mercredi 10 février 2016

Promenade

Il faisait encore beau en fin de semaine dernière, occasion à ne pas manquer  de se lancer sur les chemins.
 Ma  démarche  est inverse ce matin, habituellement, je cherche à illustrer mes propos, aujourd'ui, ce sont mes photos que je veux habiller.
La température était anormalement élevée, une brise légère secouait à peine les châtons de noisetiers.


Aucun bruit non plus, hormis le beuglement d'un troupeau, en contre-bas qui répandait une forte odeur;
pratiquement chaque vache allaitait son veau; alertées par ma présence insistante, elles me fixaient pour évaluer un danger potentiel.
Ce sont de jeunes agriculteurs qui sont les propriétaires de ces animaux, ils ont planté leurs pénates dans l'Aude voisine mais ont conservé ces terrains..
Cela m'a remis en mémoire leurs difficultés actuelles et donné envie de rouvrir le livre  encore à mes côtés de Jean --François Soulet. C'était  l'Age d'Or  des "passeries" Pyrénéennes, quand les accords transfrontaliers abolissaient les frontières pour donner libre cours aux pacages.
Je vous ai déjà fait part de ces coutumes dans un article de l'an passé sans doute sur la Pierre St Martin et la vallée de Roncal, où ces accords sont encore fêtés.
 L'ethnologue autodidacte se double d'une géologue plus autodidacte encore !!, quand on est passionné par toutes ces matières................
Et pourquoi se tourner vers le passé ? le présent est incertain, pour beaucoup, et l'avenir très flou !!!.... alors ! revivons des périodes plus fastes .

...................Entre les Royaumes de France et d'Espagne

Un 22 juillet, au matin. Deux groupes d'hommes se font face sur la pelouse inondée de soleil de la "prade St Jean" au pied du Cirque de Gavarnie.
Parmi eux on reconnait sans peine, avec leurs vastes sombreros,  leurs foulards et leurs vestes de velours, plusieurs Aragonais. Partis de nuit de la vallée de Broto, ils ont, chaussés de leurs seules "abarcas" marché des heures durant, grimpant jusqu'au col des Pierres-de-Saint Martin (aujourd'hui, Boucharo) , pour dévaler ensuite vers le vallon du Pouey-Aspé et y atteindre Gavarnie.
Les voilà face aux, "Toys" , autrement dit aux délégués de la ville de Barèges.
Que cache cette rencontre  quelque peu insolite dans ce cadre austère et grandiose : un combat singulier ? un conciliabule ? 


Pas le moins du monde.
Il s'agit seulement d'une de ces assemblées qui, périodiquement, d'un bout à l'autre de la chaîne, rassemblent les représentants des montagnards  des deux versants.
Comme ceux de Broto et de Barèges, ils conviennent solennellement "de souffrir que leur bétailh ailhe depaistre réciproquement les uns chez les autres", confirment la paix qu'ils souhaitent voir régner entre eux et jugent souverainement toutes les questions intervenues depuis leur dernière réunion.
Sous l'Ancien Régime, le fédération, c'est-à-dire l'association entre deux vallées situées respectivement sur les versants français et espagnol, représente, après la communauté villageoise et la communauté de vallée, la troisième et ultime entité dans laquelle vit le Pyrénéen.
Dans l'organisation et la destination de ces trois aires de vie, aucune différence fondamentale. La fédération, nous le constaterons, obéit aux mêmes principes libéraux que la communauté et la vallée : délégation par vote, délibérations, justice directe et immédiate.
Elle répond aux mêmes besoins fondamentaux d'un peuple pasteur : assurer la survie économique du groupe par la mise en commun de certains biens indispensables.
Son originalité par rapport aux autres cadres tient essentiellement à son caractère international.
A cet égard, la fédération constitue un véritable défi aux structures politiques  de l'époque.
En plein XVII ème encore, le Pyrénéen ignore ou feint d'ignorer la politique des gouvernements de Paris et de Madrid .
Il refuse leurs lois lorsqu'elles sont contraires à ses coutumes.
Il ne fait pas siennes leurs intrigues et leurs guerres.
Il rejette totalement leurs frontières.
En réalité, profitant du caractère excentrique et difficilement pénétrable de la chaîne, il a choisi de vivre en marge des deux Etats et tenté de bâtir son propre royaume.


Mais, dira-t-on aujourd'hui, la géographie et l'histoire ne rangeaient-elles pas d'emblée un tel projet au rayon des chimères ?
 Rien n'est moins sûr.
La montagne, loin de représenter la barrière physique et humaine qu'elle est devenue de nos jours, formait au contraire un terrain de rencontre naturel entre les pasteurs des deux versants.
Il faut d'autre part, se souvenir que pendant des siècles, comtes et souverains régnèrent sur des Etats qui englobaient les deux versants.
Ce ne fut paradoxalement qu'à partir du moment où l'on déclara "Il n'y a plus de Pyrénées" que celles-ci se dressèrent comme barrière pour séparer des peuples profondément unis jusqu'alors.
En fait, bien avent le fameux traité  de 1659, de premières menaces tendirent à rompre la longue habitude de vie commune des Pyrénéens des deux versants, mais n'eurent pour effet final que de resserer leurs liens.
Le traité de Corbeil (1258) qui, pour la première fois, fit des Pyrénées la limite entre les deux royaumes de France et d'Aragon  eût pu sonner le glas des relations privilégiées qui unissaient les deux peuples.
Crainte d'autant plus justifiée que la nouvelle frontière politique ne tarda pas à se doubler d'une frontière économique ; à la suite des difficultés financières  des monarchies, apparurent alors les premières "traites" ou douanes, à l'entrée et à la sortie des marchandises.
Non sans habileté, les Pyrénéens ripostèrent alors à ces différentes mesures...................
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(je m'aperçois qu'un lien donné sur " l'ours au carnaval " ne fonctionne pas, je le remplace  par une video)

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