mardi 7 juillet 2015

Vadim Gorbatov

 Se souvient-il encore de son séjour aux Ecrins?
                   
                                              Qu'en disait-il ?

                  "Le parc m'a stupéfié par sa grandeur et sa puissance.
C'est un spectacle féerique et grandiose.
Faisant tout son possible pour saisir toute cette splendeur, l'oeil avance toujours sur une verticale, du haut en bas et du bas en haut, et c'est si inhabituel pour moi.
Dans mon pays, je suis habitué aux lignes de paysages calmes, horizontales, aux espaces ouverts de la toundra, des forêts, des steppes, à la ligne douce de l'horizon.
Les animaux ici n'ont pas peur de l'homme.
Si on reste calme, on peut observer la vie des marmottes.


Elles se reposent étendues, paresseuses, sur des pierres chauffées par le soleil, se nourrissent ou bien organisent une vraie  lutte comme des combattants Sumos.
Pour la première fois dans ma vie , j'ai vu ces chamois de très près.
J'ai observé des jeunes mâles régler leurs comptes, le poil hérissé, puis s'allonger sur la neige, par une belle journée, s'amuser en descendant sur le flanc les pentes neigeuses.
Une vieille avalanche d'hiver a barré le chemin au torrent violent.
L'eau a creusé un tunnel dans une lourde neige tassée en formant un pont bizarre sous lequel bouillonnent des vagues vertes écumeuses.
Et soudain, j'aperçois une hermine traverser ce pont de neige en faisant des sauts gracieux; en pleine journée, sans se cacher.
Elle n'a pas peur de l'homme assis tout près d'elle sur son chevalet."


 Né en 1940, Vadim Corbatov est diplomé de l'Académie des Arts Stroganov à Moscou.
Pendant une longue période il a travaillé à la Télévision centrale.
Docteur de l'Histoire des Arts, membre de l'Union des peintres de la Russie, des Sociétés anglaises SWLA, SWAN(Soiété of Wildlife Art of the Nations) ainsi que de l'ANF.
Il travaille tout autant dans le domaine de la peinture que des arts graphiques et de l'illustration de livres.
Il voyage beaucoup pour observer et peindre des animaux dans leur milieu naturel.
Avec une expédition de zoologistes, il a visité les différents coins de la Russie: des côtes de l'océan Arctique jusqu'aux déserts et aux montagnes de l'Asie Centrale.


Fascination

 Celle de Hanz Feyerabend pour les pierres et les blocs rocheux, celles des étranges formations géologiques découvertes dans le Yorkshire en Angleterre, mais aussi les paysages désertiques de l'Australie, et les paysages verdoyants et volcaniques de l'Indonésie.

                               Rêve de pierre. Vallée de la Romanche

Voilà d'abord ce qu'il dit des Ecrins:
 

                                           Comme chaque jour, j'ai rejoint ma" cascade" de pierres jaunes et tachées de pourpre, noyée dans le vert frais des épiceas.
Les petits coups de marteau bien net du pic-vert et l'appel d'un coucou me teinnent compagnie alors que je fais des croquis en prépararion d'une toile intitulée "A la dérive".
Un curieux petit renard roux, surgissant dans mon décor, m'a longuement regardé avant de disparaître derrière le bloc rocheux puis de refaire son apparition de l'autre côté.
Il m'examine de tout près, avec d'imperceptibles mouvements de tête, et puis reprend tranquillement son chemin.
Pendant que je m'escrime à peindre, une souris des champs cherche à profiter de la situation; avec des mouvements frénétiques, elle tire un bout de mon pain jusqu'à son terrier, entre les pierres.
Et voici que soudainement, cette atmosphère paisible est rompue par la chute d'un gros bloc de pierre, bondissant sur les éboulis avec des bruits durs et secs, se cassant au passage en plus petits éclats. Les plus gros morceaux continuent leur course comme des météorites, traînant des queues blanches de poussière à chaque contact avec le sol avant de s'arrêter définitivement. Alors que le calme est revenu, il n'y a plus que les marmottes pour donner un écho à leur détresse par des cris d'alarme aigus.
Les nuages ont à présent gommé le bleu du ciel et le sommet du pic de l'Homme, répandant une lourde senteur d'humidité"


Mais sa biographie est plus explicite encore:
Il passe une grande partie de son temps dans la nature afin d'étudier le paysage comme un tout, ou bien dans ses détails qui, à cause de leur situation et de la manière dont ils reflètent lumière et couleur, sont devenus signifiants pour lui.
Se déplaçant parmi les blocs rocheux et les arbres, il ne fait pas qu'observer, il touche, essayant de comprendre à la fois avec les sens et avec son imagination.

                          "Un étroit contact avec la terre est essentiel à mon travail.
En tant qu'observateur insatiable je suis intrigué et charmé par l'extraordinaire variété des sujets et de leurs dimensions. A force d'entraînement, je suis devenu sensible aux plus petits miracles du monde naturel.
Et j'essaye d'entretenir, bien vivante, cette attitude de naiveté, persuadé qu'elle m'aide à trouver des images parlantes et enchanteresses".

Il peint principalement à la gouache, qu'il utilise assez opaque ou bien parfois en lavis aussi transparents que l'aquarelle, au cours de séances de 3 à 4 heures.
Pour renforcer les matériaux ordinaires, il lui arrive de recourir à des moyens organiques: par exemple après avoir enduit une feuille d'arbre d'une couche de peinture, il la renverse pour obtenir sur le papier le carton ou la toile une image qui sera ensuite surlignée à traits de pinceaux.

                        "Un des meilleurs moments pour peindre un paysage est celui où, par l'effet d'une lumière oblique, les contours tendent à se fondre alors que les couleurs sont plus vives. L'atmosphère que dégage un site m'est importante et j'essaie de communier avec elle, prenant mon temps afin de trouver une sensation de paix nécessaire à la concentration. Au bout d'un certain temps, il s'instaure une sorte de  dialogue; je fais partie du sol de la forêt où je me tiens assis, et les animaux qui avaient d'abord fui ma présence, reviennent sur les lieux"

Revenant toujours sur les mêmes sites pour enregistrer les changements intervenus, dictés par la saison  ou les conditions atmosphériques, il rapporte à son atelier toutes sortes de "souvenirs" propres à une reproduction peinte, et des objets comme des pierres, des cailloux, des morceaux de bois ou encore des enregistements sur bande magnétique de sons divers émis par le milieu naturel.

                                 " C'est en me concentrant sur la beauté et sur ce qui se tient caché derrière la surface des choses que j'essaie d'exprimer du palpable à côté de ce qui est directement perceptible sur la nature.
C'est ma contribution à l'univers des choses qui rend ma vie digne d'être vécue".

Feyerabend qu réside à Groningen aux Pays-Bas  a voyagé en Scandinavie, en Allemagne et en Toscane.

un autre style

 Pour François Desbordes c'est un style différent et son palmarès pour l'instant plus discret, mais son expérience dans les Ecrins, un ravissement dit-il.


                "Par deux fois, la rencontre avec la montagne fut un ravissement.
Je me souviens des cinq jours passés dans un même lieu, passionnante aventure immobile, qui me laissa voir le paysage et les animaux changer au gré des heures et de la météo.
Retrouver la chaleur et le confort du refuge des Bans était aussi un moment magique, après une journée de balade et de dessin.
Lors de mon second séjour, la rudesse et l'incroyable beauté de la montagne à St-Christophe-en-Oisans me reste en mémoire.
Après les instants de quiétude lors de la peinture d'un groupe de chamois se reposant confiants, sur une plaque de neige, l'un des souvenirs les plus marquants que je garderai de ces moments est sans doute le grondement sourd et régulier des avalanches et des chutes de pierres."


                                  Aquarelle de terrain: Rouge-Queue noir, vallée des Bans

 Puisqu'on parle de Rouge-Queue, j'ai une famille qui grandit ( c'est un bonheur de voir les parents se relayer et parfois m'apostropher avec véhémence, presque aussi près que deux mètres, jugeant ma présence gênante) au plus haut de ma terrasse couverte, aucun chat ne pourra y grimper.

Il est plus rapide de répondre à Nistosien ici que de repartir sur son commentaire, je viens toutefois de rajouter un lien  sur le Tour de France qui passera au Port de Lers cet été.
La crémaillère, à l'automne, petite pause travaux vous dira Frisco, nous nous sommes littéralement faits dévorer par les taons et rester manches longues pantalons et col fermé par ces chaleurs, c'est vouloir mourir

Une de mes filles et moi-même y remonterons quand même pour quelques séances de "rotofil", à la fraîche.

Cet endroit est béni des Dieux, j'y ressens un indicible bonheur, peut-être incompréhensible pour d'autres. Les forces telluriques de ce site se ressentent toujours.


lundi 6 juillet 2015

Art Nature: suite


                                                              Cet artiste expose depuis 1982 dans de nombreuses galeries en Europe. Il a voyagé avec le groupe de Artists  for Nature Foundation  en Pologne, en Extremadure (Espagne), et publié plusieurs ouvrages:
The Complete Garden Bird Book.
Where to watch birds in Ireland.
Portrait of a Living Marsh.
and so on....
                     




                                         David Daly

                          " Dans la vallée, près de Pré-Clot, j'observe des mouvements qui agitent les broussailles.
Je reste immobile, les jumelles pointées.
Les mouvements continuent, et puis voici que j'aperçois un oiseau, d'un vert olive éclatant, qui volète doucement dans l'enchevêtrement des branches.
 C'est une fauvette, oui, mais quel genre?
Trop brillante pour être un "chiffchaff" ( un pouillot véloce).
L'air est calme, la visibilité réduite à cause d'un épais brouillard.
Par instants, un vif rayon de soleil perce, une trouée s'opère, signe que le brouillard va se dissiper.



Encore quelques mouvements hésitants, et soudain, sur une branche exposée à la vue, voici la révélation.
Il s'agit d'un pouillot de Bonelli.
Caractéristique, son oeil en vrille sur une tête peu colorée, alors que son empennage, d'un jaune brillant, fait une tache vive dans la brume.
Tandis que je peins, l'oiseau se déplace lentement à travers les broussailles, inspectant chaque feuillage pour y trouver quelque nourriture.
Le plumage du pouillot reflète exactement le ton vert olive brillant de la végétation, et son oeil est comme la baie noire d'un buisson blanc.



Comme je demeure concentré sur ce que je peins, le brouillard peu à peu se dissipe, une clarté chaude et humide baigne l'atmosphère et vient au secours de l'aquarelle pour qu'elle tienne sur le papier.
Et soudain, les nuées s'étant déchirées, j'aperçois, surgissant comme des tours au-dessus de moi, les sommets du massif.
Pendant tout ce temps, un roulement sourd, le bruit que font les chutes d'eau dans le lointain, se fait entendre et semble remplir l'air.

Je sens que je ne fais qu'un avec ce qui m'entoure".


dimanche 5 juillet 2015

Au pays de la Lherzolite

  Aucun monstre n'émerge de l'étang de Lhers si ce n'est cet adorable rat trompette, le desman pyrénéen, le paysage grandiose du Port de Lers avec ses troupeaux en estive et la descente vers Aulus ont toujours ce "je ne sais quoi"de l'atmosphère qui a régné là lors du soulèvement pyrénéen.

 Petit intermède ce matin ou "entre-pages "

Les grands sommets frontaliers avec l'Espagne ont encore leurs névés.
               et la brume de chaleur ne s'est pas dissipée de la journée.

(à destination de Nistosien) l'avant dernier acte de la reconstruction de la grange de Frisco and Co, s'est fêté en présence des nombreux membres de la famille.

J'ai pu aller identifier mon site néolithique avec des découvertes supplémentaires.


http://roches.mnhn.fr/lherz/description.php

et très bientôt le Tour de France  http://www.ariegenews.com/news-1888-92135.html

jeudi 2 juillet 2015

encore un autre

 Tous finalement des "hyper" doués qui manient l'écriture et le pinceau avec autant de bonheur, Denis Clavreul, né en 1955 en Mayenne, soutient un DEA d'écologie en 1979, puis un doctorat de 3ème cycle en écologie à la faculté des Sciences de Rennes en 1984.
 Encore un palmarès digne d'éloges que je vous communiquerai dans les jours qui viennent.
J'ai des fourmis dans les jambes et je prépare aussi mon sac à dos, je ne m'installerai pas à l'affut, je vais simplement revoir la vallée chère à mon coeur avec une photo à prendre d'une découverte que je dois encore étudier.

           "7 mars, 10h30, vallée de l'Onde. J'ai quitté la piste de ski de fond et je monte dans les bois avant de rejoindre un peu plus loin le bord du torrent.
Seuls quelques cris de pinson, de mésange charbonnière et de pic épeiche brisent le silence.
Le torrent gelé est couvert de neige, mais on entend son coeur qui bat: il coule sous la glace. La pente s'accentue. J'ai préféré emprunter le flanc de la vallée le moins éclairé afin de ne pas être gêné par le soleil. Après vingt minutes de marche, je marrête, car la neige empêche ma progression. Face à moi se trouve une grande falaise, douce et bombée comme un ventre, soulignée à la base par de fines bades blanches. Il y a du roux, un grand arc de roche verdâtre sur la droite.
                     J'ai envie de peindre.

                            Aquarelle d'après croquis. Soir de mars près de Dormillouse

Le lendemain, près de Dormillouse.
Le soleil va bientôt disparaître derrière le Grand Pinier.
Comme hier le vol de chocards apparaît, venu d'on ne sait où: la bande se pose non loin de moi sur des rochers et quelques murets de pierre.

 Puis les oiseaux dévalent la pente, se posent, picorent, marchent un peu, s'envolent; d'autres arrivent et dévalent lentement la pente en tourbillonant comme de grandes feuilles noires.
Les oiseaux en vol sont très gracieux et légers; de nombreuses ombres vivantes sont projetées sur le sol.
Soudain les oiseaux disparaissent; leurs cris résonnent encore quelques instants dans la vallée.
Le paysage bleuté semble à présent incroyablement immobile."







Aquarelle et pastel La Valée de l'Onde (Vallouise)
                          Aquarelle et pastel Lac du Lauvitel














d'après croquis Aquarelle et pastel.
Les chocards se sont posés (Freissinières)

un autre registre

 Nous avons à faire avec Jean Chevalier à un diplomé de Sciences Naturelles, illustrateur de renom au palmarès impressionnant, doublé d'un véritable montagnard,  bien qu'il avoue avoir eu une certaine appréhension de la montagne et ses illustrations sont parmi mes préférées, sans doute parce qu' il utlise beaucoup le pastel.
Le texte qui accompagne sa contribution à ces rencontres d'artistes reflète une énergie volontaire.

Aquarelle et pastel. La prairie au soir: Molines en Champsaur (Valgaudemar)


             "Entre 1990 et 1996, neuf visites aux Ecrins me laissèrent d'inoubliables souvenirs.
Au premier séjour je découvrais le côté méridional de Vallouise grâce à la faune locale: un scorpion sur la terrasse du gîte Martin, les moineaux soulcies et petits-ducs ou encore le lagopède et le petit tétras qu'abritent les forêts et les pierriers.

Puis dans le cadre somptueux du Lauvitel, ce furent les chamois replets aux couleurs de novembre, chamois épais dans leur robe d'hiver, mais incroyablement puissants, à la crête dorsale hérissée par le rut.
La virée d'avril 93 restera à jamais dans ma mémoire: conseillé par Christian Couloumy, chef de secteur et ami, nous montons pour trois nuits dans un refuge, à 2200 mètres d'altitude.
Paysage grandiose le jour, aux mamelons enneigés cernés d'ombres bleues.
Formes rondes des lagopèdes immaculés, dont la résistance au froid laisse rêveur.
La nuit, la danse des lièvres blancs sous le clair de lune rendait le décor féerique.
Puis la redescente, presque aussi dure que la montée ( à cause du poids des sacs et de la neige)
mais qui se déroula dans l'euphorie finale d'une virée réussie..

Aquarelle et fusain Col de la Règue au clair de lune Vallée de Chargès
    Aquarelle et pastel Visite des chocards au Pré de Madame
         Fusain . Lièvre dressé d'après croquis
               Aquarelle et pastel. Vers la Tête Noire

 Il me revient aussi trois jours de pastels intensifs à Molines, assis presque toute la journée à me battre avec cette technique, nouvelle pour moi.
Trop de souvenirs à évoquer, qui masquent mon appréhension initiale de la montagne."