barèges.
Que cache cette rencontre  quelque peu insolite dans ce cadre austère et grandiose : un combat singulier ? un conciliabule ? 


Pas le moins du monde.
Il s'agit seulement d'une de ces assemblées qui, périodiquement, d'un bout à l'autre de la chaîne, rassemblent les représentants des montagnards  des deux versants.
Comme ceux de Broto et de Barèges, ils conviennent solennellement "de souffrir que leur bétailh ailhe depaistre réciproquement les uns chez les autres", confirment la paix qu'ils souhaitent voir régner entre eux et jugent souverainement toutes les questions intervenues depuis leur dernière réunion.
Sous l'Ancien Régime, le fédération, c'est-à-dire l'association entre deux vallées situées respectivement sur les versants français et espagnol, représente, après la communauté villageoise et la communauté de vallée, la troisième et ultime entité dans laquelle vit le Pyrénéen.
Dans l'organisation et la destination de ces trois aires de vie, aucune différence fondamentale. La fédération, nous le constaterons, obéit aux mêmes principes libéraux que la communauté et la vallée : délégation par vote, délibérations, justice directe et immédiate.
Elle répond aux mêmes besoins fondamentaux d'un peuple pasteur : assurer la survie économique du groupe par la mise en commun de certains biens indispensables.
Son originalité par rapport aux autres cadres tient essentiellement à son caractère international.
A cet égard, la fédération constitue un véritable défi aux structures politiques  de l'époque.
En plein XVII ème encore, le Pyrénéen ignore ou feint d'ignorer la politique des gouvernements de Paris et de Madrid .
Il refuse leurs lois lorsqu'elles sont contraires à ses coutumes.
Il ne fait pas siennes leurs intrigues et leurs guerres.
Il rejette totalement leurs frontières.
En réalité, profitant du caractère excentrique et difficilement pénétrable de la chaîne, il a choisi de vivre en marge des deux Etats et tenté de bâtir son propre royaume.


Mais, dira-t-on aujourd'hui, la géographie et l'histoire ne rangeaient-elles pas d'emblée un tel projet au rayon des chimères ?
 Rien n'est moins sûr.
La montagne, loin de représenter la barrière physique et humaine qu'elle est devenue de nos jours, formait au contraire un terrain de rencontre naturel entre les pasteurs des deux versants.
Il faut d'autre part, se souvenir que pendant des siècles, comtes et souverains régnèrent sur des Etats qui englobaient les deux versants.
Ce ne fut paradoxalement qu'à partir du moment où l'on déclara "Il n'y a plus de Pyrénées" que celles-ci se dressèrent comme barrière pour séparer des peuples profondément unis jusqu'alors.
En fait, bien avent le fameux traité  de 1659, de premières menaces tendirent à rompre la longue habitude de vie commune des Pyrénéens des deux versants, mais n'eurent pour effet final que de resserer leurs liens.
Le traité de Corbeil (1258) qui, pour la première fois, fit des Pyrénées la limite entre les deux royaumes de France et d'Aragon  eût pu sonner le glas des relations privilégiées qui unissaient les deux peuples.
Crainte d'autant plus justifiée que la nouvelle frontière politique ne tarda pas à se doubler d'une frontière économique ; à la suite des difficultés financières  des monarchies, apparurent alors les premières "traites" ou douanes, à l'entrée et à la sortie des marchandises.
Non sans habileté, les Pyrénéens ripostèrent alors à ces différentes mesures...................
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(je m'aperçois qu'un lien donné sur " l'ours au carnaval " ne fonctionne pas, je le remplace  par une video)

mardi 9 février 2016

Mardi-Gras

En Ariège, les coutumes semblent axées sur la quête des oeufs et  celle du "Charivari"; c'est beaucoup moins drolatique et quelque fois, tragique.
J'avais déjà pris connaissance de ce fait-divers à mon arrivée dans la région et l'avait inclus dans mon recueil sur la Vie au temps passé dans cette Haute Vallée de l'Hers.
Pour illustrer cet article, j'ai choisi les masques de James Ensor, peintre Belge .

                                                                   Intrigue. 1890

Il semble que ces coutumes se soient perdues, peut-être très ponctuellement certains villages animent encore cette journée ? mais nous l'avons vu  la jeunesse ayant déserté les villages pour trouver du travail en ville, les anciens ne s'amusent plus comme avant.
Lors ce cette quête des oeufs les "mascos" portaient un foulard surmonté d'un chapeau noir et ne parlaient pas,  pour ne pas être reconnus.
S'ils courent après les jeunes filles, c'est pour les barbouiller d'azur, mais ils offrent aussi des crêpes.
En 1910 c'est un homme que l'on promène enfermé dans une armoire, pour gagner quelques sous et mettre en dérision les processions des saints.
Le chahut dirigé vers les filles que l'on cherche à embrasser et les costumes où sont accrochés des clochettes rappellent un peu d'autres carnavals.

Mais le plus symptomatique était la "Cour Cornuelle", composée de jeunes gens avec des juges et des avocats. Le groupe des jeunes recherchaient les maris malheureux et les mettaient en comparution, par contumace s'ils étaient absents;  le tout accompagné de chansons, de sons de corne et on jurait de dire
"touto la bertat et res que la bertat"
Le jour de Mardi-gras, on exécutait la sentence le condamné était ligoté sur un âne, tourné vers l'arrière-train de l'animal et le parcours dans tout le village s'accompagnait de l'odeur pestilentielle de corne brûlée dans des chaudrons..

                                               L'étonnement du masque Wouse. James Ensor

C'est ainsi qu'un habitant de Lavelanet en visite à Belesta le 6 février 1753, fût
saisi, ligoté mais comme il n'avait pas l'intention de se laisser faire, il s'échappa, prenant refuge  dans une maison où il se cacha, ce qui rendit les pousuivants, furieux ; rué de coups on l'allonge sur le corps de l'animal, la tête au niveau de la queue.
Le cortège s'ébroue avec force tintammare,  sonnettes, poêles et casseroles , huées et cris et sévères admonestations à l'encontre du condamné dont on arrache les cheveux, qu'on roue de coups et auquel on vole son mouchoir de soie et son argent.
Le consul du village et son acolyte  interviennent, le font libérer mais celui-ci exaspéré, tellement mis à mal, s'en prend à ses libérateurs, qui, du coup l'abandonnent à ses agresseurs. Ses misères ne s'arrêtent pas là on le descend de sa monture et on l'oblige à boire du vin de force.
Recueilli par un villageois, ses tortionnaires le sortent du lit où il l'avait allongé et le traînent hors du village en le jetant dans un pré.
Ses exigences pour réparer l'outrage et les coups,  ne furent que très modérément entendues par la juridiction seigneuriale de l'époque ................

 Carnaval est tantôt brûlé tantôt noyé dans l'Ariège quelque fois même fusillé... à blanc !!

Précurseurs des chars modernes, les charrettes étaient décorées de fleurs ou feuillages.
Carnabal es un brabe home                        Carnaval est un brave homme
Que fa beure qualques cops                        Qui fait boire quelques coups
Fa fuma la chemineio                                  Il fait fumer la cheminée
E rujeilha les carbous                                   Et rougir les braises.

Adiu, paure, adiu paure Carnabal               Adieu, pauvre, adieu pauvre Carnaval
Tu t'en bas, e jou demori                             Tu t'en vas et moi je reste
Adiu,paure Carnabal                                     Adieu pauvre carnaval

Nous deicho per heritat                                 Tu nous laisses pour héritage
Los patanos, las gras d'alh,                       Les pommes de terre, les grains d'ail,
S'en es anat, jou demori                              Il est parti, moi je reste
Per manja la soupo à l'oli                            Pour manger la soupe à l'huile .

             Je préfère les crêpes  !...............         
       


dimanche 7 février 2016

L'ours au Carnaval

Après une incursion sur le versant Sud des Pyrénées il faut souligner que dans toutes les provinces de la Catalogne à la Navarra, les traditions sont sensiblement les mêmes, et l'ours y tient aussi une grande place.
Problablement moindre qu'à Prats de Mollo.
J'ai trouvé un excellent dossier, très représentatif.
            ......................................................................."Dans ces mascarades, le cheval, confondu en Bigorre comme en Soule avec son cavalier, n'était pas le seul animal à avoir la vedette .
L'ours se trouvait le héros d'une farce carnavalesque encore vivace aujourd'hui dans certains cantons.
Les sentiments du Pyrénéen pour ce plantigrade étaient assez complexes.
Dévastateur de troupeaux et de récoltes, il était maudit et craint.
Peut-être d'ailleurs est-ce pour conjurer cet effroi que l'on éprouvait parfois le besoin"d'humaniser" cet animal en le personnifiant.
Il devenait ainsi le héros de chansons comme la complainte de l'ours Dominique dans laquelle les Ossalois le décrivaient cuisinant, portant sabots et veillant sur ses rentes!
Cependant, par sa force extraordinaire et son ardeur au combat, il était devenu un symbole de puissance et de virilité.
Dans certains contes, notamment celui de Jean de l'Ours, on le représentait comme "le type de l'animal ravisseur de femmes".
La découverte en forêt d'Iraty au XVIII ème siècle  et sur les hauteurs du Montcalm en Ariège en 1807, de femmes vivant soi-disant avec les ours acheva de fortifier ce mythe.
 (c'est d'ailleurs une bien triste histoire que celle de cette "folle du Montalm" perdue dans la montagne, abandonnée à la suite probablement d'une attaque de bandits, la civilisation s'obstinant à la récupérer et finissant dans la prison de Foix, ses témoignages pas fous du tout faisaient mention de sa subsistance parmi les ours qui la réchauffaient)


 Ajoutons enfin que la sortie régulière de l'animal hors de sa tanière au moment où s'éveillait la nature frappait profondément les esprits.
Le simulacre de chasse à l'ours pratiqué durant le Carnaval, associait toutes les images symboliques liées à cet animal.
Partout en Vallespir (Arles-sur-Tech, Saint Laurens de cerdans, Prats de Mollo et en Bigorre, Betpouey, Luz, Gèdre, les grandes lignes du scénario qui se déroulait autour de la Chandeleur étaient à peu près les mêmes".

https://www.youtube.com/watch?v=z_N70LBj7Oc


.................."Dès que la présence de l'ours dont le rôle était tenu par un ou plusieurs jeunes gens masqués et revêtus de peaux de chèvre, était signalée, tous les hommes de la communauté partaient à sa poursuite.
La "chasse" se déroulait parfois la nuit, à la lueur de torches.
Capturé et tué plusieurs fois," l'ours"  ne cessait de s'échapper pour courir après les femmes.
A Arles-sur-Tech, il parvenait à ses fins, s'emparait de la pauvre Roseta (un jeune garçon déguisé en fille) qu'il entraînait dans une hutte dressée sur la place.
Les chasseurs survenaient alors, sauvaient Roseta et rasaient ( ou castraient )  l'animal.
Cette chasse mouvementée, marquée d'éléments érotiques évidents, n'était pas exempte de quelques débordements sexuels, assez bien tolérés pendant la période carnavalesque. 

  https://books.google.fr/books?id=ujRMNjmLwO0C&pg=PA14&lpg=PA14&dq=ours+carnaval+Roseta&source=bl&ots=Mx-aqrQm8_&sig=ndiWmlzRFs516D93izluLpz_J-s&hl=fr&sa=X&ved=0ahUKEwiw9bO27OfKAhXBXhoKHRxlBUAQ6AEIWjAM#v=onepage&q=ours%20carnaval%20Roseta&f=false

Carnanal Basque

 Aux deux extrémités de la chaîne, Catalans et Basques sont restés très attachés à leur tradition et à leur langue.



   .........................."En Pays Basque, des troupes de jeunes parcouraient également les campagnes en cette saison.
Leurs déguisement et leurs danses variaint selon les régions : Bestagorri
 (vestes rouges) et Kotilungorri ( jupes rouges) du Labourd, portant d'impressionnantes coiffures coniques et brandissant sans discrétion fouets et sonnettes.
Cortège imposant du "Santibate" bas-navarrais associant cavaliers, géants, danseurs et orchestre.


                                  Carnaval de Haut-Soule
Troupe pittoresque des "rouges "et des "noirs" des mascarades souletines dont le contraste reflètait parfaitement les antagonismes de la société Pyrénéenne.
En avant venaient les "rouges" les" beaux " qui représentaient les éléments purs, indigènes, de la communauté et vers qui convergeaient les sympathies des spectateurs.
Parmi ces "rouges", cinq personnages avaient la vedette : Le Tcherrero ceinturé de sonnailles, armé de longs crins de cheval.



 Le Gathuzain homme-chat qui joue avec les ciseaux des sorcières Sorgingoaiziak, sorte de pantographe aux brusques détentes, images du félin s'allongeant pour bondir ou pour saisir une proie, peut-être aussi symbole de la foudre.
La kantiniersa, homme-femme avec sa jupe courte, son tonnelet en bandoulière, sa veste et son chapeau plat, bleu céleste.
L'Enseinari, brandissant son chapeau, est aussi un danseur renommé.
Enfin le héros du jeu, le Zamalzain, à la fois cheval et cavalier, coiffé d'un diadème rutilant et emplumé, ses jambes émergeant du caparaçon de soie et de dentelle qui recouvre l'armature d'osier de son "chibalet"
Kerestuak les hongreurs Marichalak les maréchaux-ferrants, Jauna eta Anderea, le seigneur et sa dame, Laboraria eta Etcheko anderea, le laboureur et sa femme, ferment le cortège des" beaux".




http://www.eke.eus/fr/culture-basque/euskara-la-langue-des-basques

http://www.aquitaineonline.com/actualites-en-aquitaine/euskal-herria/3493-hartzaro-festibala-carnaval-festival-basque-uztaritze.html

http://abarka.free.fr/index.php?page=Zubereko

Ne vous y trompez pas, nous basculons avec ce site sur le Pays Basque Espagnol avec en son centre un autre "Tolosa".

http://www.eitb.eus/multimedia/infografias/Carnaval_vasco/Carnavalvasco_es.swf