samedi 6 février 2016

Carnaval pyrénéen

Je le précise, car entre tous ( parmi les plus prestigieux celui de Venise et celui de Rio), les défoulements ou les masques sont sensiblement les mêmes.

J'adjoins une étude sur le masque:

 http://www.persee.fr/doc/flang_1244-5460_1994_num_2_3_900

Avant d'entamer la rédaction de cet article je me promenais dans les textes relatifs aux masques romains tout en écoutant "Masques et Bergamasques" de Gabrie Fauré.( Appaméen = né à Pamiers. Ariège )
Musique illustrée par des peintures de Watteau malheureusement pas avec nos têtes barbouillées de noir.

                                 Fête de l'Ours. Saint Laurent de Cerdans

....................................."La plupart des productions comiques de ce théatre "rural" pyrénéen étaient imaginées pour être représentées pendant le temps du carnaval.  Que de plaisirs mis en réserve pour cette période privilégiée, qui éclataient soudain comme un gigantesque feu d'artifice entre le jour des Rois et le mercredi des Cendres ! Par sa durée, sa signification profonde et la multiplicité de ses divertissements, la phase carnavalesque constituait le cycle de distractions le plus complet et le plus révélateur de l'année.
Temps de résurgence des mythes païens visant à éloigner les esprits malfaisants, fête de la lumière et du renouveau, consacrant la fin de l'hiver, le carnaval était, ici aussi, l'occasion d'une libération morale et sociale.Ce défoulement collectif se réalisait selon des manifestations de tout genre, dans la variété des formes, d'un bout à l'autre de la chaïne, ne saurait cacher l'unité profonde des motivations.
Dans ce vaste pot-pourri des plaisirs de la saison, la danse était reine.
"Il est impossible, reconnaissait le conte de Guiche en 1671, de faire en Pays Basque durant le carnaval autre chose que de danser".
Plusieurs de ces danses, comme la "cascavellada" et "l'entrellisada" roussillonnaises, ou les fameuses "ballades" de l'Ouest de la chaîne, n'étaient conçues qu'en fonction de cet événement annuel. Au bruit aigu des flûtes et tambourins, jeunes Bigourdans et Béarnais, disposés en file, parcouraient les villages des alentours en dansant toute la journée.



                                         Carnaval d'Ustaritz

Ils sont en veste ou même en chemise, poudrés, chargés de rubans de différentes couleurs placés en sautoir et en noeuds..
Chaque bande part de son village, ayant en tête une espèce de prud'homme avancé en âge, qui, s'étant montré le plus leste et le plus actif des balladeurs de son temps, a mérité d'être le dépositaire d'un drapeau qu'il remet, sur les confins de la commune, au plus digne de la troupe, c'est-à-dire au plus vigoureux, chargé de mener le branle.

http://www.eke.eus/fr/culture-basque/danse-basque/sur-le-calendrier-de-la-danse/les-carnavals-en-dansant/les-carnavals-de-navarre

Chaque ballade s'en va au rendez-vous, et revient dans son village, au son des flageolets, (flûte à perces cylindriques) des musettes et des tambourins, toujours le drapeau en tête ; celui qui le porte le fait circuler autour de son cou, de ses bras et de son corps, et l'agite en l'air ; à ses côtés, sont les musiciens; tous les autres suivent à la file, en se livrant à une joie bruyante, sautant et gambadant sur un air et un ton qui ne varient jamais.

Quittons momentanément l'Ouest de la chaîne pour  le Roussillon, nous reviendrons demain au Pays Basque.



Au cœur de l’Aude à seulement 57km de Carcassonne, la ville de Limoux rythme son début d’année autour de son carnaval considéré comme le  plus long du monde. Un évènement qui se perpétue depuis près de 400 ans et qui demeure aujourd’hui inscrit au Patrimoine National Immatériel. Trois mois de spectacle dans les rues de la ville de Limoux ou chaque samedi et dimanche des bandes déguisées retracent la tradition qu’avaient les meuniers au XIV° siècle de célébrer la remise de leurs redevances au monastère de Prouille le jour du Mardi Gras. Un folklore unique réunissant les petits comme les grands dans un esprit convivial.
Au cours de ces 3 mois un samedi est consacré aux Carnavals du Monde, le dimanche qui suit, à la sortie de toutes les bandes qui met à l’honneur un musicien et son instrument ainsi que tous les costumes dans un florilège de couleurs. Elles sont accompagnées par plusieurs groupes de musiciens. Cette journée exceptionnelle propose une photographie du Carnaval de Limoux.

Différent des corsos fleuris, des défilés de chars et autres cavalcades, le Carnaval de Limoux n’est pas un spectacle, il est le contraire d’une parade. Il est un folklore à l’état pur, sans reconstitution aucune et c’est pour cela qu’il colle autant à la ville et à sa région. Il a marqué des générations et appartient à notre patrimoine culturel. 
http://www.sudcanigo.com/evenements/fete-de-lours-prats-de-mollo-2016/

http://www.els-salancaires.fr/historiques/histoire_musette.htm

vendredi 5 février 2016

Carnaval

Je pense que je n'épuiserai pas mon fond de livres historiques relatifs au pays que j'habite bien que je n'en sois pas native  puisque d'ascendance gasconne  et Toulousaine de naissance.
 A la recherche de nouvelles traditions que les auteurs précédents n'auraient pas abordé, c'est un livre de Jean-François Soulet que j'ouvre pour vous. ( Agrégé d'histoire, docteur es lettres, maître de conférences à l'Université de Toulouse)

La présentation de ce livre de 1988 résume bien les caractéristiques de ces Pyrénéens, où  dit-il ...

" Durant les trois siècles précédant la Révolution, la vie pyrénéenne revêt sa forme la plus achevée, la plus originale.
Moment capital où se joue l'indépendance des populations qui, sur près de 450 kilomètres, de l'Atlantique à la Méditerranée, occupent la "chaîne".
Epoque difficile, tant sur le plan économique que démographique, obligeant les hommes à doubler leurs fonctions naturelles de pasteur et d'agriculteur, par celles de bûcheron, de mineur, de porteur... et les contraignant chaque année à prendre le chemin de l'Espagne, antichambre de cet Eldorado que sont pour eux les "isles" et l'Amérique.
Ces problèmes, véritables révélateurs des mentalités, permettent de pénétrer dans cette étrange et paradoxale micro-société pyrénéenne où la femme a les mêmes droits que l'homme, mais où cadets, "cagots" et bohémiens sont tenus en sujétion : où s'affichent à la fois de rigoureux principes jansénistes et une liberté de moeurs étonnante ; et dont l'éclectique panthéon accueille Dieu et Satan, la Vierge et les fées, les saints et les magiciens"

plaque symbolique du foyer les deux colombes représentants les époux sont sculptés à hauteur égale = égalité entre eux
   J'ai toujours ressenti une certaine réticence  à  vous conter toutes les diableries et magies, pourtant très présentes dans toute la littérature des us et coutumes, traditions  des Pyrénées.
Crainte que vous ne me soupçonniez de sorcière..........
Pour en revenir au Carnaval, les pages qui viendront seront bien représentatives de cette analyse.
Toutefois, les traditions carnavalesques se retrouvent un peu dans tous les pays. 

 http://www.tv-replay.fr/redirection/04-02-16/carnavals-arte-11415581.html

J'y mêlerai les photos des fleurs de mon jardin où tout éclot.
Découverte  ce matin sur la rive bien exposée au soleil, des iris.


mercredi 3 février 2016

Lignes électriques

 Qu'y a-t-il d'artistique là-dedans ?

Frisco m'a fait passer cet article hier soir : il y a des ingénieurs qui  savent joindre l'utile à l'esthétique, et c'est magnifique!!!



http://geekhebdo.com/les-pylones-electriques-sont-de-veritables-oeuvres-dart-en-islande/

Si j'étais Maire, je ferais sculpter tous les poteaux télégraphiques de ma commune par les artistes locaux.

Il y en a un autre qui s'est bien débrouillé avec les fils de fer,
 c'est Calder:



https://www.centrepompidou.fr/cpv/resource/crBq4r/rXbep45

mais aussi :

 https://books.google.fr/books?id=akzUXOfz4JMC&pg=PA36&lpg=PA36&dq=sculpture+fil+de+fer+champagne&source=bl&ots=CRx6sa2OmD&sig=1LC3BDQm5-Wsi8U_FOgjX3BPhBU&hl=fr&sa=X&ved=0ahUKEwj9iKaa3N3KAhUF2BoKHfQEBjU4HhDoAQhQMAg#v=onepage&q=sculpture%20fil%20de%20fer%20champagne&f=false

 http://www.artmajeur.com/fr/artist/robs/collection/sculptures-chevaux/1481155

 http://www.arc-en-lune.com/

     http://www.houzz.fr/photos/26739403/sculpture-tableau-prince-des-forets-cerf-fait-main-fil-de-fer-3d-arc-en-lune-contemporain-sculpture-murale-other-metro


J'ai été très  agréablement surprise  quand je suis "tombée" par hasard sur ces sculptures mais je n'ai pas osé rentrer dans le champ !!

https://www.youtube.com/watch?v=U9lAQ_rOBJM

Chandeleur

 C'était hier la confection traditionnelle des crèpes mais qui va perdurer jusqu'au Carnaval. Fête des laboureurs, quelques traditions y sont attachées ; la première de  ces "pescalhous" de farine, d'eau et de graisse doit être donnée aux poules pour qu'elles pondent toute l'année.
Sa forme ronde a quelque relation avec le solaire.


Dans les Pyrénées pour la St Blaise, le 3 février, les paysans accrochent une crêpe à la corne de leurs vaches pour les empêcher de devenir malades durant l'année à venir. Pour Mardi gras nous verrons les autres coutumes attachées à cette date.
Quatre églises au moins sont dédiées à Saint Blaise, Bélesta et Ercé,




 les Pujols et l'Hopital St Blaise


http://www.hopital-saint-blaise.fr/

Blaise de Sébaste était médecin mais aussi très proche de la nature oû il s'était retiré auprès des animaux sauvages avec lesquels il faisait bon ménage.

Mais l'actualité du jour est l'exposition du Catalan Tapiès que je vais aller visiter prochainement.



http://actu.cotetoulouse.fr/tapies-parla-parla-une-nouvelle-expo-debarque-aux-abattoirs-de-toulouse_28798/?utm_source=newsletter&utm_medium=newsletter&utm_campaign=L%27actualit%C3%A9+%C3%A0+Toulouse%2C+mercredi+3+f%C3%A9vrier

à Toulouse les mimosas sont en fleurs, taches lumineuses au coin d'une rue ou à l'angle d'un chemin, et son parfum est inimitable !!!
 mais aussi les amandiers.


mardi 2 février 2016

Du Bibent à Sarajevo

                                                photos Isarde

 Vous l'allez voir, voici un établissement Toulousain, qui heureusement perdure !!

https://fr.wikipedia.org/wiki/Caf%C3%A9_Bibent

                                                   Plafond central

http://www.ladepeche.fr/article/2011/06/20/1110895-axel-letellier-l-archi-du-bibent.html

                           Autre style: dans la proche rue Gambetta.

 Agréablement nommé style "nouille" sur les sites suivants vous trouverez  bien qu'intitulé" Paris", l'essentiel des architectures toulousaines de cette époque.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Art_nouveau

http://paris1900.blogspot.fr/

lundi 1 février 2016

lumières et flambeaux



                                   Phare sur la ville, le clocher des Jacobins


Il n'y a pas que sur le Pont d'Avignon qu'on y danse, qu'on y danse ................

                                               Place du Capitole

                            En route pour les festivités d'un anniversaire.

Dans ce reliquaire, solennellement en procession dans le cloitre des jacobins, en l'occurence le crâne d'un grand penseur, Théologien Dominicain, Saint Thomas d'Aquin et en ce 28 Janvier date de son arrivée à Toulouse et les 800 ans de la fondation à Toulouse de cet ordre des Frères Prêcheurs.
Solennité célébrée par l'Archevêque de Toulouse en présence d'une foule nombreuse .
 http://classes.bnf.fr/dossitsm/b-thomaa.htm


  Les voutes célèbres des Jacobins résonnant des voix pures du Choeur Organum

http://www.jacobins.toulouse.fr/decouvrez-le-chant-dominicain

https://www.youtube.com/watch?v=hIA4wMJVW6g

https://www.youtube.com/watch?v=Hmy757zHBb4
  
Mon jeune Guilhem, impressionné par les chasubles de fête des "célébrants" m'a rappelé cette magnifique exposition que j'avais vue en 1997 en Avignon au Palais des Papes  dont il est fait mention sur " Persée" malheureusement sans les photos.

http://www.persee.fr/doc/bulmo_0007-473x_1998_num_156_2_1794000_t1_0221_0000_4

Dans son analyse critique de mon blog qu'il ne m'a transmise que par mail perso il a tout à fait raison, je ne lâche un sujet que lorsque j'ai pu en faire le plus possible l'analyse .
http://www.persee.fr/doc/bulmo_0007-473x_1967_num_125_2_7792

mercredi 27 janvier 2016

suite et fin

Avant de continuer mon récit, des nouvelles, ce matin, de la route de la soie:

https://www.connaissancedesarts.com/archeologie/sophie-makariou-suit-les-traces-de-la-route-de-la-soie-1134431/

( Au fur et à mesure que je découvre ce récit, la tentation de le rebaptiser "Songe d'une nuit de pleine lune" me vient à l'esprit, Destel devait mal dormir , il s'est lancé dans cette cavalcade, espérant en ressortir épuisé et enfin s'endormir .... peut-être ..ou bien l'a-t-il rêvée ? )
    " Au sommet des montagnes du Couserans, les aigles planaient toujours.
Balezil gratta du sabot la pointe du Crabère et siffla.
Le sifflement, c'est le garde-à-vous de l'isard, connu des chasseurs.
A ce signal, l'un des aigles blancs interrompit sa ronde, flécha sur un jeune chevreau, l'encercla de serres attentives et, à petite allure, fila vers l'Est.
Balezil, lui, sauta dans le vide.
Deux cents isards, lancés à toute vitesse, suivirent le chef.

 Ses cils d'or projetaient un faisceau lumineux à l'égal d'un phare sur la mer.
Presque à le toucher, le rapace orientait Balezil, pendant que le chevreau, sans crainte aucune, caressait du front le ventre de son ravisseur.
Derrière l'aigle blanc tel un sillage sombre ayant un bruit d'hélice, des aigles bruns volaient.
Parfois, leurs serres détendues, peignaient avec douceur les croupes moites des isards.Du Crabère au Mauberné se continua la chevauchée fantastique que les cauchemars imitent quelquefois : une espèce de tonnerre roulant de falaise en falaise, de ravin en ravin, avec, sur le passage de la harde folle, un chapelet d'avalanches : débris de roches dégringolant sous les onglons des bêtes jusques aux pins éclaboussés de lune .
 Réveillés par le bruit, des chiens hurlaient d'épouvante.
Les pâtres, sous la protection d'un signe de croix, se demandaient qu'elle était cette comète qui fusait au flanc des montagnes.
Lorsque la harde atteignit à la cime du Mauberné, l'un des trois aigles blancs se détacha de la ronde, plongea dans un abîme, revint avec un chevreau, se mêla au cortège volant et galopant, accompagné par les aigles bruns de l'endroit.
Sur les plateaux herbeux, les gracieuses antilopes de France glissaient comme des fantômes sous des écharpes d'ailes. Aux approches des gouffres, les oiseaux formaient au-dessus une couronne tournoyante ; et les sauvages sauteurs, ainsi avertis, franchissaient mieux ces puits d'ombre.
Balezil infatiguable vainquit le May-de-Bulard.
Un troisième porteur de chevreau abandonna le cercle blanc.
Sous l'averse bleue, la course hallucinante s'accélère, les névés plastronnent, les blessures des crêtes en haillons se mastiquent de noir, la raillère allonge sa toiture d'argent et l'archet d'une cascade racle le silence avec une telle force que le cirque s'emplit d'une brume de sons.
Une espèce de rage fuette les jarrets des isards. Le poil ruisselle de sueur.
L'écume s'arrache des bouches, vole au ras de la colonne, horizontale dure, comme des balles éclairantes.
Entre deux profondeurs saturées de vertige, le mince fil d'une arête résonne sous les sabots, et la file indienne de ces démons de la montagne exhale, tisse, déroule une voie lactée de vapeurs.........................................................
.....................................................................................................
...........................Bientôt, la harde, sous la voûte des ailes parvint au sommet de Bentefarine.
Le paraphe fabuleux, que les isards avaient voulu tracer du couchant au levant, était fini.
Sur chacun des sept pics, un couple d'aigles tournait encore.
Balezil, le coeur en tumulte, cueillit un edelweiss.

Campé à la cime du mont, dans l'attitude émouvante de la chèvre qui sert de sentinelle, il balança la fleur à la façon d'un encensoir.
A ce signe, les aigles remirent à leur mère les sept chevreaux vivants.
Autour d'eux, les autres bêtes, courantes ou planantes, composérent une foule.
Alors, au roi des rapaces blancs, Balezil fit hommage de l'étoile des neiges.
Le roi des airs parla :
"Aussi longtemps que le roi des cimes me remettra, tous les ans, à la pointe du jour, cette fleur blanche, reine des hauteurs pures, aussi longtemps la paix régnera entre les cornes de l'isard et les serres de l'aigle."
Ayant dit, le maître des oiseaux de proie s'envola, suivi des siens.
Ayant bien écouté, le maître des toisons paissantes descendit vers la zone des herbes.
 (Destel situe son récit dans les années 1200, puisque vous allez le voir ce sont les flèches sarrasines  qui sont responsables de l'extinction de ce pacte de paix.
 Il est une autre lecture que je vous recommande :  "Qund l'islam était aux portes des Pyrénées de Pierre Tucoo-Chala. Celui-ci, auteur de "Gaston Fébus, prince des Pyrénées", obtint pour ce recueil le prix Jules Michelet 1991.
Il vous entraîne dans d'autres cavalcades où vous aurez envie comme moi  de suivre les princes aragonais, béarnais et Gaston le Croisé.

 https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00290171/document

         " Un rayon de soleil colore les plus hautes montagnes.
Balezil hume la frise matinale, frappe le sol avec fureur, siffle de façon lugubre.
Toute la harde bondit, ventre aux roches, les cornes droites, les naseaux fumants, s'engouffre dans un couloir.... et meurt sous les mille flèches sarrasines d'une avant-garde partie en chasse pour nourrir une armée.
Le cadavre blanc de Balezil, tombé dans un trou de neige, échappe miraculeusement à la vue des chasseurs.
Depuis, toutes les saisons, quand le 15 août sonne au calendrier du Temps, Balezil entr'ouvre ses cils d'or. Il se lève, dépaysé, secoue ses cornes interrogatives. En vain. Sa mémoire succombe sous un fardeau trop lourd.
Ses yeux d'azur aperçoivent une fontaine de sang.
Elle rougit l'endroit où trépassèrent les compagnons de Balezil.
Son murmure plaintif éveille, de caillou en caillou, l'echo de quelque râle ; et les bords de la source se hérissent de fleurs à gueules écarlates, flammées de braise.

Feu et sang ! Balezil se souvient de la lune égorgée par les aiguilles du Crabère.
Il sait vaguement qu'il faut cueillir une fleur. Laquelle ? Qu'il doit la déposer à la pointe de Bentefarine afin de renouveler la paix entre l'aigle et l'isard. Vite, il coupe une tige de glaïeul, arrive pantelant à la cime de la montagne.... chaque fois pour y voir déchirer, du bec et de la serre, un tout jeune chevreau.

Et voilà pourquoi, malgré l'immortel Balezil, symbole de la paix fallacieuse, qui porte la fleur rouge au lieu de la fleur blanche.... voilà pourqoui la guerre continue, depuis des siècles, entre le bec et la corne, sur les montagnes du Couserans.
Et voilà pourquoi les rhododendrons, dans le désert des granits blafards, ont des pétales de sang rose : celui des chevreaux, qui pleut du ciel, lorsque les aigles passent.
Et voilà pourquoi, disent les cendres, les hommes, se trompant avec zèle, s'offrent, d'une montagne à l'autre qui s'appelle frontière, une dague de braise et de sang habillée de lauriers.




 Et puis non... c'est un récit qui n'a rien d'un songe,

 c'est une réalité habillée d' une grande sagesse et d'une grande poésie .